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Législatives 2022 : l'union de la gauche peut devenir "la principale force d'opposition" à l'Assemblée, selon le directeur général délégué d'Ipsos

Pour Brice Teinturier, si la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) peut espérer remporter un nombre conséquent de sièges aux élections législatives, il lui sera toutefois difficile de décrocher la majorité et d'imposer une cohabitation à Emmanuel Macron.

Article rédigé par Alice Galopin - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, lors de la manifestation du 1er mai 2022 à Paris. (SAMUEL BOIVIN / NURPHOTO / AFP)

L'union est désormais scellée. Après plusieurs jours de négociations, La France insoumise, Europe Ecologie-Les Verts, le Parti communiste et le Parti socialiste mèneront ensemble la bataille des élections législatives, les 12 et 19 juin prochains. Pour évaluer le poids politique de cette Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), franceinfo a interrogé Brice Teinturier, directeur général délégué de l'institut de sondage Ipsos.

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Cette coalition est un "signal positif" envoyé à l'électorat de gauche, analyse le spécialiste, estimant qu'elle peut devenir la "principale force d'opposition" à l'Assemblée nationale. Il lui sera toutefois difficile, juge-t-il, de renverser la "logique des institutions" qui offre traditionnellement une majorité au président réélu.

Franceinfo : cet accord peut-il permettre à la gauche de s'imposer aux législatives comme la principale force d'opposition ?

Brice Teinturier : Oui, probablement. Même s'il y a encore beaucoup d'inconnues dans ce scrutin, comme le taux de participation ou le nombre de candidats dissidents. Mais le principal intérêt de cet accord, c'est qu'il permet en théorie d'obtenir davantage de députés, et probablement plus de députés que ce que peuvent espérer Les Républicains, mais aussi le Rassemblement national et Reconquête !, qui partent divisés pour ces élections. La logique serait donc que le bloc de gauche devienne la principale force d'opposition.

La Nupes peut-elle remporter la majorité à l'Assemblée nationale et imposer une cohabitation à Emmanuel Macron ?

Cela paraît moins probable. D'abord, parce que du point de vue de la mobilisation, on peut faire l'hypothèse qu'une partie de l'électorat de Jean-Luc Mélenchon, comme celui du Rassemblement national, composé de jeunes, d'employés ou d'ouvriers, se mobilisera moins pour ce scrutin que pour l'élection présidentielle. Donc ce bloc de gauche peut être pénalisé par rapport aux électeurs d'Emmanuel Macron, plus âgés, et qui se mobilisent davantage. Le deuxième élément qui peut fragiliser cette coalition, c'est la logique des institutions. 

"Les élections législatives ont tendance à confirmer le résultat de la présidentielle et à donner une majorité au président qui vient d'être réélu. Il est donc plus difficile pour l'opposition d'inverser cette tendance."

Brice Teinturier

à franceinfo

Enfin, comme on l'a observé lors de l'élection présidentielle, le rapport de force entre la gauche et la droite reste malgré tout plus orienté vers la droite et l'extrême droite que vers la gauche.

Les partis de gauche ont réussi à se mettre d'accord, mais cette dynamique peut-elle maintenant trouver un écho chez les électeurs de gauche et les convaincre ?

L'union de la gauche est un élément important, car ce qui n'a pas été fait pour la présidentielle est fait pour les législatives. C'est un signal positif qui est envoyé à un électorat de gauche qui commençait à désespérer d'être dans la défaite. Toutefois, même si l'effet de levier induit par cette coalition existe, il ne peut pas non plus inverser les rapports de force politique qui ont émergé à l'occasion de l'élection présidentielle et transformer la logique profonde d'élections législatives qui suivent une présidentielle.

"Cette coalition repose sur des clivages idéologiques qui restent profonds. Il y a des logiques d'unité, mais aussi de fortes différences."

Brice Teinturier

à franceinfo

Les électeurs qui jusqu'au bout ont voté pour le candidat écologiste Yannick Jadot à la présidentielle, par exemple, n'iront peut-être pas tous se fondre dans une candidature de La France insoumise. Ceux-là pourront probablement se tourner plutôt vers un candidat du parti présidentiel ou préféreront ne pas se déplacer au bureau de vote. Même chose pour les électeurs socialistes. L'électorat profondément social-démocrate et pro-européen va avoir un peu de mal à se retrouver dans un candidat LFI.

Enfin, Jean-Luc Mélenchon a certes intérêt à personnaliser cette élection et à demander qu'on vote pour qu'il devienne Premier ministre, mais cet argument a aussi son revers : une telle perspective est, pour de nombreux électeurs, effrayante et peut mobiliser contre lui.  

Parmi les membres de la Nupes, qui ressort pour l'instant gagnant de cette union ?

C'est incontestablement La France insoumise. Cette union traduit le nouveau rapport de force instauré par la présidentielle, marqué par une domination des "insoumis" au sein de l'espace des gauches et par un déclin extrêmement fort du Parti socialiste. 

L'union de la gauche peut-elle tenir au-delà des élections législatives, compte tenu des divergences idéologiques entre les différents partis ? 

Je ne crois pas qu'elle puisse tenir. L'hypothèse la plus probable est que le Parti socialiste se différenciera assez rapidement de la coalition après les élections législatives, et qu'il ne sera pas aligné avec La France insoumise sur tous les sujets. Il y aura donc probablement plusieurs blocs de gauche à l'Assemblée, qui ne voteront pas toujours de la même façon. Il faudra alors expliquer aux électeurs pourquoi s'être coalisé avec les "insoumis" pour finalement s'en détacher sur les sujets majeurs.

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