Reportage À Villers-Cotterêts, ville de l'Aisne dirigée par le RN, le constat dressé par les habitants est mitigé

Franceinfo est allé rencontrer des habitants de cette commune administrée par le Rassemblement national depuis dix ans. Plusieurs déplorent un manque de sécurité et l'absence de perspectives pour la jeunesse, d'autres décrivent une ville où "tout se passe bien" .
Article rédigé par Agathe Mahuet
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
La Poste de Villers-Cotterêts (Aisne), le 17 mars 2017. (CHRISTIAN LANTENOIS L'UNION/L'ARDENNAIS / MAXPPP)

Cette nouvelle progression du Rassemblement national peut-elle mener à un gouvernement d’extrême droite début juillet ? Et si c’est le cas, que signifie le fait d’être dirigé par le RN ? Pour en avoir une idée, franceinfo est allé dans l’Aisne pour interroger quelques-uns des 10 000 habitants de Villers-Cotterêts, une ville gérée par un maire RN depuis dix ans.

Ici, les électeurs ont voté à 43% pour la liste de Jordan Bardella aux européennes, même si très peu osent le dire. À Villers-Cotterêts, les opposants au RN s’expriment plus facilement. "Le climat, c'est de la drogue partout, on ne peut pas circuler à pied parce qu'on se fait agresser", déplore une habitante. La sécurité, priorité du RN ? "Absolument pas", répond-elle. 

"Si vous voulez avoir du shit, il y a tous les plans que vous voulez à Villers-Cotterêts !"

Une habitante opposée au RN

à franceinfo

Pierre, trentenaire, estime, lui, que la mairie ne fait rien pour sa jeunesse. "Regardez autour de vous, il n'y a rien, pas d'enfant qui fait du vélo, pas de véritable piste cyclable, pas de square où on peut faire du skate… Tous les jeunes quittent Villers et on les comprend." Et Tareq, 23 ans, le confirme. "J’habite ici depuis que je suis né. Je n’ai jamais trouvé de travail ici."

Le taux de chômage y est dix points au-dessus de la moyenne nationale, alors comme beaucoup, Tareq travaille à 50 km de là, à l’aéroport de Roissy. Fils d’immigré, il ne pense pas rester vivre ici. "On sent que l’atmosphère de la ville a changé, j'ai l'impression que les gens nous regardent mal. En soi je suis français moi, je n’ai rien à me reprocher, je me suis adapté au pays. Au bout d'un moment j’essaie de ne pas me sentir visé mais quand même, je me sens visé, alors que je paye des impôts comme tout le monde."

Les caisses de la ville sont pleines

Les impôts, justement, n’ont pas baissé et les caisses de la commune sont pleines : 11 millions d’euros l’an dernier, mais seulement 1,5 million d'euros réinvestis, alors que des chantiers de rénovation patientent. Le cinéma n’a plus de chauffage depuis trois ans, dénonce la principale opposante au maire. "C’est simplement qu’on ne fait rien de tape-à-l’œil", répond ce dernier, Franck Briffaut, réélu avec 53% des voix il y a quatre ans.

Un maire RN accessible, se félicite Jean-Alain, récemment installé ici après 37 ans à Meaux, la ville administrée par Jean-François Copé. "Quand on a posé la question, il a dit : 'Je vais faire le nécessaire, pas de problème', alors qu’à Meaux, on nous a répondu : 'Voyez avec mon adjoint'." Jean-Alain l’assure, il fait bon vivre à Villers-Cotterêts.

"La preuve, c'est qu'ici vous avez toutes couleurs raciales et tout se passe bien, ils nous disent bonjour."

Jean-Alain, habitant de Villers-Cotterêts

à franceinfo

Il insiste, ce n’est pas pour rien si le parti a changé de nom. "Front national, c’était faire le front, le Rassemblement national c’est l’idée de rassembler." Mais Micheline, son épouse, n’est pas d’accord. "Je ne suis pas pour le RN, pas obligée de penser la même chose ! La femme a le droit de s’exprimer, et ce n'est pas parce qu'elle aime son mari qu'elle va forcément voter comme lui. Moi je ne veux pas de dictature chez moi ! Ce sont des hypocrites, c'est du blabla tout ça et si jamais ils passent, il y en a qui vont pleurer. Et je suis pour l’Europe. Mais on s’entend bien quand même", ajoute Micheline. "On s’est mariés pour le meilleur et pour le pire !", sourit Jean-Alain.

À Villers-Cotterêts, ville de l'Aisne dirigée par le RN, le constat dressé par les habitants est mitigé. Un reportage d'Agathe Mahuet.

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