Démission de Theresa May : de la perte de sa majorité à ses échecs sur le Brexit, deux années de galère de la Première ministre
La cheffe du gouvernement du Royaume-Uni a annoncé que sa démission prendrait effet le 7 juin. Elle avait pris ses fonctions en juillet 2016.
Elle sera restée deux ans et 329 jours aux commandes du Royaume-Uni. Theresa May, qui devait mettre en œuvre le Brexit, a annoncé qu’elle allait démissionner de ses fonctions de cheffe du Parti conservateur, et donc de Première ministre, le 7 juin. Et ce à deux jours des élections européennes.
Theresa May avait pris la tête de l'exécutif en juillet 2016, peu après le vote des Britanniques en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l'UE. "L'histoire ne retiendra pas d'elle une image favorable", estime Simon Usherwood, politologue de l'université de Surrey. Franceinfo revient sur près de trois ans de négociations, d'obstacles et de déboires politiques.
Juin 2017 : Theresa May perd sa majorité au Parlement
Après avoir lancé la procédure de divorce avec l'Union européenne en mars 2017 (comme l'obligeait le vote du Brexit), Theresa May est désireuse d'asseoir son autorité avant d'entamer les négociations avec l'Union européenne.
Elle convoque donc des élections législatives anticipées. Mauvaise pioche car elle perd sa majorité absolue au Parlement britannique le 8 juin 2017 et doit s'allier avec le petit parti nord-irlandais DUP. Les négociations commencent avec les Européens le 19 juin et Theresa May, affaiblie, est obligé d'assouplir son discours concernant le Brexit, devenant de plus en plus partisane d'un "Brexit fluide et méthodique".
Novembre 2018 : cinq ministres démissionnent
Les chiffres donnent le tournis : 585 pages, 185 articles... L'accord de sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne est trouvé après vingt mois de négociations avec Bruxelles. Theresa May réussit à le conclure le 13 novembre 2018. Une victoire de courte durée. Dans la matinée du 15 novembre, Dominic Raab, le ministre chargé du Brexit, démissionne, avec quatre autres membres du gouvernement, pour montrer son désaccord. Un point cristallise les oppositions sur ce texte : le fameux "backstop", le "filet de sécurité" s'appliquant à l'Irlande. Un dispositif censé empêcher le retour d'une frontière physique entre la province britannique de l'Irlande du Nord et la république d'Irlande. Ce "backstop" est inclus dans l'accord trouvé par Theresa May à Bruxelles.
Dans l'après-midi du 15 novembre, la Première ministre tente d'expliquer pendant trois heures, à Westminster, devant des députés hostiles, son projet d'accord avec l'Union européenne. En vain. Sa légitimité est fragilisée et la contestation au sein du camp des conservateurs ne cesse de grandir les mois suivants. Craignant de ne pas avoir la majorité pour faire adopter le projet d'accord, Theresa May décide de reporter le vote des parlementaires britanniques.
Janvier 2019 : premier rejet de l'accord de Brexit
Et ce qui devait arriver arriva. Le 15 janvier, les députés britanniques rejettent (432 voix contre, 202 pour) l'accord de Brexit conclu deux mois plus tôt entre les négociateurs britanniques et les négociateurs européens. C'est un revers pour Theresa May.
Le lendemain, le gouvernement survit de justesse à une motion de censure déposée par l'opposition travailliste. Le 29 janvier, les députés britanniques invitent Theresa May à aller renégocier la clause sur la frontière entre la république d'Irlande et l'Irlande du Nord, ce qui est rejeté aussitôt par Bruxelles. La Première ministre promet qu'un vote sur le Brexit aura lieu d'ici au 12 mars.
Mars 2019 : l'accord de Brexit rejeté par les députés britanniques
A 17 jours de la date initialement prévue du Brexit, les députés britanniques rejettent de nouveau l'accord de retrait, le 12 mars 2019, par 391 voix contre 242. Nouveau revers pour la Première ministre, qui doit affronter le lendemain ces mêmes députés à la Chambre des communes. Ils votent le 14 mars en faveur d'un report du Brexit, une décision approuvée par les 27 autres membres de l'Union européenne.
Le 27 mars, Theresa May promet de démissionner si son accord de Brexit est adopté. Le même jour, les députés votent contre huit scénarios alternatifs qu'ils ont eux-mêmes proposés, dont une sortie sans accord ou une union douanière avec l'Union européenne.
Le 29 mars, date prévue pour la sortie du Royaume-Uni de l'UE, les députés rejettent pour la troisième fois, par 344 voix contre 286, le traité de retrait. Dans l'impasse, les dirigeants européens se voient obligés d'accorder au Royaume-Uni un délai pour le Brexit jusqu'au 31 octobre.
Mai 2019 : Theresa May annonce sa démission
Le 17 mai, les travaillistes annoncent la rupture des pourparlers avec la Première ministre. Quatre jours plus tard, Theresa May présente un plan de la "dernière chance" pour le Brexit, avec pêle-mêle des mesures sociales et la possibilité d'un second référendum, une option qu'elle refusait jusqu'ici.
Le texte suscite un déluge de critiques de la part de l'opposition travailliste et des eurosceptiques. Il entraîne la démission, mercredi soir, de la ministre chargée des relations avec le Parlement, Andrea Leadsom.
Acculée, Theresa May, annonce, le 24 mai, sa démission, qui prendra effet le 7 juin. "Ce fut l'honneur de ma vie d'être la deuxième femme à occuper le poste de Premier ministre", déclare-t-elle devant le 10 Downing Street. La Commission européenne souligne dans la foulée que ce départ "ne change rien" à la position des 27 sur l'accord de sortie. En attendant son départ effectif, Theresa May expédiera les affaires courantes jusqu'à la fin du processus de désignation de son successeur.
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