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Attaque meurtrière au Niger : comment le ministère des Affaires étrangères définit-il les zones dangereuses ?

La zone de Kouré, où a eu lieu l'attaque qui a tué huit personnes, n'était pas "formellement déconseillée" par le ministère des Affaires etrangères. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP et Reuters - Coline Renault
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La réserve de Kouré, où a eu lieu l'attaque meutrière, abrite les dernières girafes d'Afrique de l'Ouest et est un site fréquenté par les expatriés. (THIERRY BRESILLON / GODONG)

"Ils sont allés dans l'endroit le plus zen du Niger", a estimé lundi 10 août Joseph Breham, l'avocat de l'ONG Acted où travaillaient certaines des personnes tuées dimanche, sur franceinfo. Une affirmation qui a fait bondir Thomas Gomart, le directeur de l'Institut français des relations internationale : "Il n'y a pas de zone 'zen' au Niger, a-t-il répondu. La plus grande vigilance s'impose à tous lorsqu'on y circule."

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C'est que la réserve où a eu lieu l'attaque, située à une soixantaine de kilomètres de la capitale Niamey, se trouve sur la localité de Kouré, une ville où les déplacements touristiques sont possibles, selon les recommandations du ministère des Affaires étrangères français. En revanche, la région alentour est globalement "déconseillée sauf raison impérative", tandis que le Quai d'Orsay déconseille formellement de se rendre dans le reste du pays.

Des avis basés sur l'expertise des ambassades

Le ministère des Affaires étrangères publie depuis 1999 des "conseils aux voyageurs" informant des risques encourus dans chaque pays. Elles sont élaborées par le Centre de crise et de soutien pour fournir aux professionnels du tourisme ou aux visiteurs particuliers des informations vérifiées et actualisées en fonction des évènements ou des modifications de réglementation.

Du Guatemala aux îles Fidji, il existe près de 200 fiches détaillant les contextes sécuritaires et environnementaux de chaque Etat. "La proposition initiale part de l'ambassade, qui est celle qui connaît le mieux le terrain. De là procède une première ébauche, suivie d'un échange avec Paris", expliquait en 2017 Patrice Paoli, alors directeur du Centre de crise et de soutien du Quai d'Orsay, au magazine professionel L'Echo touristique.

Le ministère des Affaires étrangères classent les pays selon leur degré de risques.  (@Quai d'Orsay)

Le ministère des Affaires étrangères établit ensuite une carte, qui distingue les différents lieux en 4 couleurs : vert (vigilance normale), jaune (vigilance renforcée), orange (déconseillée sauf raison impérative) et rouge (formellement déconseillée).

Des niveaux de vigilance baissés localement

L'attaque meurtrière s'est déroulée dans la réserve de girafes de Kouré, une localité classée en jaune par le Quai d'Orsay, tout comme Niamey, la capitale du Niger. Ces deux villes font donc l'objet d'une "vigilance renforcée", selon le ministère des Affaires étrangères, même si la région alentour est en orange, car elle se situe au cœur de la "zone des trois frontières". C'est là que se rencontrent le Mali, le Burkina Faso et le Niger. La menace terroriste y est extrêmement importante et les tensions omniprésentes dans un contexte d'intervention militaire de l'opération Barkhane.

La carte du Niger disponible sur le site du Quai d'Orsay le 9 août. (Quai d'Orsay)

"S'il n'y a pas eu d'actions terroristes depuis un certain moment, que les autorités sont fiables et ont mis en place un certains nombre de dispositifs pour prévenir les attaques terroristes, comme l'encadrement de convoi ou une présence militaire accrue, le niveau de surveillance est parfois abaissé", explique Anne Giudicelli, fondatrice du cabinet de conseil Terrorisc à franceinfo. Ces décisions interviennent à la suite d'une négociation diplomatique. "Quand un pays est intégralement rouge, sa situation économique en est fortement 'impactée'. Il y a donc un dialogue diplomatique entre les autorités", note la consultante. 

Des avertissements peu lisibles

La classification des zones à risque avait également fait débat en mai 2019, lorsque deux touristes français avaient été kidnappés dans le parc du Pendjari, au Bénin. Leur libération avait coûté la vie à deux soldats français lors d'une opération militaire de sauvetage. Au départ, le lieu était classé en jaune par le ministère. La frontière avec le Burkina avait viré au rouge et orange en décembre avant le drame, et l'ensemble du parc, le 10 mai, soit après l'enlèvement des touristes. Face à la polémique, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves le Drian, avait alors souhaité "durcir" la classification. "Quelle que soit la couleur, il s'agit de zones formellement déconseillées pour les motifs touristiques", avait-il expliqué.

Difficile donc pour ces touristes de savoir très précisément à quel danger ils s'exposaient.  "Les zones à risque sont tirées au stabilo. Ça se joue à quelques mètres près", affirme de son côté Didier Arino, directeur du conseil spécialisé Protourisme, dans Le Figaro. "Le risque est partout et le monde évolue à tout moment."

Les Etats-Unis eux classent tout le Niger en jaune.  (Gouvernement des USA)

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les recommandations ne sont pas exactement les mêmes d'un pays à un autre. Les Etats-Unis classent ainsi tout le Niger en jaune, quand le Royaume-Uni adopte une carte semblable à la France. La Suisse, en revanche, déconseille "tout voyage au Niger" et note "un risque d'enlèvement très élevé sur tout le territoire".

Le problème, toutefois, de placer totalement en rouge de nombreux pays potentiellement dangereux risque de diluer l'avertissement en mettant sur le même plan des Etats aux situations radicalement différentes : "Passer plus de zones en rouge, ce n'est pas une solution, estime Jean-Pierre Mas, représentant des agences de voyages françaises. Il faut être plus vigilant sur le suivi de l'actualité, l'évolution des situations, pour détecter les zones où le danger, effectivement, est important."

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