"S'il n'y a pas de nom, le NFP est mort" : après le retrait de Laurence Tubiana pour Matignon, les négociations se tendent encore à gauche

Le Nouveau Front populaire n'est toujours pas parvenu à se mettre d'accord sur un candidat au poste de Premier ministre. En coulisses, l'alliance de gauche est dans l'impasse pour trouver un nom.
Article rédigé par Victoria Koussa - édité par Robin Schmidt
Radio France
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L'alliance de gauche, arrivée en tête lors des élections législatives anticipées, ne parvient pas à s'accorder en interne sur un nom à proposer pour Matignon. (AMAURY CORNU / HANS LUCAS)

Le temps passe et toujours rien. Le Nouveau Front populaire phosphore encore pour tenter de s'accorder sur un nom à imposer à Emmanuel Macron pour Matignon, au point de cumuler deux abandons de postes en un peu plus d'une semaine. La communiste Huguette Bello, présidente du conseil régional de La Réunion, puis l'économiste Laurence Tubiana ont toutes deux jeté l'éponge, faute de consensus. A gauche, tout le monde est à bout, comme a pu le constater franceinfo dans les coulisses des négociations.

L'alliance de gauche tourne en rond

"Je n'ai plus les mots", confie un socialiste après l'abandon de Laurence Tubiana. L'économiste, poussée par le Parti socialiste, est rejetée par les Insoumis car considérée comme trop "Macron compatible". Et même si les quatre partis continuent de discuter pour accoucher d'un nom consensuel, l'impatience submerge certaines figures du Nouveau Front populaire. Elles hésitent même à revenir à la table des négociations.

"On tourne en rond", s'agace un communiste. Un écologiste n'y voit même plus l'utilité : "Pas question d'y aller pour rien, on ne va pas passer l'été à rechercher un Premier ministre". Cela fait presque deux semaines déjà que l'alliance de gauche a promis de fournir un nom pour Matignon, en vain. "On n'arrive pas à débloquer la situation", confie un participant aux négociations. 

"On peut avoir un programme commun, mais tout n'est pas réglé. Ce sont des questions de stratégies et d'équilibre à l'intérieur de la gauche."

Un participant aux négociations

à franceinfo

Au coeur des tensions : le bras de fer interne au Nouveau Front populaire entre la France insoumise et les socialistes. Un cadre du PS parle d'"une guerre de position", alors que les socialistes reprennent du terrain à gauche après avoir doublé leur nombre de sièges à l'Assemblée nationale. Mais les Insoumis continuent de rappeler leur poids, avec notamment le score de 22% réalisé par Jean-Luc Mélenchon au premier tour de la dernière élection présidentielle. "Ils refusent de considérer qu'ils n'ont plus la main, grince un socialiste de premier plan. Le temps de La France insoumise 2022 est passé." 

Les deux forces de gauche se tiennent tête. Et quand le Parti socialiste fixe un ultimatum pour tenter de tomber d'accord, des piliers de la France insoumise estiment avoir le temps et repoussent même ce choix à la rentrée. "LFI et le PS veulent aboutir, mais selon leurs conditions", glisse une écologiste de poids. 

Mais ces tensions, et l'enlisement général du Nouveau Front populaire dans les négociations, ternissent la crédibilité de la gauche toute entière. "Faut qu'on tranche, on devient ridicule", se désole un socialiste de poids. "S'il n'y a pas de nom, le NFP est mort. Il faut reprendre la main, qu'avant les Jeux olympiques on ait notre nom." L'enjeu, c'est de prouver que l'alliance peut s'accorder dans l'urgence, en prévision de l'élection présidentielle de 2027. 

"Croire qu'on peut gagner en 2027 en foirant 2024, c'est n'importe quoi."

Une écologiste de poids

à franceinfo

Mais à l'heure actuelle, après les désistements de Huguette Bello et de Laurence Tubiana faute de consensus, trois noms restent dans la balance. Deux profils plus politiques, Cécile Duflot et Benoît Hamon, ont été proposés. Les deux personnalités sont passées du côté de la société civile, à la tête respectivement des ONG Oxfam et Singa. Une troisième hypothèse commence à faire son chemin : celle d'André Chassaigne, le patron des communistes à l'Assemblée.

L'hypothèse Chassaigne

"Il a la légitimité", pose un participant aux négociations. "Personne ne peut le suspecter de vouloir candidater à la présidentielle, son sens du compromis est reconnu et personne ne peut l'accuser de ne pas être un homme d'Etat." D'autant que certains membres de l'alliance de gauche réclament un vote pour nommer leur candidat à Matignon, et qu'André Chassaigne a obtenu tous les suffrages du Nouveau Front populaire pour l'élection au perchoir de l'Assemblée.

"Pour le moment, les noms sur la table ne sont pas discutés", clarifie un participant aux négociations. Mais les noms circulent, une façon de montrer que la machine du NFP tourne encore et de maintenir une once d'espoir chez les électeurs de gauche. 

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