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"C'est toute ma vie que je laisse derrière moi" : le difficile départ du domicile pour les femmes victimes de violences conjugales

Des défilés sont organisés dans toute la France, samedi 19 novembre, contre les violences sexistes et sexuelles. L'association Nous Toutes dénonce cette année encore "l'impunité des agresseurs", cinq ans après MeToo.

Article rédigé par Sandrine Etoa-Andegue
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Une manifestation contre les violences faites aus femmes, à Bruxelles en novembre 2021. (NICOLAS LANDEMARD / LE PICTORIUM / MAXPPP)

Pendant huit ans, le quotidien de Lola avec son compagnon c'était "des insultes, des menaces, des claques,...", énumère-t-elle. "Je me faisais cracher dessus, je me suis faite étranglée." À l'été 2021, la jeune femme de 27 ans prend la décision de fuir avec ses deux enfants. "Je ne savais pas comment partir, parce que j'avais peur de partir", explique Lola. 

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"Un jour, il n'a pas dormi chez nous et je me suis dit : c'est aujourd'hui, poursuit Lola. Avant qu'il rentre, je prends quelques affaires, quelques sacs de courses, principalement des affaires pour mes deux enfants. C'est toute ma vie que je laisse derrière moi mais je ne vois plus d'issue."

"C'était soit lui, soit moi qui allait y rester."

Lola, victime de violences conjugales

à franceinfo

Peu de temps après, Lola culpabilise et se remet en couple avec son ex. S'ensuivent de nouvelles violences, une nouvelle plainte et une nouvelle séparation.

Lenteur de la justice, plaintes classées sans suite, peines dérisoires,... Face au danger imminent, certaines femmes n'ont pas d'autre choix que de fuir le domicile familial, seules ou accompagnées par des associations. Après avoir subi pendant des années sans mot dire, mettre fin à la violence n'est pas chose facile, tout comme partir du foyer.

"Elles y retournent entre sept et huit fois"

Tout quitter du jour au lendemain est une première étape souvent difficile à franchir. "Il y a le mécanisme de l'emprise, qui est très compliqué", explique Florence Elie, fondatrice d'Elien Rebirth, l'association qui a aidé Lola à organiser sa fuite. "Souvent, elles y retournent, en moyenne, entre sept et huit fois. Quand il faut partir dans l'urgence, c'est beaucoup de stress pour la maman et pour les enfants, parce que c'est relativement violent de se retrouver dans une chambre d'hôtel ou être mis quelque part. Avant qu'elles puissent enfin souffler et être relogées, il se passe souvent un certain temps et ce n'est pas évident pour elles."

Pour gérer l'après, l'association Une voix pour elles, basée à Grasse (Alpes-Maritimes) leur propose de revenir au domicile familial pour déménager et stocker gratuitement leurs effets personnels. Un soutien logistique, mais aussi moral : il y a eu 67 demandes en 2021, 112 depuis janvier 2022. "Tout ça est orchestré avec les partenaires locaux", détaille Sabine Bodiroga, la présidente. "Ça peut être du déménagement d'urgence, avec la présence des forces de l'ordre : il y a des femmes qui n'ont pas accès à leurs papiers !"

"Il y a les photos, il y a les vêtements, il y a tout un tas de 'souvenirs'... Ça permet de ne pas être totalement perdue et démunie en partant sans rien."

Sabine Bodiroga, présidente de l'association Une voix pour elles

à franceinfo

L'association stocke gratuitement les affaires de ces femmes, en moyenne huit à neuf mois en moyenne. "Ça ne leur coûte rien et quand elles pourront les récupérer elle les récupèreront", conclut Sabine Bodiroga. Un premier pas vers leur reconstruction. 

Le difficile départ du domicile des femmes victimes de violences conjugales - Reportage de Sandrine Etoa-Andegue

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