Défense : cinq choses à savoir sur le "Suffren", le nouveau sous-marin à propulsion nucléaire de l'armée française
Le premier sous-marin nucléaire d'attaque (SNA) français de nouvelle génération est entré en service actif vendredi à Brest. Il doit permettre à la France de faire un réel bond dans le domaine de la lutte sous-marine.
Il entre en service actif. En présence du nouveau ministre des Armées, Sébastien Lecornu, le premier sous-marin nucléaire d'attaque (SNA) français de nouvelle génération, le Suffren, a été mis en service vendredi 3 juin à Brest. Franceinfo récapitule ce qu'il faut savoir de ce condensé technologique qui fait la fierté de la Marine française.
Je me rends auj à la base navale de Brest pour l'admission au service actif du 1er sous-marin nucléaire d'attaque de nouvelle génération, le Suffren.
— Sébastien Lecornu (@SebLecornu) June 3, 2022
C'est une étape importante dans l'ambition stratégique qu'a @EmmanuelMacron pour nos armées depuis 2017.https://t.co/xjuzshOi6V
1C'est le premier engin d'une série de six navires
Fabriqué à Cherbourg par l'industriel français Naval Group, le Suffren ouvre le bal d'une série de six sous-marins nucléaires d'attaque (SNA). Ils s'inscrivent dans le programme de la direction générale de l'armement baptisé Barracuda et estimé à 9,1 milliards d'euros. Le but : remplacer d'ici à 2030 les sous-marins français de type Rubis, en service depuis les années 1980.
La conception de ces nouveaux appareils a démarré en 1998 et leur réalisation en 2006. Un chantier complexe qui a accumulé près de trois ans de retard. La livraison est finalement intervenue en novembre 2020 à Toulon pour son déploiement de longue durée (DLD), une phase de tests grandeur nature visant à s'assurer du fonctionnement du bâtiment. Il a notamment réalisé une première traversée de longue durée à l'été 2021, jusqu'à l'Equateur, pour tester son fonctionnement en eaux chaudes et vérifier son endurance, rappelle BFM.
Cette première mise en service "devenait urgente" a expliqué jeudi sur franceinfo Vincent Groizeleau, rédacteur en chef du site Mer et marine. Elle symbolise le "renouvellement très attendu des forces sous-marines françaises", ajoute le spécialiste de l'actualité maritime.
2Un submersible plus grand, plus endurant et plus discret
Le submersible de 5 000 tonnes mesure 100 mètres de long, contre 76 mètres et 2 600 tonnes pour le Rubis. En pouvant plonger à 350 m de profondeur pendant 70 jours (contre 45 pour les Rubis), il est surtout bien plus endurant que le modèle précédent "et plus redoutable", expliquait l'amiral Christophe Prazuck, alors chef d'état-major de la Marine, lors de son inauguration en 2019.
Par rapport aux Rubis, le Suffren est aussi supposé être "dix fois plus silencieux", donc quasiment indétectable. Un responsable de Naval Group promettait en 2019 que ce mastodonte ferait "moins de bruit qu'un banc de crevettes". Une discrétion nécessaire pour remplir une mission délicate : le submersible devra protéger les bâtiments comme les porte-avions et sous-marins lanceurs d'engins (SNLE) porteurs des missiles nucléaires.
3Le premier sous-marin français avec des missiles de croisière
Le Suffren va disposer de missiles de croisière d'une portée de 1 000 km contre des cibles à terre, une première. "Donc en zone de sécurité, par exemple en plein milieu de la Méditerranée, le sous-marin pourra tirer des missiles de croisière très loin contre des cibles terrestres", selon Vincent Groizeleau. Le sous-marin pourra aussi déployer des forces spéciales via un hangar de pont amovible alors que "jusqu'ici il pouvait arriver que les nageurs de combat s'extraient des sous-marins via les tubes de torpilles", selon Libération.
Attention cependant à la confusion : le sous-marin nucléaire d'attaque (SNA), s'il fonctionne à l'aide de la propulsion nucléaire, "ne porte pas d'armes nucléaires comme les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins" qu'il est chargé de protéger, précise le journaliste spécialisé Vincent Groizeleau.
4Des femmes pourront y embarquer
Le sous-marin restait, jusqu'à récemment, le dernier bastion masculin au sein des Armées. Cette époque est révolue : le Suffren, qui permettra d'accueillir un équipage de 65 personnes, est le premier sous-marin d'attaque à offrir des logements spécifiques pour les sous-marinières.
Toujours du côté des nouveautés de conception, le Suffren abandonne le périscope. Ce long tube coulissant traversant la coque était considéré comme un possible point de vulnérabilité sur les vaisseaux classiques. Désormais, des caméras placées en haut d'un mât retransmettront les images sur des écrans.
5Il s'agit du modèle dont l'Australie n'a pas voulu
Ce qui s'annonçait comme un succès commercial a finalement donné lieur à une grave crise diplomatique entre la France et l'Australie. Douze exemplaires de ce sous-marin devaient être exportés en Australie, dans leur version conventionnelle, sans la propulsion nucléaire.
En septembre 2021, pourtant, la France apprend que le contrat passé en 2016 est rompu. Le groupe français Naval Group perd "le contrat du siècle", d'une valeur de 56 milliards d'euros. En cause, la signature d'un nouveau pacte baptisé Aukus, réunissant Canberra, Washington et Londres, au détriment de la France. "Un coup dans le dos", avait réagi à l'époque Jean-Yves Le Drian, ministre des Affaires étrangères, le 16 septembre 2021.
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