Succès des JO, fiasco de la finale de Ligue des champions... Le bilan d'Amélie Oudéa-Castéra au ministère des Sports

La ministre des Sports, des Jeux olympiques et paralympiques a été remplacée par Gil Avérous, maire de Châteauroux, dans le gouvernement de Michel Barnier, après un mandat d'un peu plus de deux ans marqué par son bref passage à l'Education.
Article rédigé par Sasha Beckermann
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6 min
Amélie Oudéa-Castera, le 25 août 2024, à Paris. (TERESA SUAREZ / AFP)

Habemus administratio. Deux semaines après avoir été nommé Premier ministre, Michel Barnier a dévoilé, samedi 21 septembre, son gouvernement, composé de 39 ministres. Parmi la valse des ministres ou secrétaires d'Etat sortants, Amélie Oudéa-Castéra, aux manettes depuis un peu plus de deux ans, quitte le ministère des Sports, des Jeux olympiques et paralympiques. Elle est remplacée par Gil Avérous, maire sans étiquette de Châteauroux. Retour sur le bilan de celle qui avait été nommée en mai 2022, entre réussites, bras de fer et polémiques.

La réussite des Jeux olympiques et paralympiques

C'était la grosse échéance de son mandat et le mot "succès" n'est pas de trop, puisque les Jeux de Paris en ont été un grand, tant sur le plan organisationnel que sur le plan sportif pour la délégation française. L'événement a évité toutes les embûches, la presse étrangère a été dithyrambique, les sites ont fait le plein, les transports ont fonctionné et l'ambiance a été au rendez-vous.

Plus de 12 millions de billets ont été vendus pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris (avec un taux de remplissage des enceintes d'environ 95%), un chiffre qui bat largement le record des Jeux de Londres de 2012 (10,9 millions de billets vendus).

Sur le plan purement sportif, les délégations françaises olympique et paralympique ont rempli leurs objectifs en finissant 5e et 8e du tableau des médailles. C'est le meilleur bilan depuis 1900 pour les JO et depuis 2000 pour les Paralympiques.

"C'est une immense satisfaction, a souligné Amélie Oudéa-Castéra dans une interview au Figaro, le 8 septembre. C'est la récompense d'une stratégie pensée depuis plusieurs années, avec des moyens inédits mis au service d'objectifs précis. Il y avait bien sûr tout ce qui concerne la préparation technique, mentale des athlètes, mais aussi leur accompagnement au-delà du sport."

Le ménage fait dans deux grandes fédérations

Ce n'était pas l'un des objectifs de son mandat, et pourtant, "AOC" a dû mettre les mains dans des fédérations secouées par des dossiers brûlants. Si la ministre des Sports n'avait pas le pouvoir de pousser vers la sortie Noël Le Graët et Bernard Laporte, à la tête des fédérations de football (FFF) et de rugby (FFR) alors qu'ils étaient pris dans des affaires, elle y est parvenue.

D'abord, Bernard Laporte. Condamné le 13 décembre 2022 à deux ans de prison avec sursis et 75 000 euros d'amende pour corruption passive, trafic d'influence, prise illégale d'intérêts, recel d'abus de biens sociaux et abus de biens sociaux, notamment au bénéfice du groupe Altrad, l'ancien président de la FFR avait proposé de se mettre en retrait de ses fonctions de président et qu'un président délégué soit désigné. Pas suffisant pour la ministre, ni pour les instances du rugby. Bernard Laporte a finalement annoncé sa démission un peu plus d'un mois après sa condamnation – dont il a fait appel – le 27 janvier 2023.

Pour Noël Le Graët, après de nombreux dérapages, la pression de la ministre, un rapport d'audit accablant et l'ouverture d'une enquête préliminaire pour "harcèlement moral et sexuel", avaient rendu son maintien impossible et l'ont poussé à la démission, le 28 février 2023. Ce rapport pointait un "exercice du pouvoir très centralisé", "des dérapages médiatiques", un "comportement inapproprié vis-à-vis des femmes" et "les défaillances de la gouvernance de la FFF".

La ministre a pourtant elle-même été épinglée pour le salaire qu'elle touchait lorsqu'elle était directrice générale de la Fédération française de tennis, de 2021 à 2022. D'après un rapport d'enquête parlementaire dévoilé en janvier 2024, elle percevait alors une rémunération brute de 400 000 euros annuels, plus 100 000 euros de bonus. Auditionnée en novembre 2023, elle avait affirmé que son salaire était "très proche de celui de son prédécesseur", alors qu'il était supérieur de 86 000 euros.

La lutte contre les violences sexistes et sexuelles renforcée

Depuis le début de son mandat, "AOC" a fait de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) une priorité. "Aucun argument, même pas la quête de médaille, ne doit nous freiner dans cette lutte. Je serai intransigeante car nous le devons aux victimes, à nos enfants et aux valeurs du sport", insistait-elle en mars, lors de la présentation du bilan de l'action de son ministère sur le sujet.

Si elle concédait, à l'époque, un déficit de notoriété de la cellule de signalement Signal Sport, mise en place par sa prédécesseure, Roxana Maracineanu, en 2020, la ministre se félicitait de l'intensification des contrôles : "1,9 million de bénévoles ont été contrôlés. L'un des objectifs est de doubler le nombre de contrôles d'établissement en passant de 3 900 à 6 000 en 2024. Ce contrôle-là n'existait pas il y a encore quatre ans." Quatre-vingts référents sport ont été mis en place au sein des parquets.

Avant la dissolution de l'Assemblée nationale, une loi concernant les VSS dans le sport devait être déposée "fin novembre ou début décembre pour une inscription en séance publique début 2025". Les pistes alors engagées étaient "la suspension de licence à vie dans les cas les plus graves de violences sexuelles et sexistes", mais aussi le renforcement des contrôles d'honorabilité pour tous les bénévoles. Cette loi engloberait d'autres thématiques du sport, comme la démocratie au sein des fédérations.

Le chaos de la finale de la Ligue des champions pour commencer

Quelques jours après sa nomination, en mai 2022, Amélie Oudéa-Castera a dû faire face à l'un des plus gros loupés organisationnels de la France en termes d'événement sportif : la finale de la Ligue des champions entre Liverpool et le Real Madrid au Stade de France.

Si c'est surtout le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, et le préfet de police de Paris de l'époque, Didier Lallement, qui ont été visés par les critiques et le rapport accablant du Sénat, "AOC" n'a longtemps pas voulu se désolidariser des décisions qui ont été prises, ni des propos tenus sur la responsabilité des supporters anglais, qu'elle accusait de s'être présentés en masse avec de faux billets. "Ce qui s'est passé est une expérience désastreuse. J'ai présenté mes excuses aux supporters de Liverpool et du Real Madrid. C'est une blessure profonde qui nous a tous marqués (...) Je veux que plus jamais on n'expose des supporters à une telle situation", concédait-elle sur le plateau de La Chaîne L'Equipe en mai 2023.

Un très éphémère mandat de ministre de l'Education

Le 11 janvier 2024, dans le cadre du précédent remaniement, Amélie Oudéa-Castera récupère, en plus du portefeuille des Sports et des JOP, celui de l'Education. Lors de son premier déplacement, au côté de Gabriel Attal, alors Premier ministre, AOC fait une sortie qui va déjà provoquer sa chute.

Interrogée sur la scolarisation de ses enfants dans un établissement privé, la ministre répond que leur transfert du public vers le privé a été réalisé après avoir "vu des paquets d'heures qui n'étaient pas sérieusement remplacées". Il n'en a pas fallu plus pour que la confiance avec le personnel enseignant soit rompue et que la ministre s'englue dans une polémique dont elle ne parviendra pas à s'extirper.

Polémique sur les propos d'Amélie Oudéa-Castéra : la ministre a présenté ses excuses
Polémique sur les propos d'Amélie Oudéa-Castéra : la ministre a présenté ses excuses Polémique sur les propos d'Amélie Oudéa-Castéra : la ministre a présenté ses excuses (France 2)

Trois semaines après sa nomination, les enseignants étaient dans la rue lors d'une grève le 1er février. Si l'exécutif, dans un premier temps, lui a maintenu sa confiance, la tension a fini par être trop forte. Lors d'une seconde vague de nominations, le 8 février, c'est finalement Nicole Belloubet qui a récupéré l'Education, Amélie Oudéa-Castéra gardant seulement son portefeuille des Sports et des JOP.

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