Santé, travail, fiscalité... Comment Bercy compte réaliser "au moins 10 milliards d'économies" pour redresser les finances publiques
"Nous devons revenir à la normale en matière de dépenses publiques." Le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, a annoncé, lundi 19 juin, qu'"au moins 10 milliards d'euros d'économies" avaient été identifiés pour permettre le redressement des comptes publics de la France d'ici 2027. Pour "accélérer le désendettement de la France", le gouvernement veut tourner la page du "quoi qu'il en coûte" et miser sur la "croissance", le "travail" (via le plein emploi) et donc les "économies", "car il reste des gisements de dépenses inefficaces partout dans la dépense publique", a défendu Bruno Le Maire.
A l'occasion des assises des finances publiques, organisées à Paris après une revue des dépenses de l'Etat, des collectivités et des administrations sociales, le ministre a évoqué des "dépenses inutiles" qui "ne donnent pas les résultats attendus ou qui sont contradictoires avec nos objectifs climatiques". Ces pistes d'économies, qui seront précisées dès septembre dans le projet de budget pour 2024, portent sur les dépenses de santé, de logement, d'emploi ou encore sur la politique fiscale.
Moins d'arrêts maladie et de frais de santé
Bruno Le Maire veut lutter contre les "dérives" liées à la forte augmentation du nombre d'arrêts maladie prescrits, passés de 6,4 millions à 8,8 millions en dix ans selon lui. "C'est une hausse de plus de 30%, qui nous a conduits en 2022 à dépenser au total 16 milliards d'euros", a-t-il souligné, sans chiffrer les économies attendues.
Le gouvernement veut aussi s'attaquer aux dépenses de médicaments, dont "la gratuité ou la quasi-gratuité peuvent conduire à déresponsabiliser le patient". "Chaque médecin généraliste prescrit en moyenne l'équivalent de 730 000 euros par an, c'est-à-dire 450 euros par patient", avance Bruno Le Maire, évoquant, là encore, des "dérives". L'exécutif appelle à "définir des règles plus efficaces" et "une meilleure répartition des charges", qui pourraient être davantage supportées par les patients et leurs mutuelles.
Des reculs sur les aides à l'emploi et le logement
La baisse du taux de chômage en France ouvre la voie, selon Bercy, à des économies en matière d'incitations à l'embauche. "Nous continuons à soutenir massivement l'emploi, observe Bruno Le Maire. C'était légitime quand il fallait faciliter le retour à l'emploi. Mais quand le taux de chômage diminue, le coût des aides à l'emploi doit diminuer." Le gouvernement juge "possible" de réduire l'implication de l'Etat dans le financement de l'apprentissage et entend "responsabiliser" les salariés en leur faisant payer en partie leurs formations quand ils utilisent leur compte personnel de formation (CPF). Le montant des gains espérés n'a pas été détaillé.
Déjà annoncées début juin, d'autres économies toucheront le secteur du logement. Le gouvernement a par exemple choisi d'enterrer le dispositif Pinel, qui permet aux propriétaires de logements neufs de bénéficier de réductions d'impôts en cas de mise en location de leurs biens. Le prêt à taux zéro, destiné aux ménages modestes et intermédiaires, ne sera lui plus accessible que pour l'achat d'un appartement neuf en zone tendue, et non plus d'une maison. "Cela représente une économie globale de plus de deux milliards à terme", chiffre Bruno Le Maire.
Un effort demandé aux opérateurs de l'Etat et aux collectivités
Les opérateurs de l'Etat, qui exercent pour le compte de l'Etat un certain nombre de missions d'intérêt général (Pôle emploi, Météo France, universités...), vont devoir "revenir à des règles de bonne gestion budgétaire", prévient Bruno Le Maire. "Nous limiterons leur trésorerie, qui a bondi de 35 à 65 milliards d'euros en quatre ans", a affirmé le ministre, promettant "une démarche de contractualisation de leurs recettes et de leurs dépenses" et une "transparence publique sur leurs comptes". Les taxes affectées à ces opérateurs doivent répondre à des "besoins" définis et "ne peuvent constituer des rentes aux frais des contribuables", selon le ministre.
Bruno Le Maire veut aussi créer un Haut Conseil des finances publiques locales, qui serait chargé de "définir des choix stratégiques" impliquant les collectivités territoriales. Saluant "la bonne gestion" de ces territoires "qui ont dégagé pour la plupart des excédents" l'an dernier, le ministre appelle à définir "une nouvelle méthode pour les quatre prochaines années" avec ces partenaires. Aucune économie particulière n'a été mentionnée, dans un contexte tendu après que les présidents des trois principales associations des maires, des départements et des régions de France ont décidé de boycotter ce rendez-vous organisé à Bercy.
Une fiscalité moins favorable pour les énergies fossiles
Dans une logique de "verdissement de la fiscalité", le ministre de l'Economie a annoncé la fin progressive d'avantages fiscaux pour les énergies fossiles. "Nous devons réduire les dépenses fiscales sur les carburants, a-t-il détaillé. Cela concerne les tarifs réduits d'accises sur les transports routiers, sur le gazole non routier non agricole et sur le gazole non routier agricole." Bruno Le Maire a assuré que les professionnels des transports routiers, du bâtiment et de l'agriculture étaient "prêts à s'engager dans cette démarche", qui aboutira "d'ici 2030" grâce à "des mesures de compensation pour les aider à opérer leur transition". Selon Les Echos, la fin de l'avantage sur le gazole non routier permettrait de réaliser 870 millions d'économies par an.
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