France Travail : vers une explosion des chiffres du chômage ?
Ne dites plus Pôle emploi, mais France Travail. Le Conseil des ministres examine, mercredi 7 juin, le projet de loi censé permettre de faire reculer le taux de chômage à 5%. Il est à un peu plus de 7% aujourd'hui.
>> Que contient le projet de loi "plein-emploi", présenté mercredi en Conseil des ministres ?
France Travail, le nouvel opérateur qui va remplacer Pôle Emploi, verra le jour d'ici au 1er janvier 2025 et, premier casse-tête, le 1,9 million d’allocataires du RSA y seront progressivement inscrits, alors qu'aujourd'hui, 6 bénéficiaires sur 10, (1,2 million) passent sous les radars des statistiques de Pôle emploi. Alors, dans quelle catégorie les placer pour ne pas faire exploser mécaniquement les chiffres du chômage ? Faut-il inscrire la grande majorité d'entre eux, qui ne travaillent pas du tout dans la catégorie A (celle qui rassemble les personnes qui n'exercent aucune activité) ? Ce serait logique, mais politiquement risqué.
La catégorie A est très commentée et y intégrer plus d’un million de personnes en plus ferait exploser le mercure du baromètre de l’emploi. Pour éviter de voir rouge, le ministère du Travail réfléchit avec Pôle Emploi à ajuster les catégories, peut-être en créer une nouvelle. Rien n'est encore acté. Le cabinet d'Olivier Dussopt cherche aussi à déminer le sujet en mettant en avant que le taux de chômage n'est pas calculé en regardant l'évolution du nombre d'inscrits à Pôle emploi, mais au travers de l’enquête menée sans interruption par l'Insee auprès de plusieurs milliers de personnes représentatives.
400 000 personnes supplémentaires à suivre
La charge va être énorme pour France Travail, d’autant plus que les 20% de bénéficiaires du RSA qui n’étaient pas du tout suivis par Pôle Emploi, vont désormais l’être par France Travail. Leur dossier va être transmis par les caisses d'allocations familiales, les CAF, qui leur versent le Revenu de solidarité active et il y aura des rendez-vous obligatoires pour définir leurs besoins : trouver un logement stable, passer le permis, faire du bénévolat associatif, un stage en entreprise… Dans le but de retourner à l’emploi. Les activités seront écrites dans un contrat signé entre l'allocataire et celui ou celle qui va le suivre. S'il ne les fait pas, qu'il manque des rendez-vous, le versement du RSA, 607 euros pour une personne seule, pourra être suspendu temporairement, une nouvelle sanction inscrite dans le projet de loi. En revanche, l'idée qui fait polémique, de chiffrer ces activités, 15 à 20 heures par semaine obligatoire, n'est finalement pas dans le texte. Mais il ne disparaît pas. Cela reste un objectif à atteindre pour certains bénéficiaires, insiste Matignon.
Les syndicats ont fait part de leur inquiétude. Il va falloir recruter des milliers d'agents et de travailleurs sociaux, pour pouvoir vraiment accompagner chacun. Or, Matignon et le ministère du Travail refusent de donner le moindre chiffre, ni sur un objectif de recrutements, ni sur les dépenses engagées. Il faudra attendre le prochain projet de loi de finances, à l'automne. Selon les acteurs de l'insertion, il faudrait quatre milliards d'euros par an pour tenir les promesses de France Travail. Dans un rapport commandé et remis à Olivier Dussopt, en avril, l'enveloppe proposée est beaucoup plus fine : 2,5 milliards d'euros, étalés sur trois ans.
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