Résultats des législatives 2022 : quels sont les scores des candidats condamnés ou mis en cause par la justice ?
Les ennuis judiciaires des prétendants à l'Assemblée peuvent représenter un obstacle pour se hisser au second tour des élections législatives. Mais pas pour tous : de nombreux candidats obtiennent suffisamment de voix pour y parvenir.
Qualifiés malgré des ennuis judiciaires. Alors que la campagne électorale des élections législatives a fait ressortir des tiroirs les démêlés avec la justice des candidats, certains ont obtenu suffisamment de suffrages au premier tour, dimanche 12 juin, pour se hisser au second. D'autres ont, au contraire, été boudés dans les urnes. Franceinfo résume leurs résultats selon leur formation politique.
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Ensemble !
Elle fait l'objet d'une enquête ouverte pour "abus de confiance" par le parquet de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), à la suite d'un prêt non remboursé à sa collaboratrice parlementaire : Sandrine Josso a été désignée candidate de la coalition de la majorité présidentielle Ensemble ! malgré une levée de boucliers des militants. Elle réussit tout de même à se qualifier pour le second tour dans la 7e circonscription de Loire-Atlantique, avec 22,48% des voix, derrière Véronique Mahé, sa rivale de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), qui obtient 24,26% des suffrages.
C'est sur les réseaux sociaux qu'Yves Blein, député sortant de la 14e circonscription du Rhône, a suscité l'ire des internautes lorsqu'il a annoncé son investiture par Ensemble !. Car il est l'objet d'une plainte pour harcèlement sexuel déposée en novembre 2021. "Pour moi, cette affaire est restée sans suites. Je n'ai pas été sollicité par les autorités à ce sujet", avait-il affirmé au Progrès le 16 mai. Il semble avoir convaincu les électeurs puisqu'il arrive en seconde position avec 25,47% des bulletins. Il se retrouve ainsi, au second tour, face à Idir Boumertit (35,76%), le candidat de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) qui a remplacé Taha Bouhafs, en retrait après des accusations d'agressions sexuelles.
En revanche, Sira Sylla, la députée sortante de la 4e circonscription de Seine-Maritime, qui se représentait sous les couleurs de la majorité présidentielle, est battue. Elle n'obtient que 17,99% des voix et arrive en quatrième position. Accusée de faits de harcèlement moral par l'un de ses assistants parlementaires, elle attend le jugement le 6 septembre, après le passage de l'affaire devant le conseil des prud'hommes de Rouen.
Depuis l'été 2020, la députée de Paris Laetitia Avia est visée par une enquête pour "harcèlement moral", après des plaintes d'anciens collaborateurs évoquant des humiliations répétées et des propos sexistes, racistes ou homophobes. Cela semble avoir eu peu d'effets sur les électeurs qui lui ont accordé 27,94% des voix dans la 8e circonscription de Paris. Laetitia Avia est néanmoins loin derrière la candidate de la Nupes, Eva Sas (41,70%), mais elle parvient à se qualifier pour le second tour.
Nouvelle Union populaire écologique et sociale
Visé par une enquête préliminaire pour "détournement de fonds publics" et "recel", l'ancien candidat du Parti communiste français (PCF) à la présidentielle Fabien Roussel arrive en tête du premier tour des législatives dans la 20e circonscription du Nord, avec 34,13% des suffrages. Le député sortant affrontera le candidat du Rassemblement national, Guillaume Florquin, qui recueille 32,64% des voix, dimanche 19 juin.
Les Républicains
Député dans la 1re circonscription du Territoire de Belfort, Ian Boucard se présentait à nouveau malgré sa condamnation "à une peine de 7 500 euros d’amende pour avoir fabriqué et diffusé de faux tracts dans le cadre de la campagne pour les élections législatives de 2017". Il réussit son pari : le député sortant sort du premier tour en tête, avec 27,26% des voix. Néanmoins, il n'en a pas fini avec la justice : le parquet, qui avait requis trois ans d'inéligibilité, a fait appel. Le procès en appel a été reporté deux fois mais devrait avoir lieu en septembre.
Il briguait un nouveau mandat dans la 5e circonscription du Vaucluse malgré une condamnation pour le licenciement d'une collaboratrice : le député sortant Julien Aubert est éliminé dès le premier tour. Il arrive en quatrième position et ne récolte que 17,17% des bulletins exprimés.
Reconquête !
En revanche, du côté du parti d'extrême droite Reconquête !, aucun des candidats qui a maille à partir avec la justice n'atteint le second tour. Eric Zemmour, qui préside le parti, est arrivé troisième dans la 4e circonscription du Var, avec 23,19% des suffrages exprimés derrière la député sortante Ensemble ! Sereine Mauborgne (28,51%) et le RN Philippe Lottiaux (24,74%).
De son côté, Jérémie Piano n'arrive qu'en cinquième position dans sa circonscription, avec 7,11% des voix. Le militant de Génération identitaire, qui se présentait dans la 11e circonscription des Bouches-du-Rhône, a un casier judiciaire chargé. En mai 2020, il a été condamné à une amende pour avoir inscrit "Immigration. Racaille. Islamisation ? Reconquête", sur plusieurs panneaux à Aix-en-Provence. L'année suivante, il a été reconnu coupable "d'incitation à la haine raciale et à la discrimination" à deux reprises. Et il comparaîtra en novembre avec 17 anciens membres de Génération identitaire pour "violences volontaires en réunion", après l'invasion musclée des locaux de l'ONG SOS Méditerranée à Marseille, en octobre 2018.
Mis en examen pour diffamation publique après une plainte du footballeur Karim Benzema liée à deux tweets de 2020, Damien Rieu ne fait pas mieux dans la 4e circonscription des Alpes-Maritimes. Il se hisse en cinquième position avec 10,66% des bulletins exprimés. Il est éclipsé par la candidate du Rassemblement national, qui arrive en tête dans cette circonscription. Trois jours avant le premier tour, il s'était mis en scène en se filmant en train de franchir la frontière franco-italienne pour dénoncer l'immigration clandestine.
Rassemblement national
L'affaire l'opposait à la fille de l'ancien maire d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), Eugène Binaisse. Le député Rassemblement national (RN) Bruno Bilde avait écrit, en 2016, dans le magazine municipal, que Florence Binaisse avait été embauchée dans une mairie voisine. Les juges ont considéré que c'était faux et diffamatoire en première instance, puis en appel. Sa condamnation est donc devenue définitive en 2019, lorsque son pourvoi en cassation a été rejeté. Les électeurs de la 12e circonscription du Pas-de-Calais ne lui en ont visiblement pas tenu rigueur puisque le député sortant Bruno Bilde est arrivé en tête du premier tour avec 41,82% des voix.
Dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais, Marine Le Pen réussit le même tour de force et glane 53,96% des suffrages exprimés. L'ancienne présidente du RN et candidate à la présidentielle a été condamnée en 2014 à verser 1 500 euros de dommages et intérêts à Georges Tron et à l'AFP, alors qu'elle les poursuivait en diffamation. Par ailleurs elle est toujours mise en examen pour "détournements de fonds publics" dans le cadre de l'affaire des assistants parlementaires du Front national. Tout comme Wallerand de Saint-Just, candidat dans la 10e circonscription de Paris. Mais lui n'obtient que 5,51% des voix et ne sera donc pas présent au second tour.
Les dissidents de la majorité présidentielle
En raison de leurs déboires judiciaires, tous n’ont pas eu le précieux sésame pour se présenter sous la bannière d’Ensemble ! Qu’importe pour certains, qui ont décidé d’entrer en dissidence. C’est le cas de Stéphane Trompille : le député sortant LREM de la 4e circonscription de l’Ain n’a pas obtenu l’investiture de son parti. Il fait vraisemblablement les frais de sa condamnation en 2020 pour harcèlement sexuel d’une ancienne collaboratrice, une décision dont il a fait appel. Sa stratégie ne s’est pas concrétisée dans les urnes puisqu'il ne glane que 9,40% des voix, loin derrière les candidats du Rassemblement national et de la Nupes.
Député sortant de la 5e circonscription de Gironde, Benoît Simian, jugé le 24 mars pour des faits de harcèlement contre son ex-femme, ne fait pas mieux. Il s’est présenté sous les couleurs de Libertés et Territoires face à une candidate investie par la majorité présidentielle. Côté justice, Benoît Simian sera fixé sur son sort le 23 juin, jour où le délibéré devrait être rendu. Le ministère public a requis à son encontre une peine de dix-huit mois d’emprisonnement assortie d’un sursis probatoire de trois ans et de trois ans d’inéligibilité. Il est sèchement battu et ne recueille que 3,68% des suffrages exprimés.
Députée sortante de la 9e circonscription de Seine-Maritime, Stéphanie Kerbarh subit le même revers : elle n’obtient que 3,35% des voix. Elle avait été exclue de LREM après les régionales de 2021 en raison d'une condamnation en décembre 2019 pour licenciement abusif de son collaborateur parlementaire.
Nathalie Elimas se fait elle aussi recaler dès le premier tour. Députée MoDem de la 6e circonscription du Val-d'Oise, secrétaire d'Etat chargée de l'Éducation prioritaire sous le gouvernement de Jean Castex, elle est visée depuis mars par une enquête du parquet de Paris pour "harcèlement moral et de maltraitance" sur cinq ex-collaborateurs. Nathalie Elimas nie les faits et a porté plainte pour "dénonciation calomnieuse". L'ouverture de cette enquête a coûté à la députée son investiture pour une nouvelle campagne, car la majorité a choisi d’investir Estelle Folest dans sa circonscription d'élection. Cette dernière s'est qualifiée pour le second tour tandis que Nathalie Elimas ne réunit que 8,62% des bulletins.
Le sans-étiquette
Germain Gaiffe, candidat au parcours pour le moins atypique, termine bon dernier dans la 2e circonscription du Vaucluse. Condamné à trente ans de réclusion criminelle pour meurtre, le "dépeceur de Montauban" ne recueille que 0,14% des voix (soit 59 bulletins glissés dans l'urne) et voit, après vingt-quatre ans passés derrière les barreaux, son rêve d'être élu député s'éloigner.
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