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"Geste pénitentiel" des évêques à Lourdes : une victime d'un prêtre veut "sortir de cette logique de pardon" pour une "démarche de vérité"

Après la reconnaissance de la "responsabilité institutionnelle" de l'Église dans la pédocriminalité, Yolande du Fayet de la Tour, victime d’un prêtre, estime désormais qu'il faut "poser des actes" pour faire revenir la confiance. 

Article rédigé par franceinfo
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Messe lors d'une séance plénière des évêques de France au sujet de la pédocriminalité dans l'Église, à Lourdes, le 2 novembre 2021. (LE DEODIC DAVID/SUD OUEST / MAXPPP)

"J’aimerais sortir de cette logique compassionnelle et de pardon" pour "rentrer dans une démarche de justice et de vérité", a déclaré samedi 6 novembre sur franceinfo Yolande du Fayet de la Tour, victime d’un prêtre et membre du collectif "De la parole aux actes", alors que les évêques de France, rassemblés à Lourdes, ont reconnu "la responsabilité institutionnelle" de l’Église catholique et la dimension "systémique" des violences sexuelles. Ils organisent samedi un "geste pénitentiel" envers les victimes de pédocriminalité.

Yolande du Fayet de la Tour estime qu'il faut maintenant "poser des actes" pour tenter de faire revenir la confiance. Elle sera présente à la manifestation parisienne devant la Conférence des évêques de France à 14 heures. Une autre mobilisation est prévue à Lourdes.

franceinfo : Vous faites partie des victimes qui ont été agressées par un prêtre. Les paroles sont là. Des mots qualifiés d’"historiques". Êtes-vous d'accord ?

Yolande du Fayet de la Tour : Oui, c'est très important et nous nous en réjouissons. En même temps, nous sommes des gens qui avons perdu la confiance en les évêques et donc maintenant, pour la reconstruire, il s'agit de poser des actes. Bien sûr, on se réjouit de la reconnaissance et la responsabilité. Mais on ne peut pas se contenter de paroles et déclarations. Ensuite, il s'agit de passer à l'indemnisation, la réparation et aussi les réformes. Et en ce sens-là, nous attendons quand même des évêques qu’ils sortent d'une logique descendante. Qu'ils prennent les victimes et donc notre collectif comme étant des experts de la situation et nous mettent au cœur du dispositif de la réforme et de la réparation. On a envie de leur donner crédit et en même temps, on est frileux quant à la mise en œuvre parce que des déclarations on en a beaucoup entendues sur le terrain, quel que soient les diocèses. Et comme l'a dit Jean-Luc Souveton [prêtre du diocèse de Saint-Étienne, victime du père Régis Peyrard quand il avait 15 ans] lors de son discours inaugural, nous ne sommes pas des enfants qui ont besoin d'être calmés. Nous sommes des adultes face à d'autres adultes qui doivent prendre leurs responsabilités et qui doivent s'engager dans un processus de réparation maintenant.

Faudrait-il une démission collective, par exemple ?

Ma position n'est peut-être pas forcément la position de toutes les personnes dans le collectif, mais je trouve que ça aurait été un geste spontané, qu'on aurait pu attendre. Ils ne l'ont pas fait. Moi, j'aurais pu attendre aussi que le pape le fasse. Il l'a bien fait avec les évêques chiliens. Je m'attendais à ce que, pour le deuxième coup d'éclat en France, après Monseigneur Barbarin où il n'avait rien fait, j'espérais quand même qu’après le rapport de la Ciase [présidée par Jean-Marc Sauvé] qui est accablant, 330 000 victimes, qu'il y ait un geste en ce sens. Nous allons voir comment il va s'intéresser à la crise. Il y aura une autre étape un peu plus tard, début décembre.

À Lourdes, les évêques vont organiser aujourd’hui un "geste pénitentiel". Ça veut dire qu'ils vont demander pardon à Dieu, mais pas directement aux victimes. Qu'en pensez-vous ?

C’est blessant, très blessant, mais en même temps, j’aimerais sortir de cette logique compassionnelle et de pardon. Pour le moment, on n'est pas à l'heure du pardon. On verra après. C'est un peu mettre la charrue avant les bœufs. Nous souhaitons rentrer dans une démarche de justice et de vérité. La compassion, les demandes de pardon, c'est plutôt en clôture du processus.

Un prêtre condamné pour des actes de pédocriminalité a célébré le 24 octobre dernier la messe télévisée à Asnières-sur-Seine. Est-ce la preuve que le système doit être totalement remis en cause ?

C’est extrêmement choquant. C'est pour ça qu'on a du mal à se réjouir. On est pris entre deux feux, on aimerait se réjouir et en même temps, tous les clignotants du terrain nous emmènent dans une position plutôt d'attente et de méfiance. C'est quelqu'un de mon diocèse, c'est à trois kilomètres de chez moi. Je trouve ça insultant et ça démontre que sur le terrain, contrairement à ce qui est dit, rien n'a changé. C'est-à-dire que les vieilles méthodes de déplacement, de silence continuent. C'est proprement scandaleux, inadmissible et ça ne donne pas de crédibilité. Ça ne donne aucun poids aux déclarations qui ont été faites à Lourdes. Personnellement sur le terrain, je n'ai que ce genre d'exemples.

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