Réforme des retraites : ce que contiennent les amendements des députés de la majorité pour "améliorer" le texte du gouvernement
La réforme des retraites arrive à l'Assemblée nationale. L'examen en commission de ce texte hautement inflammable débute lundi 30 janvier, à la veille d'une nouvelle journée de mobilisation des oppositions syndicales et politiques. Quelque 7 000 amendements ont été déposés avant la date butoir, jeudi après-midi. Avec le risque que les députés ne puissent aller au bout du texte dans les délais impartis.
Ces milliers d'amendements ont été déposés pour une très large partie par les députés de la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale (Nupes). Mais la majorité veut elle aussi "améliorer" le texte, dixit le patron de Renaissance, Stéphane Séjourné. Les députés des groupes Renaissance, Horizons et Démocrate vont défendre en commission des ajustements nécessaires à leurs yeux, avant que le projet de loi ne soit débattu, cette fois dans l'hémicycle, à partir du lundi 6 février. Franceinfo s'est plongé dans les 178 amendements déposés par la majorité. Le fait qu'ils émanent de la coalition au pouvoir ne préjuge en rien de leur éventuelle adoption.
Vers un durcissement de l'"index seniors" pour les entreprises ?
Dans leurs propositions, les députés de la majorité sont nombreux à s'intéresser au sort de l'"index seniors", qui vise à inciter les entreprises à compter davantage sur les salariés en fin de carrière. Le dispositif présenté par le gouvernement ne concerne que les entreprises de plus de 300 salariés, et prévoit des sanctions dans le cas où elles ne publieraient pas l'index. Plusieurs députés veulent abaisser ce seuil à 50, voire à 10 salariés, pour concerner davantage d'entreprises, quand d'autres veulent renforcer les pénalités pour celles qui ne rendraient pas l'index public.
Sur le fond de la mesure, l'emploi des seniors, des parlementaires MoDem (groupe Démocrate) militent pour un système de "bonus-malus" afin d'"adapter le taux de cotisations des entreprises en fonction du nombre de salariés de plus de 55 ans dans leurs effectifs". Plusieurs de leurs collègues Renaissance souhaitent "supprimer la réduction de 1,8 point du taux de cotisations d'allocations familiales aux rémunérations comprises entre 2,5 et 3,5 smic pour les entreprises qui ne joueraient pas le jeu de l'emploi des seniors".
Plusieurs propositions en faveur des femmes
Le ministre chargé des Relations avec le Parlement, Franck Riester, a convenu lundi que les femmes seraient "un peu pénalisées" par le projet du gouvernement. Et ce n'est pas anodin si de nombreux amendements de la majorité défendent des mesures particulières pour corriger cela : ils consistent notamment à "permettre à celles ayant eu deux enfants et plus et ayant tous leurs trimestres de retraite avant l'âge légal de 64 ans de prendre leur retraite à partir de 62 ans", abaisser l'âge légal de départ à la retraite pour celles dont la carrière a été affectée par la grossesse et l'accouchement, ou encore "instaurer une surcote" pour les femmes "qui ont bénéficié de trimestres pour la naissance de leurs enfants et dépassent, par l'augmentation de l'âge légal, la durée d'assurance de 43 annuités de cotisation".
Des facilités proposées pour le rachat des trimestres d'études
Moins évoqué que celui des femmes, le cas des étudiants est abordé dans bon nombre d'amendements déposés pour l'examen en commission. Des députés Renaissance, MoDem et Horizons proposent par exemple d'"allonger les durées possibles pour la validation des durées de stage ainsi que le rachat des trimestres d'études" et de "faciliter le rachat de trimestres pour les doctorants et post-doctorants", signe d'une volonté de la majorité de séduire la jeunesse, dont une partie se mobilise contre la réforme.
Des droits ouverts pour les aidants et les bénévoles ?
Est-ce pour contrer les critiques formulées sur un texte très technique et comptable que la majorité veut s'emparer de la question de la vie associative ? Une soixantaine de députés Renaissance proposent l'organisation d'"Assises de la vie associative" pour garantir aux bénévoles "des droits supplémentaires dans le cadre du calcul de leur retraite".
Le député Horizons Yannick Favennec défend, lui, "une majoration de la durée d'assurance, à hauteur d'un trimestre pour dix années de fonctions assumées au sein du bureau d'une association, [qui] permettrait de valoriser concrètement l'investissement des responsables associatifs et pourrait favoriser leur renouvellement", ce que porte aussi son collègue Jérémie Patrier-Leitus.
Le sort des aidants figure également parmi les amendements déposés par la majorité. Des députés Renaissance veulent ainsi "assurer aux aidants la prise en compte dans la surcote de leur retraite de huit trimestres supplémentaires". Des parlementaires Horizons veulent quant à eux compléter la création prévue d'une assurance vieillesse dédiée aux aidants (AVA) en défendant pour cette catégorie "une majoration de durée d'assurance d'un trimestre par période de trente mois".
Des députés Renaissance veulent une accélération moins forte de la réforme Touraine
Le gouvernement veut reculer l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans, mais aussi accélérer la réforme Touraine, c'est-à-dire passer plus vite que prévu à 43 annuités de cotisation pour partir à taux plein. Quinze députés Renaissance souhaitent pourtant ralentir la cadence et "n'augmenter la durée de cotisation que d'un mois au lieu de trois pour les générations nées entre le 1er septembre 1961 et le 31 décembre 1963 afin de permettre une progressivité dans la mise en œuvre de la réforme".
Une "clause de revoyure" souhaitée pour 2027
Sur la forme, certains députés du groupe Démocrate veulent introduire dans le texte une "clause de revoyure", avec pour objectif d'assurer un suivi de la réforme dans les prochaines années. Ils souhaitent ainsi "dresser un bilan de cette réforme majeure" en 2027, afin d'envisager d'"éventuelles mesures d'adaptation nécessaires".
En lien avec leurs propositions pour les carrières et les pensions des femmes, la députée (Horizons) Félicie Gérard aimerait que le gouvernement remette au Parlement, avant septembre 2025, "un rapport analysant l'impact du report de l'âge légal de départ à la retraite sur l'évolution des pensions de retraite des femmes et du nombre de trimestres moyens cotisés par les femmes au moment de leur départ à la retraite".
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