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Le budget 2014 est-il bon pour le pouvoir d'achat ?

Jean-Marc Ayrault a annoncé mercredi des dispositions pour le pouvoir d'achat des Français les plus modestes. Efficace ? Les réponses de l'économiste Marion Cochard de l'OFCE.

Article rédigé par Clément Parrot - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le gouvernement est attendu par les Français sur la question du pouvoir d'achat. ( MAXPPP)

Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a dessiné, mercredi 11 septembre, les grandes lignes du budget 2014. Avec 15 milliards d'euros d'économies sur les dépenses de l'Etat, le gouvernement continue son travail de sérieux budgétaire. François Hollande, que Libération qualifiait mardi de "président des patrons", impulse des mesures en faveur des entreprises. Mais il souhaite également montrer qu'il se préoccupe du pouvoir d'achat de ses concitoyens.

À ces fins, Jean-Marc Ayrault a confirmé le dégel du barème de l'impôt sur le revenu et a annoncé une augmentation de la décote, qui permet aux plus modestes de ne pas entrer dans l'impôt sur le revenu. ll s'agit d'une "mesure de pouvoir d’achat qui est très importante", a-t-il déclaréInterrogée par francetv info, Marion Cochard, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), revient sur les choix du gouvernement en matière de pouvoir d'achat des Français.

Francetv info : Les annonces du gouvernement en faveur du pouvoir d’achat vous semblent-elles efficaces ?

Marion Cochard : La pause fiscale, avec les annonces de Jean-Marc Ayrault sur l'impôt sur le revenu, s'avère être une bonne nouvelle pour les ménages. Mais ils ne doivent pas s’attendre à une année facile, même si je constate que le gouvernement prévoit un peu moins de rigueur budgétaire qu’annoncé, puisque l'on s'oriente vers un effort de 18 milliards [15 milliards d'économies ajoutés aux 3 milliards de recettes fiscales] au lieu des 20 prévus initialement. 

On se dirige encore vers une politique de restrictions budgétaires. La seule différence, c'est que les hausses d’impôts sont remplacées par les 15 milliards d'économies sur les dépenses. Ces coupes budgétaires risquent de peser d'une manière ou d'une autre sur le pouvoir d'achat des Français. Comme l'Etat souhaite surtout lever le pied sur les entreprises, le budget devrait pénaliser les ménages [à l'image de la hausse de la TVA déjà votée]. 

Est-ce classique pour un gouvernement socialiste de prendre soin ainsi des entreprises ?

Habituellement, les gouvernements socialistes se tournent plus vers une politique de la demande, c'est à dire une relance de la consommation par l'augmentation de la dépense publique ou la baisse des impôts. Là, on va essayer d’alléger ou de ne pas alourdir l’imposition sur les entreprises. Il s'agit plutôt d'une politique de l'offre.

D'une manière générale, aujourd’hui, c’est un choix adopté partout en Europe. Les entreprises sont dans une situation un peu compliquée, la priorité du gouvernement reste donc de rétablir leur capacité de production. Elles vont peut-être se remettre à produire davantage, mais il arrivera un temps où la demande sera nécessaire pour écouler les stocks. C'est à ce moment-là qu'il faudra alléger la politique de rigueur et mettre en place une relance économique.

Quelles seraient, à votre avis, les bonnes mesures pour relancer la croissance ?

Une des pistes serait justement de mettre en place une politique de la demande. La hausse de la prime pour l'emploi [une hypothèse envisagée dimanche par Michel Sapin lors de l'émission "C Politique"] pourrait être un bon levier, même si j'avais plutôt tendance à penser qu'elle serait amenée à disparaître avec la création du RSA [Revenu de solidarité active]. Le RSA a bien gommé les problèmes de seuil en cas de reprise d'emploi, on pourrait donc tout aussi bien l'augmenter. En revanche, je suis très réservée sur la défiscalisation des heures supplémentaires [après avoir supprimé le dispositif, des socialistes demandent son rétablissement], qui n'incite pas les entreprises à embaucher.

Il existe d'autres possibilités, comme le "chèque énergie", qui me semble une piste pour les personnes défavorisées, surtout dans les périodes de grand froid. La prime à la casse semble intéressante d'un point de vue écologique, mais cela reste conjoncturel. Reste un coup de pouce au smic, qui pourrait être une bonne idée, tout comme l'augmentation du point d'indice de la fonction publique. Mais je pense que le gouvernement ne retiendra pas la piste du smic, vu qu'il s'est engagé sur une politique de l'offre. Il jouera plutôt sur la prime pour l'emploi, qui est suportée par l'Etat, et non par les entreprises.

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