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Que faire en cas de cyberharcèlement ?

Article rédigé par Mathilde Goupil
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10min
Une enfant est photographiée avec un portable à la main, le 26 avril 2020 (image d'illustration). (RAFAEL BEN ARI / NEWSCOM / SIPA)

A l'occasion, jeudi, de l'opération #AimeSansHaine de France Télévisions, franceinfo vous donne des clés pour réagir si vous, ou l'un de vos proches, êtes victime de harcèlement en ligne.

Un fléau souvent invisible, mais aux conséquences bien réelles. Plus d'un Français sur deux (59%) a déjà été victime d'au moins une forme de harcèlement en ligne (messages insultants ou menaçants, propagation de rumeurs, diffusion de montages photos, usurpation d'identité...), selon une enquête Ipsos publiée en décembre. Les jeunes sont encore plus touchés : 74% des moins de 35 ans y ont déjà été confrontés, selon la même étude. Avec des conséquences parfois dramatiques, comme l'a rappelé fin octobre le suicide de Dinah, une lycéenne de 14 ans, à Mulhouse (Haut-Rhin).

Selon le Code pénal, le cyberharcèlement est le fait d'être visé par "des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet (...) une altération de sa santé physique ou mentale", le tout via "un support numérique ou électronique". Il peut donc être commis par une seule personne, mais aussi par plusieurs personnes qui n'agissent chacune qu'une seule fois. Le harcèlement en ligne est punissable de deux ans de prison et de 30 000 euros d'amende. Le fait de cibler une personne vulnérable (mineur, personne porteuse d'un handicap...) est une circonstance aggravante qui expose à une peine pouvant aller jusqu'à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende.

Être victime de harcèlement en ligne est déstabilisant et il n'est pas toujours facile de savoir comment réagir. A l'occasion de l'opération #AimeSansHaine portée par France Télévisions, jeudi 17 février, franceinfo vous donne des clés pour réagir si vous êtes victime ou témoin de cyberharcèlement, mais également si vous êtes parent d'un enfant visé.

Si je suis victime de cyberharcèlement

Je ne réponds pas. Il faut "ne surtout pas répondre ni se venger" en cas de cyberharcèlement, souligne la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil). En répondant, vous alimentez la conversation avec votre harceleur qui peut alors multiplier les attaques, et vous risquez d'attirer d'autres harceleurs. Et si vous vous vengez, ou répondez avec des insultes ou des menaces, vous commettez alors vous-même un délit.

J'alerte une personne de confiance. Le cyberharcèlement peut être traumatisant, ne restez pas seul : alertez un proche qui pourra vous aider, conseillent les associations de lutte contre ce phénomène. Les mineurs et leurs proches peuvent contacter Net Ecoute au 3018 (de 9 heures à 20 heures du lundi au samedi), sur 3018.fr ou via l'application 3018. La plateforme anonyme et gratuite, gérée par l'association de protection de l'enfance sur internet e-Enfance, apporte une écoute et une aide aux mineurs victimes de harcèlement en ligne.

Je conserve des preuves. Conservez des preuves de votre harcèlement : faites notamment des captures d'écran des messages dans leur contexte (en incluant tout l'écran avec date, heure, expéditeur, type de messagerie et/ou lien hypertexte du contenu). Si toutes ces informations ne sont pas disponibles, utilisez si possible un logiciel vous permettant de faire une capture d'écran horodatée, conseille la Cnil. Vous pouvez conserver ces preuves dans l'application 3018. Vous pouvez également faire constater les contenus illicites par un huissier de justice afin d'être certain de pouvoir utiliser ces éléments lors d'un procès, rappelle le site service-public.fr

Parce que ces tâches sont chronophages et émotionnellement difficiles à réaliser pour la victime, n'hésitez pas à demander à une personne de confiance de vous aider ou de les faire à votre place.

Je me protège. Il est crucial de limiter l'accès de votre harceleur à vos comptes sur les réseaux sociaux, votre messagerie ou toute autre plateforme utilisée pour vous harceler. Une fois que vous avez conservé des preuves de votre harcèlement, vous pouvez modifier les paramètres de confidentialité de vos comptes afin de les verrouiller au maximum, désactiver vos notifications, bloquer le compte, l'adresse mail ou le numéro de votre harceleur. Là encore, n'hésitez pas à solliciter l'aide d'une autre personne.

Il est également possible de signaler les contenus indésirables à l'hébergeur de la plateforme, sur le site de l'association Point de contact et sur Pharos, qui permet d'alerter les autorités de faits illicites sur internet.

A savoir : les conditions du retrait des contenus dépendent des critères propres à chaque plateforme et non des lois françaises. Et cela prend souvent du temps. 

Je porte plainte. Vous pouvez porter plainte pour cyberharcèlement en vous rendant au commissariat ou à la gendarmerie, ou en écrivant au procureur de la République, rappelle le ministère de l'Intérieur. Attention, les personnes mineures peuvent signaler aux autorités des faits de cyberharcèlement, mais elles ne peuvent pas porter plainte sans une personne majeure.

Si je suis témoin de cyberharcèlement

Je ne partage pas, je ne réponds pas. Le fait de "partager" des contenus qui s'apparentent à du harcèlement "implique votre responsabilité devant la loi", rappelle la Cnil. Par ailleurs, en partageant les contenus ou en répondant au harceleur, même en voulant dénoncer son comportement, vous contribuez au brouhaha dont est déjà victime la personne visée par le harcèlement (par exemple en multipliant ses notifications sur les réseaux sociaux) et vous prenez le risque de renforcer le harcèlement, soulignent les associations. Pour apporter votre soutien à la victime, il est préférable de la contacter par message privé ou de la rencontrer.

Je propose mon aide à la victime. N'hésitez pas à proposer de l'aide à la personne victime de harcèlement ou à donner l'alerte (à un parent ou un professeur s'il s'agit d'un mineur par exemple). Vous pouvez également lui apporter votre soutien en prenant le contrôle de son compte sur la plateforme utilisée pour la harceler afin de conserver des preuves de son harcèlement et de verrouiller son compte pour limiter son exposition aux contenus malveillants (lire plus haut la première partie). N'hésitez pas non plus à signaler lesdits contenus à l'hébergeur du site ou aux autorités via la plateforme Pharos.

Si mon enfant est victime de cyberharcèlement

Je lui en parle. Si vous remarquez un changement de comportement de votre enfant ou des messages suspects sur ses réseaux sociaux, n’hésitez pas à lui en parler, avance l'association e-Enfance"Votre enfant peut avoir peur de parler, alors ne le brusquez pas. (...) Allez-y doucement, demandez-lui d'abord si quelque chose ne va pas à l'école, si quelqu'un l'embête. Il est essentiel de lui faire comprendre que, quoi qu'il dise, il n'a rien à craindre", conseille également à franceinfo la pédopsychiatre Nicole Catheline, spécialiste des troubles de la scolarité. S'il n'ose pas se confier, encouragez-le à parler à un autre adulte.

Je recueille des preuves. Faites des captures d'écran des messages malveillants (en incluant tout l'écran avec date, heure, expéditeur, type de messagerie et/ou lien URL du contenu). Vous pouvez contacter Net Ecoute au 3018 (de 9 heures à 20 heures du lundi au samedi), sur 3018.fr ou via l'application 3018 pour vous faire aider. La plateforme anonyme et gratuite, gérée par l'association e-Enfance, apporte une écoute et une aide aux mineurs victimes de harcèlement en ligne. Vous pouvez également faire constater les contenus illicites par un huissier de justice afin d'être certain de pouvoir utiliser ces éléments lors d'un procès.

Je le protège. Eloignez votre enfant d'internet, modifiez les paramètres de ses comptes sur les réseaux sociaux pour les rendre les plus privés possible et bloquez l'auteur du harcèlement dans ses contacts, sur les réseaux sociaux, ses messageries, etc. Là encore, le 3018 peut vous accompagner. Vous pouvez signaler les contenus indésirables à l'hébergeur de la plateforme, sur le site de l'association Point de contact et sur la plateforme Pharos, qui permet d'alerter les autorités de faits illicites sur internet.

Si le harcèlement a lieu en milieu scolaire, alertez l'équipe éducative afin qu'elle prévienne les parents de l'élève concerné et protège votre enfant. Si elle tarde à réagir, ou si sa réaction ne vous semble pas suffisante, vous pouvez contacter le référent harcèlement de l'académie (les coordonnées sont sur le site du ministère de l'Education nationale). Surtout, n'essayez pas de résoudre le problème par vous-même, cela pourrait aggraver le harcèlement, conseille e-Enfance.

Je porte plainte. Vous avez le droit de porter plainte pour votre enfant en vous rendant au commissariat ou à la gendarmerie, ou en écrivant au procureur de la République, rappelle le ministère de l'Intérieur. 

Enfin, il peut arriver que vous découvriez que votre enfant est lui-même auteur de cyberharcèlement. Dans ce cas, il faut "essayer de comprendre pourquoi il agit ainsi, il faut lui proposer un accompagnement, d'un pédopsychiatre par exemple", conseille la spécialiste Nicole Catheline.


Si vous avez besoin d'aide, si vous êtes inquiet ou si vous êtes confronté au suicide d'un membre de votre entourage, vous pouvez joindre le 3114 24h/24 et 7 jours/7. La ligne Suicide écoute est également joignable au 01 45 39 40 00. D'autres informations sont également disponibles sur le site du ministère des Solidarités et de la Santé.

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