Ce que l'on sait de l'agression du petit-neveu de Brigitte Macron, Jean-Baptiste Trogneux, après l'interview du chef de l'Etat
C'est une affaire qui suscite l'indignation d'une grande partie de la classe politique. Un petit-neveu de Brigitte Macron a été attaqué à Amiens, lundi, après l'interview du chef de l'Etat sur TF1. Agé de 29 ans, Jean-Baptiste Trogneux a été frappé au sol par plusieurs personnes devant la chocolaterie Jean Trogneux, institution réputée de la cité picarde dont il est le directeur général. Huit personnes ont été rapidement interpellées. Le procès de trois hommes, cités en comparution immédiate mercredi 17 mai, a été renvoyé au lundi 5 juin. Franceinfo revient sur ce que l'on sait de cette agression.
Les faits : un passage à tabac pendant une "casserolade"
L'agression est survenue lors d'un rassemblement d'opposants à la réforme des retraites, lundi vers 22 heures, devant la boutique du centre-ville d'Amiens. "Une quarantaine de manifestants étaient là, après l'allocution du président sur TF1", raconte le père de Jean-Baptiste, Jean-Alexandre Trogneux, interrogé par France Bleu Picardie. Certains ont voulu entasser des poubelles et ont commencé à "tambouriner sur les portes et sur les vitres", a-t-il précisé à l'AFP. C'est alors qu'ils ont reconnu le jeune homme qui, habitant au-dessus du magasin, rentrait à son domicile.
"Une dizaine de personnes se sont approchées de lui, ont commencé à l'insulter", selon le père de la victime, absent au moment des faits. "Et puis un, plus énervé que les autres, lui a mis un poing dans la figure, suivi de plusieurs derrière. Et il y a eu un déchaînement."
"Il y en a une dizaine qui se sont jetés sur lui."
Jean-Alexandre Trogneux, père de la victimeà France Bleu Picardie
Jean-Alexandre Trogneux, lui-même président de l'entreprise familiale, affirme que son fils s'est recroquevillé à terre pour se protéger des coups, jusqu'à ce que des voisins arrivent. "C'est peut-être grâce à eux qu'on a évité la catastrophe", a-t-il estimé auprès de France 3. Les agresseurs ont tous pris la fuite. Cité par l'AFP, il souligne que les agresseurs ont aussi injurié "le président, son épouse et notre famille".
Rentré chez lui mardi en fin d'après-midi après un passage par l'hôpital, Jean-Baptiste Trogneux souffre d'"une ou deux côtes cassées" et de "trois doigts foulés", selon son père. "Au scanner cérébral, il y a un hématome, dont on espère que ça restera bénin", ajoute-t-il. Invitée de franceinfo mardi soir, la maire UDI d'Amiens, Brigitte Fouré, a pu échanger avec le jeune homme par SMS. Selon elle, il est "choqué, mais il m'a dit qu'il allait se remettre". Jean-Baptiste Trogneux qui s'est vu délivrer 4 jours d'ITT.
L'enquête : un procès le 5 juin
Peu après les faits, huit personnes ont été interpellées, lundi soir, a appris franceinfo de source policière. Selon la maire d'Amiens, les caméras de vidéosurveillance de la ville ont permis de "repérer les agresseurs" et de les arrêter. Son adjoint à la sécurité, Hubert de Jenlis, précise à l'AFP que la chocolaterie fait l'objet d'une surveillance policière à chaque manifestation et d'une vidéosurveillance désormais "transférée à la police nationale".
Les suspects sont une adolescente de 16 ans et sept hommes plus âgés (jusqu'à 35 ans), dont certains sont déjà connus des services de police, d'après une source proche du dossier. Quatre personnes ont été laissées libres. Trois autres, cités mercredi en comparution immédiate, seront jugés à partir du 5 juin, à la demande de leurs avocats. Les trois hommes, âgés de 20, 23 et 35 ans, sont tous connus de la justice pour violences ou dégradation. L’un de ces prévenus est sous curatelle et un autre travailleur handicapé. Le président du tribunal a ordonné leur placement en détention provisoire.
L'adolescente de 16 ans doit être présentée à un juge des enfants, selon une source policière contactée par France Télévisions. Le parquet d'Amiens n'a fait aucune communication sur l'affaire à ce stade.
Trois des suspects ressortis libres ont affirmé, mercredi, à RMC, qu'ils avaient été arrêtés après avoir seulement "défendu" une personne "poussée" par Jean-Baptiste Trogneux sur une poubelle disposée devant la chocolaterie. "Le neveu de Brigitte Macron a bousculé notre camarade, on est venus pour séparer et, quand on est repartis, une voiture de la BAC est venue", avancent ces jeunes, minimisant les violences subies par la victime.
Le contexte : une chocolaterie régulièrement visée
Selon Jean-Alexandre Trogneux, l'agression de son fils constitue le "point d'orgue" d'une série "d'amalgames", d'insultes et de menaces visant la chocolaterie. Située sur une rue piétonne au cœur d'Amiens, avec une façade à l'ancienne qui promeut une maison vieille de "six générations", la boutique Trogneux est régulièrement visée par des opposants depuis l'élection d'Emmanuel Macron en 2017. "Depuis six ans, on doit en supporter toutes les conséquences", déplore Jean-Alexandre Trogneux auprès de France 3. "On a eu dans un premier temps des boycotts de clients parce que ça 'allait dans la poche de Macron', ce qui est faux. L'entreprise appartient à 100% à mon fils et, avant, c'était à moi et personne d'autre", martèle-t-il. D'après le registre national des entreprises, le capital de la société est détenu à 57,37% par le père de la victime et à 41,95% par son grand-père, Jean-Claude Trogneux.
Durant les manifestations des 'gilets jaunes', ce neveu de Brigitte Macron avait déjà dénoncé des insultes et des menaces. "On a reçu une crotte de chien, des papiers avec marqué : 'Boom', des insultes plus poussées, des menaces de mort", égrène-t-il aujourd'hui au micro de France 3. En avril, durant la nuit de la promulgation de la réforme des retraites, la boutique lilloise de la chocolaterie Trogneux a été visée par trois jets de projectiles, qui ont fissuré les vitrines, selon France Bleu Nord.
Les réactions : la classe politique outrée par la "bêtise"
A son arrivée à un sommet européen en Islande, Emmanuel Macron a dénoncé "la brutalité, la violence, la bêtise" à laquelle a été confrontée "ce jeune papa". "Il a été agressé parce que c'est notre petit-neveu", a-t-il estimé, en précisant l'avoir appelé, lundi soir, avec son épouse. En "rapport constant" avec son petit-neveu depuis les faits, Brigitte Macron a, dans une déclaration transmise à l'AFP, déploré "la lâcheté, la bêtise et la violence" des agresseurs.
"En tant qu'oncle, je considère ces actions comme absolument inacceptables et, en tant que président de la République, inqualifiables."
Emmanuel Macron, président de la Républiqueà la presse, depuis Reykjavik (Islande)
Des élus de tous bords ont apporté leur soutien à Jean-Baptiste Trogneux, à commencer par les députés locaux. "Nous parlons là de quelqu'un qui fabrique du chocolat, qui n'a jamais été intégré dans le débat politique, qui n'a jamais voulu s'engager en politique et qui, tout simplement, est de la même famille qu'un membre de la famille du président de la République", a souligné la députée apparentée Renaissance de cette circonscription de la Somme, Barbara Pompili. "On ne défend pas la démocratie en s'attaquant à un chocolatier", a réagi le député insoumis de la Somme, François Ruffin. "J'achète d'ailleurs régulièrement leurs macarons, comme un clin d'œil, lorsque j'offre des cadeaux à mes invités politiques", a-t-il glissé.
Au sein de la Nupes, Jean-Luc Mélenchon a, lui, réagi de manière plus calculée : "Des commentateurs indifférents aux tentatives de meurtres et agressions racistes contre des insoumis me somment de me prononcer sur l'agression à Amiens contre le chocolatier Trogneux. Je lui exprime ma compassion et je joins ma protestation à la sienne. Je demande à Macron et Madame d'en faire autant pour nos amis agressés ou menacés sans réserver leur sollicitude au seul Zemmour quand il fut molesté", a-t-il asséné sur Twitter. Celui qui était alors éditorialiste avait lui-même raconté avoir reçu un coup de fil présidentiel en 2020 après une agression subie dans une rue de Paris.
A droite, le président du parti Les Républicains, Eric Ciotti, a dénoncé "une agression insupportable" et appelé à une sanction "implacable pour ces agresseurs". "Evidemment qu'une ligne rouge est franchie", a abondé, sur franceinfo, la porte-parole du groupe Rassemblement national à l'Assemblée, Laure Lavalette. "Aucun combat ne justifiera jamais une telle sauvagerie", a-t-elle martelé, réclamant une "fermeté exemplaire".
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