Elections en Catalogne : on vous explique les enjeux du scrutin régional de ce dimanche en Espagne

Le Parti socialiste de Pedro Sanchez espère se hisser au pouvoir dans cette région, tenue par le séparatiste Pere Aragonès. L'indépendantiste Carles Puigdemont, à l'origine de la tentative de sécession de 2017, ambitionne de diriger à nouveau le territoire.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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L'indépendantiste Carles Puigdemont, chef de file de la tentative de sécession de la Catalogne en 2017, en campagne en exil depuis Perpignan (Pyrénées-Orientales), le 6 avril 2024. (LORENA SOPENA LOPEZ / ANADOLU / AFP)

En Catalogne, les esprits ne sont pas vraiment aux élections européennes. Un autre scrutin, plus local et très concernant pour la population du fait de la grande autonomie de la région par rapport à Madrid, se tient dimanche 12 mai. Ce scrutin a pour objectif de renouveler le Parlement régional. Il était initialement prévu pour le début de l'année 2025 mais il a été anticipé, après l'échec du gouvernement régional à faire adopter son projet de budget.

Pour l'heure, les sondages donnent le Parti socialiste du Premier ministre espagnol Pedro Sanchez, et son candidat à l'élection Salvador Illa, largement en tête. Derrière, suivent l'indépendantiste Carles Puigdemont et sa formation Junts per Catalunya (Ensemble pour la Catalogne), ainsi que l'autre grand parti séparatiste, Gauche républicaine de Catalogne (ERC), mené par l'actuel président régional Pere Aragonès. Trois candidats qui jouent gros.

Le Parti socialiste de Pedro Sanchez espère une victoire cruciale

Reprendre le pouvoir aux séparatistes, qui dirigent la région depuis une décennie, représenterait une grande victoire pour Pedro Sanchez, qui veut "tourner la page" de la tentative de sécession de 2017. En Espagne, cette crise, l'une des pires vécues par le pays depuis le retour de la démocratie, a durablement marqué les esprits. Un succès socialiste signifierait "une nouvelle étape" en Catalogne "après dix ans perdus", a déclaré le candidat du Parti des socialistes de Catalogne (PSC), Salvador Illa.

Une victoire catalane permettrait aussi à Pedro Sanchez de relancer un nouveau mandat, compliqué par l'ouverture d'une enquête judiciaire contre son épouse face à laquelle il a songé à démissionner, puis renoncé, fin avril. Arrivé au pouvoir en 2018, il est parvenu à s'y maintenir en novembre 2023 grâce au soutien, paradoxal à première vue, des deux partis indépendantistes catalans. Mais cette fleur envers le Premier ministre s'est faite dans le cadre d'un accord donnant-donnant.

Les partis Ensemble pour la Catalogne et Gauche républicaine de Catalogne ont en effet obtenu en contrepartie une loi d'amnistie pour les séparatistes impliqués dans les événements de 2017, très contestée dans la rue par la droite. Ce texte doit être signé fin mai ou début juin et permettra à Carles Puigdemont de faire son grand retour en Espagne, après plus de six ans d'exil. Et donc d'endosser le rôle de président s'il est élu dimanche. "Les barrières ont été rompues, par nécessité, entre les socialistes et les indépendantistes", analyse pour Ouest France le politologue barcelonais Sergio de Maya. La formation de Pedro Sanchez a aussi promis "des mesures permettant l'autonomie financière" de la Catalogne. 

La stratégie des socialistes semble porter ses fruits, puisqu'ils sont aujourd'hui premiers dans les sondages. Mais avec seulement une quarantaine de sièges, selon les projections, ils seront encore loin de la majorité absolue, fixée à 68 sièges. Si le pronostic se confirme, iIs devront donc trouver des alliés pour gouverner. L'une des hypothèses est un accord avec les indépendantistes, mais cela finirait de faire imploser leur mouvement. Salvador Illa a notamment tendu la main au camp de Carles Puigdemont, comme le rapporte L'Indépendant.

Une position délicate pour l'indépendantiste Carles Puigdemont

Toujours sous le coup d'un mandat d'arrêt en Espagne, Carles Puigdemont fait campagne depuis le sud de la France, où il s'est installé le mois dernier après des années d'exil en Belgique, et a fortement progressé dans les sondages ces dernières semaines. "Pouvoir être en contact direct, face à face, avec les gens, c'est très réconfortant pour moi", a-t-il déclaré à France 3 Occitanie, lui qui tient tous les soirs des meetings à Argelès-sur-Mer (Pyrénées-Orientales).

Elu président de la région en 2016, il est à l'origine de la tentative de sécession de la Catalogne en 2017. Carles Puigdemont veut croire en ses chances de diriger à nouveau la région, si sa formation Junts s'impose comme premier parti du bloc séparatiste et que celui-ci, très divisé, conserve la majorité des sièges. Mais cette hypothèse semble a priori compliquée, d'autant plus qu'une nouvelle formation séparatiste, Alliance catalane, classée à l'extrême droite, a émergé ces derniers mois et est créditée d'une poignée de sièges par les sondages. Carles Puigdemont a par ailleurs assuré qu'il se retirerait de la politique locale s'il ne parvenait pas à se faire élire lors de ce scrutin.

Un fauteuil à garder pour le séparatiste Pere Aragonès

En lice, il reste Pere Aragonès, président de la Catalogne depuis septembre 2020. Son gouvernement a décrété mardi la fin de l'état d'urgence sécheresse qui était en vigueur depuis le 1er février. Cette annonce intervient à quelques jours du scrutin et alors que son parti est très critiqué par l'opposition pour la gestion de cette crise. Celui qui a convoqué ces élections anticipées après le rejet de son projet de budget par l'assemblée est en forte baisse dans les sondages.

Si ERC gouverne actuellement en solitaire, avec seulement 33 députés sur 135 au Parlement régional, le parti indépendantiste a toutefois "contribué à normaliser la Catalogne et à adoucir le schisme de 2017", la tentative avortée de sécession de la région, soulève El Periódico de Catalunya. Dans un tacle à ses adversaires, Pere Aragonès défend auprès du quotidien espagnol El Pais que "ses valeurs sont à l'opposé de ceux qui considèrent la politique comme un agenda purement personnel".

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