Prostitution : des mineures recrutées dès le collège via les réseaux sociaux, le phénomène prend de l'ampleur
Les associations estiment à environ 10 000 le nombre de mineurs victimes de proxénétisme en France, en grande majorité des filles âgées d'une quinzaine d'années.
Quand elle rencontre sur internet un homme d'une vingtaine d'années qui deviendra son proxénète, Marion n'a que 15 ans. L'adolescente est alors en pleine rupture familiale et scolaire. Aujourd'hui sortie de la prostitution après des années très difficiles, la jeune femme tient à mettre en garde tous les parents : "On n’est jamais trop sur le dos de son enfant. Vérifiez le téléphone, vérifiez ses accès à internet parce que sur les réseaux, il se passe beaucoup de choses."
"Aujourd’hui, dans notre propre chambre, il peut nous arriver des choses bien plus graves qu’en sortant dans la rue. Tout peut se passer derrière un écran."
Marion, prostituée à 15 ansà franceinfo
Sur Instagram, TikTok ou encore Snapchat, le recrutement des jeunes filles se fait insidieusement, et souvent dès le collège, explique Esther Macle, juge pour enfants à Bobigny. "Les mineures donnent des photos intimes à leurs petits amis et ensuite, ceux-ci les diffusent sur les réseaux sociaux. Ces photos sont diffusées dans le collège. Il y a alors des individus qui entrent en contact avec elles alors qu’elles sont déjà ostracisées, mises de côté, qu’elles ont des difficultés, qu’elles sont vulnérables, pour les entraîner dans la prostitution, leur dire qu’ils sont là pour elles. Pour se présenter comme des personnes ressources et ensuite devenir leur proxénète."
>> Le phénomène de la prostitution des mineurs explose en France
Les jeunes proxénètes peuvent gagner jusqu'à 1 500 euros par jour. Sur les réseaux, les équipes les plus structurées proposent même des "packs" aux victimes. "Ça, c’est leur langage, explique Christophe Molmy, chef de la brigade de protection des mineurs à Paris. En fait, ils essaient d’attirer un peu en disant : je te fais un pack, je m’occupe de tout. C’est-à-dire qu’ils déchargent la jeune fille de toute contrainte. Ils la font venir, parfois de l’autre bout de la France. Ils la logent, paient le voyage et ils s’occupent de toute la démarche sur internet pour trouver des clients. Ils vont jusqu’à la protéger in situ et prendre une part conséquente, en général la moitié des gains."
Pour mettre un coup de frein à ces pratiques, la police judiciaire parisienne vient de créer un groupe d'enquêteurs spécialisés dans la lutte contre la prostitution des mineurs. Adrien Taquet, le secrétaire d'État chargé de l'enfance, présente lundi 16 novembre un plan national de lutte. En cinq ans, sur l'ensemble du territoire, le nombre de victimes a progressé de 70%. Les associations estiment à environ 10 000 le nombre de mineurs victimes de proxénétisme en France, en grande majorité des filles âgées d'une quinzaine d'années.
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