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Sommet sur le climat : quels sont les engagements des grands pays émetteurs, cinq ans après l'Accord de Paris ?

Les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre affichent des ambitions toujours plus grandes, mais pas toujours suffisantes, face à l'urgence climatique.

Article rédigé par franceinfo
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Le président Joe Biden signe des engagements pour lutter contre le changement climatique, le 27 janvier 2021, à la Maison Blanche (Washington, Etats-Unis). (MANDEL NGAN / AFP)

En 2015, près de 200 pays se sont engagés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Cinq ans après la signature de l'Accord de Paris, l'ONU dénonce des promesses toujours pas à la hauteur de l'urgence climatique. "Munis de la preuve accablante que, si nous n'agissons pas, nous allons détruire notre planète, nous savons qu'il est temps de prendre des mesures décisives et efficaces", défend dans Le Monde le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. Le président américain Joe Biden réunit, jeudi 22 avril, un sommet virtuel mondial sur le climat, avec l'annonce d'un objectif "ambitieux" par Washington.

>> DIRECT. Climat : les Etats-Unis réunissent 40 dirigeants lors d'un sommet virtuel mondial

Avant cet événement, où en sont les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre ? Franceinfo revient sur leurs engagements.

La Chine promet la neutralité carbone d'ici à 2060

La Chine est loin devant dans le classement des principaux émetteurs et sa courbe est ascendante, selon le Rapport 2020 sur l'écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions publié par le Programme des Nations unies pour l'environnement. En 2016, le pays s'était engagé à réduire son intensité carbone (émissions de CO2 rapportées au PIB) de 60 à 65% d'ici à 2030 et à atteindre son pic d'émissions "autour de 2030".

Alors que le pays est sur la trajectoire pour atteindre ce pic avant 2030, le président chinois Xi Jinping a créé la surprise en annonçant en 2020 un objectif de neutralité carbone d'ici à 2060. "La Chine fera ce qu'elle dit et ce qu'elle fera atteindra ses objectifs", s'est encore engagé il y a quelques jours le président chinois.

Le plan quinquennal présenté début mars ne précise guère comment Pékin compte y parvenir, d'autant que le pays doit accroître ses investissements dans les centrales à charbon. Et la Chine n'a pas déposé de révision de ses "contributions déterminées au niveau national" (NDC), document demandé par l'Accord de Paris. Le groupe d'experts Climate Action Tracker (CAT) juge toujours les engagements chinois (lien en anglais) "très insuffisants".

Les Etats-Unis en attente d'un objectif "ambitieux"

Deuxième émetteur mondial, les Etats-Unis s'étaient engagés à réduire leurs émissions de 26 à 28% d'ici à 2025, par rapport à 2005. L'objectif, largement insuffisant selon le CAT (lien en anglais), devrait être atteint malgré la sortie des Etats-Unis de l'Accord de Paris sous Donald Trump. Avec l'arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche, les Américains sont revenus dans l'accord. Et le nouveau président a fixé l'objectif de neutralité carbone pour 2050.

Les Etats-Unis doivent présenter leur NDC révisée, attendue avec impatience, lors du sommet climat de jeudi et vendredi. Joe Biden a d'ores et déjà déclaré qu'un objectif "ambitieux" serait annoncé à cette occasion. "Nous, acteurs de la société civile, attendons l'annonce d'une réduction d'au moins 50% de leurs émissions d'ici à 2030 par rapport à 2005", explique à franceinfo Sébastien Treyer, directeur de l'Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri).

L'Union européenne, une ambition rehaussée

En troisième position dans le classement des plus gros émetteurs viennent l'Union européenne et le Royaume-Uni. L'UE s'était engagée en 2015 à réduire ses émissions de CO2 d'au moins 40% d'ici à 2030 par rapport à 1990. Objectif relevé il y a quelques jours, puisque les eurodéputés et les Etats membres se sont entendus sur une baisse d'"au moins 55%" des émissions du continent par rapport à 1990.

On est encore "très loin de ce que nous dit de faire la science", a toutefois estimé auprès de franceinfo Neil Makaroff, responsable des politiques européennes de l'association Réseau action climat. Même constat sur le site du Climate Action Tracker. "On a un objectif pour l'ensemble de l'UE, [mais] nous n'avons pas d'objectif par les différents Etats membres", souligne par ailleurs Marie Toussaint, eurodéputée EELV.

De son côté, le Royaume-Uni, qui doit accueillir en novembre la COP26, a aussi relevé ses ambitions : le Premier ministre, Boris Johnson, a annoncé mardi un nouvel objectif de baisse des émissions de 78% d'ici à 2035 par rapport à 1990.

L'Inde, un objectif ambitieux sans feuille de route

L'Inde, qui compte déjà 1,3 milliard d'habitants, devrait, selon les Nations unies, devenir le pays le plus peuplé de la planète d'ici au milieu de la décennie. Un changement significatif pour son empreinte carbone, qui ne cesse d'augmenter, alors que l'Inde est déjà le quatrième plus gros émetteur mondial. L'Agence internationale de l'énergie (AIE) a d'ailleurs estimé, dans un récent rapport (lien en anglais), que les efforts déployés contre le changement climatique au niveau mondial seraient réduits à néant si l'Inde n'y contribue pas de façon significative. "Tous les chemins menant à la réussite de la transition vers des énergies propres au niveau mondial passent par l'Inde", souligne le rapport.

Comme la Chine, l'engagement initial de l'Inde est basé sur une réduction de l'intensité carbone : de 33 à 35% d'ici 2030 par rapport à 2005. Une trajectoire "compatible" avec un monde à +2 °C, selon le CAT (lien en anglais). L'Inde n'a pas déposé sa nouvelle NDC ni donné d'indications sur ses intentions.

La Russie promet d'agir "sévèrement"

Cinquième plus gros émetteur mondial et producteur majeur d'hydrocarbures, la Russie n'a formellement rejoint l'accord de Paris qu'en 2019. Elle a déposé sa première NDC fin 2020 : elle y reprend des engagements précédents de parvenir en 2030 à 70% du niveau des émissions de 1990 (soit une baisse de 30% sur la période). C'est insuffisant, pour le CAT (lien en anglais).

Le président Vladimir Poutine a promis mercredi de lutter contre le changement climatique, alors que le pays est régulièrement victime de ses effets. "Nous devons relever les défis du changement climatique, adapter l'agriculture, l'industrie, le logement et les services communaux, toute l'infrastructure", a-t-il déclaré lors de son grand discours annuel sur l'état de la Nation. Promettant d'agir "sévèrement", il a dit vouloir "créer une industrie pour le recyclage des émissions de carbone, pour parvenir à une réduction de leur volume et introduire un contrôle et une surveillance stricts". Vladimir Poutine a fixé comme objectif que le volume cumulé d'émissions nettes de gaz à effet de serre de la Russie passe en dessous de celui de l'Union européenne au cours des 30 prochaines années.

Le Japon relève nettement sa cible

Le Japon s'était engagé en 2016 à réduire ses émissions de 26% d'ici 2030 par rapport à 2013. Sa nouvelle contribution soumise en mars 2020 n'a pas modifié ce chiffre. Mais le Premier ministre, Yoshihide Suga, arrivé au pouvoir ultérieurement, avait promis de fixer un nouvel objectif. Il a annoncé jeudi, peu avant le début du sommet virtuel mondial sur le climat, son nouvel objectif de réduction de ses émissions de CO2, à 46% d'ici à 2030.

Et les autres ?

Parmi les autres principaux émetteurs, le Brésil, le Mexique, l'Australie et la Corée du Sud ont déposé des engagements révisés, sans renforcer leur objectif, selon les experts. Le CAT estime même que les nouvelles contributions du Mexique et du Brésil sont un recul.

L'Indonésie, le Canada, l'Arabie Saoudite, l'Afrique du Sud n'ont pas déposé de nouveaux engagements, même si ce dernier pays vient de dévoiler un projet plus ambitieux. "On espère qu'il y aura des annonces fortes, notamment de la part de grands pays du G20 comme l'Indonésie, l'Inde et l'Afrique du Sud", avance Sébastien Treyer, en amont du sommet de Joe Biden.

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