"C’est difficile de trouver la motivation" : des étudiants d'universités bloquées se préparent péniblement à passer leurs partiels
A quelques jours des partiels du second semestre, les étudiants tentent de réviser leurs examens. Pour certains d'entre eux, dont les facultés sont bloquées depuis la fin mars, l'inquiétude grandit.
"C’est anxiogène d’être dans l’incertitude" confie Boris*, 18 ans, en 1ère année de licence de mathématiques à l’université Rennes 2, bloquée depuis le 9 avril. Le mot "stress" est dans toutes les bouches des étudiants contactés par franceinfo. Leurs facultés font partie de la quinzaine d’établissements bloqués, depuis fin mars, par des étudiants opposés à la réforme de l’accès à l’université.
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La période des examens commence dans moins de deux semaines et ils ne savent toujours pas quand et où leurs partiels vont se dérouler. "Tous les jours, les infos changent. Un coup, c’est ici. Un coup, c’est annulé. Un coup, c’est maintenu...", explique Louise, 21 ans, en 2e année d’histoire à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, "fatiguée de ces montagnes russes d’émotion".
Partiels annulés ou reportés ?
Les premières annulations d’épreuves – des options – sont tombées dès la semaine du 16 avril. "Lundi, je suis arrivée devant l’amphi : bloqué ! J’avais bossé tout le week-end pour mon partiel", poursuit Louise, quand Boris, lui, s'inquiète : "J’ai déjà loupé sept-huit contrôles qui comptent pour le contrôle continu. Je ne sais pas s'ils seront rattrapés, ni sous quelle forme".
Globalement, les étudiants sont dans le flou, angoissés de ne pas savoir.
Guillaume, étudiant en 2e année d'histoire à Paris 1à franceinfo
La plupart des étudiants ont déjà raté quatre semaines de cours, alors qu'un semestre en compte douze. Certaines universités envisagent de reporter la période des partiels, initialement prévue du 2 au 19 mai. "La présidence de Tolbiac a déjà décidé de rallonger cette période jusqu’au 26 mai, pour rattraper les épreuves annulées cette semaine", précise Guillaume. Après l'évacuation des occupants vendredi matin, le directeur a confirmé la tenue des examens "dans d'autres centres universitaires de Paris et du Grand Paris".
Les étudiants interrogés par franceinfo sont tous contre la possibilité d'un report, une opinion partagée par une majorité de leurs camarades, assurent-ils. Car ils sont nombreux à avoir déjà pris des engagements professionnels, des jobs d’été ou des stages. Certains ont déjà prévu leur retour chez eux, à l’étranger. Des boursiers expliquent ne pas avoir les moyens de multiplier les allers-retours.
Des étudiants anxieux
Boris est "inquiet pour [son] année" : "Les profs ne savent pas quand auront lieu les examens, la présidence ne donne aucune information." Depuis un mois, ils n’ont plus cours. "On ne travaille plus, on perd petit à petit nos capacités, nos connaissances", s'inquiète Louise. Alors se remettre dans le bain n’est pas évident. "C’est difficile de trouver la motivation", explique Boris qui révise seul chez lui, car la bibliothèque universitaire est surchargée. Sans date de partiels, il ne peut "pas se projeter et faire un planning de révisions". Alors en fin de journée, il va courir pour évacuer.
Le plus dur, c’est qu’il n’y a plus de rythme de vie étudiante (...). Et si on ne fait pas d’effort, on se retrouve vite seul et on décroche.
Louise, en 2e année à Paris 1à franceinfo
Régulièrement Louise retrouve ses camarades lors de révisions communes organisées par l'association H comme histoire, présidée par Guillaume. Pendant quatre heures, ils révisent et s'entraînent. "Ils viennent nous voir pour échanger", explique Guillaume.
Lucie, 18 ans, en première année à Sciences Po, fait partie d’un groupe d’étudiants qui s’est créé pour l’occasion. "On travaille ensemble, on s’échange nos cours, nos fiches de lecture." Elle assure que beaucoup de professeurs sont restés en lien avec leurs élèves. "Ils mettent en ligne des visioconférence sur le site de la fac" et certains, comme la chargée de TD de Lucie, vont jusque dans les jardins du Luxembourg pour y faire cours. "C’était atypique, mais agréable. Et elle nous a rassurés sur la suite." Malgré tout, Louise, Lucie et Guillaume tentent de rester optimistes car leurs professeurs leur ont confirmé que les examens devraient porter uniquement sur les connaissances acquises en cours, avant le blocage.
Bouillonnement intellectuel
En attendant de connaître leurs dates et lieux d’examen, Guillaume, Boris, Lucie et Louise révisent tant bien que mal. Si Boris semble résigné et remonté contre son université, Louise et Lucie trouvent tout de même quelques bons côtés à cette situation. Leur faculté est bloquée, "mais elle continue complètement de vivre. Il y a des débats, des présentations de travaux, des ateliers de réflexion", positive Lucie. Elle trouve que "les profs sont moins froids et plus sensibles à nos situations personnelles, ils cherchent des solutions pour que notre année se termine le mieux possible".
C’est l’occasion pour Louise et ses camarades de mettre en pratique leurs cours de politique et de débattre de l’actualité. Ce serait même l’occasion d'"un bouillonnement intellectuel pour penser une vie universitaire différente" d'après Lucie.
(*) Le prénom a été modifié
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