PMA : "Une femme qui viendrait pour une congélation d'ovocytes, je lui dirais que je ne peux rien faire avant un an et demi", regrette un gynécologue
"Une femme qui viendrait aujourd'hui me faire une demande pour une congélation d'ovocytes, je lui dirais que je ne peux rien faire avant un an et demi. Ça n'a aucun sens", regrette ce mercredi sur franceinfo Michael Grynberg, gynécologue et obstétricien aux services de médecine de reproduction à l’AP-HP Antoine Béclère à Clamart, près de Paris.
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Deux ans après la promulgation de la loi, les demandes de PMA (procréation médicalement assistée) ont fortement augmenté. Tellement que certains centres ne peuvent plus faire face. Pour réduire les délais d'attente, l'exécutif va élargir le nombre de centres autorisés à conserver les ovocytes.
Vous vous attendiez à un tel engouement ?
Michael Grynberg : Oui on s'attendait à un tel engouement. On est un pays qui est extraordinaire pour ça : tout est intégralement pris en charge. Toutes les femmes de 29 à 37 ans sont dans le droit de pouvoir congeler des ovocytes, c'est une avancée extraordinaire, c'est super d'un point de vue sociétal, ça correspond vraiment à une demande. On est le seul pays au monde où c'est intégralement pris en charge et sans limite du nombre d'ovocytes congelés et sans limite du nombre de cycles à faire.
C'est très bien mais on n'a pas été dotés en moyens suffisants pour pouvoir le faire. Les files d'attente s'allongent et on est contre-productifs. Le but de la congélation d'ovocytes c'est de lutter contre le temps qui passe et le déclin de la fertilité de la femme et en fait on leur fait perdre un an, deux ans ou trois ans avant de pouvoir congeler.
Le gouvernement annonce qu'il va élargir le nombre de centres autorisés à conserver les ovocytes, est-ce que ça va servir à désengorger les centres qui existent aujourd'hui ?
Ça va bien entendu désengorger un peu le système, mais ça ne va jamais le désengorger totalement. Les centres qui vont être habilités à pouvoir congeler des ovocytes sont uniquement des centres publics ou des centres privés à but non lucratif, alors que tous les centres qui font de la PMA au quotidien, notamment les centres privés à but lucratif, pourraient très bien avoir le droit de le faire.
Aujourd'hui c'est une non-volonté du gouvernement qui, pour moi, est un non-sens, parce qu'à partir du moment où on estime que tous les centres peuvent faire de la PMA pour aider les couples infertiles, je ne vois pas pourquoi une femme ne pourrait pas aller voir son médecin, même s'il exerce dans le privé, pour pouvoir congeler ses ovocytes, alors qu'il est en mesure de le faire techniquement.
Comment est-ce que vous vous gérez ces afflux dans les hôpitaux dans lesquels vous travaillez ?
Je travaille dans deux centres et ils sont débordés de demandes. Une femme qui viendrait aujourd'hui me faire une demande pour une congélation d'ovocytes, je lui dirais que je ne peux rien faire avant un an et demi. Ça n'a aucun sens. On essaye déjà d'écluser les patientes qu'on a sous le coude.
"On a arrêté de prendre les nouvelles demandes parce qu'on ne peut pas."
Michael Grynbergà franceinfo
Et il faut savoir que contrairement à une PMA conventionnelle, une FIV [Fecondation In Vitro] par exemple, elle s'arrête s'il y a une grossesse. Là, il n'y a pas de fin réellement, c'est un nombre d'ovocytes qu'on cherche à cibler et plus il y a d'ovocytes, plus il y a de chances, donc les femmes répètent les cycles et il faut au minimum deux ou trois cycles par femme quand on congèle. C'est donc totalement différent d'une PMA classique qui se solde, ou pas, par une grossesse.
On a fait des fausses promesses à ces femmes selon vous ?
Je ne dirais pas qu'on a fait des fausses promesses parce que l'ouverture à la PMA est là. C'est une grande avancée, on peut congeler des ovocytes sans motif médical, on a accès à la PMA quand une femme est célibataire ou quand deux femmes sont en couple. Mais le problème, c'est la mise en place de cette loi qui a été catastrophique. On a eu l'impression d'être pris en otage par une loi qui est venue trop tard. Dans ce sens, il y a une part de fausse promesse.
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