Opération "Mayotte place nette" : sur place, les habitants restent sceptiques "en attendant que ça puisse se concrétiser"

Après le lancement d'une nouvelle opération de lutte contre l'insécurité, mardi à Mayotte, les habitants se disent sur la réserve faute de résultats.
Article rédigé par Boris Loumagne - édité par franceinfo
Radio France
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Le camp de Kavani, le 20 février 2024 à Mayotte. (OPHELIE VINOT / HANS LUCAS)

Une nouvelle opération a été lancée, mardi 16 avril, à Mayotte pour lutter contre l'insécurité, l'immigration illégale et l'habitat insalubre. Un an après l'opération Wambushu qui avait connu un succès relatif, cette nouvelle intervention baptisée "place nette" doit durer trois mois. Parmi les objectifs : la destruction de 1 300 bangas, l'arrestation d'une soixantaine de chefs de gangs et un contrôle renforcé des frontières. Cette nouvelle opération était réclamée, depuis des semaines, par des collectifs d'habitants du 101e département français.

Mais il y a un an l'opération Wambushu a déçu à Mayotte. Le lancement de cette nouvelle intervention est donc pris avec prudence par les collectifs citoyens de lutte contre l'insécurité et l'immigration irrégulière, interrogés par franceinfo.

Abdou Badirou est le porte-parole des Forces vives de Mayotte : "Les premières déclarations, je les ai entendues, je le prends avec un tout petit peu de réserve en attendant que ça puisse se concrétiser." Avec son collectif, ils demandent depuis des mois un contrôle renforcé des frontières. Le gouvernement leur répond avec l'annonce du renforcement des patrouilles maritimes et aériennes : "On attend avec fermeté que la frontière de l'île soit surveillée et protégée, donc le placement de bateaux qui pourraient limiter l'arrivée massive des immigrés à Mayotte. Je pense que ce serait une bonne nouvelle pour Mayotte."

"Une présence régulière des forces de l'ordre"

Autre bonne nouvelle, selon Abdou Badirou : l'opération "place nette" entend s'attaquer aux gangs responsables en grande partie de l'insécurité chronique à Mayotte : "C'est tous les matins que les bus qui ramènent les élèves dans leur établissement scolaire sont caillassés, vitres cassées, chauffeurs menacés... Même ce matin !"

Ces derniers jours, le gestionnaire du transport scolaire a évoqué un record du nombre de caillassage de bus dans certaines zones de l'île : "Donc oui, il y a des endroits stratégiques que nous avons évoqués avec les membres du gouvernement, ils le savent. Il va falloir qu'il y ait une présence régulière des forces de l'ordre pour que ces endroits soient enfin libérés pour les Mahorais, parce que ces endroits sont restés des endroits de non-droit."

Cette opération "place nette" entend aussi s'attaquer aux habitats insalubres, les bangas. Près de 1 300 cases doivent être détruites mais ce volet de l'intervention est loin de faire l'unanimité. "Où vont être relogées les personnes expulsées ?", se demandent les associations d'aide aux populations précaires.

Récemment, le camp de Kavani a été démantelé, où 700 migrants vivaient. "Il y a trois semaines, le préfet a décidé le démantèlement de ce camp. 350 personnes sont à la rue, sur les trottoirs avoisinant le stade, sans eau, sans possibilité de faire une toilette quotidienne, raconte Daniel Gros, référent de la Ligue des Droits de l'Homme à Mayotte. Donc ces gens ont été mis à la rue parce qu'il n'y a pas d'hébergement d'urgence. Tout est occupé, saturé, il n'y a pas de logement à Mayotte." Face à cette crise, le gouvernement va débloquer une enveloppe de cinq millions d'euros pour l'hébergement d'urgence. Mais la construction de ces nouveaux logements prendra des mois, voire des années.

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