Guerre en Ukraine : les clés pour comprendre le vote du Parlement sur le soutien de la France à Kiev
Les discussions risquent d'être tendues. L'Assemblée nationale débat, mardi 12 mars, de la question du soutien à l'Ukraine. Le Sénat fera de même mercredi. Dans un communiqué, l'Elysée a précisé que le chef de l'Etat avait demandé au gouvernement de procéder devant le Parlement à une déclaration "relative à l'accord bilatéral de sécurité conclu avec l'Ukraine" le 16 février.
Ces échanges seront suivis d'un vote, non contraignant. Si les forces politiques se disent en faveur d'un soutien à Kiev, elles ont aussi dénoncé les propos d'Emmanuel Macron, qui a affirmé jeudi ne vouloir "aucune limite" sur l'aide accordée à Kiev et assuré que l'envoi de troupes au sol ne devait pas "être exclu". Franceinfo vous détaille ce qu'il faut attendre des débats.
Des débats suivis d'un vote non contraignant
L'organisation de ces débats fait suite à "l'accord bilatéral de sécurité conclu avec l'Ukraine" le 16 février, décrit l'Elysée. Cet engagement de dix ans prévoit notamment une aide militaire allant "jusqu'à 3 milliards d'euros" en 2024 et un soutien à la future adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne (UE).
Concrètement, le gouvernement fera une déclaration au titre de l'article 50-1 de la Constitution, qui sera suivie d'un débat, mardi à 15 heures à l'Assemblée nationale et mercredi à 18h15 au Sénat. Un vote sera organisé dans les deux chambres du Parlement, mais il sera non contraignant pour le gouvernement et n'aura pas d'impact sur l'accord signé avec Kiev.
Emmanuel Macron plaide pour un "soutien indéfectible" à Kiev
Le président de la République, qui a promis de se rendre en Ukraine avant la mi-mars, tente de faire entendre sa voix face à la Russie. Jeudi 7 mars, il a reçu à l'Elysée les chefs de partis représentés au Parlement pour évoquer la guerre en Ukraine. "Face à un ennemi qui ne se met aucune limite, nous ne pouvons nous permettre d'en formuler", a-t-il asséné pendant la réunion.
Une façon d'assumer ses propos du 26 février, lorsqu'il avait affirmé que l'envoi en Ukraine, à l'avenir, de troupes occidentales au sol ne devait pas "être exclu". La sortie avait agacé les homologues du président français. Le chancelier allemand Olaf Scholz avait ainsi affirmé qu'"aucun soldat" ne serait envoyé en Ukraine par des pays d'Europe ou de l'Otan.
Les oppositions très critiques envers les déclarations d'Emmanuel Macron
Si l'ensemble des forces politiques ont toutes plaidé pour un "soutien indéfectible à l'Ukraine", selon l'entourage du chef de l'Etat à France Télévisions, la plupart d'entre elles ont récusé le possible envoi de troupes européennes en Ukraine. "Je suis arrivé inquiet et je suis ressorti plus inquiet", a résumé devant la presse le coordinateur de La France insoumise, Manuel Bompard, à l'issue de la réunion élyséenne. "Il n'y a aucune limite et aucune ligne rouge", a aussi déploré le président du Rassemblement national Jordan Bardella.
Selon le patron des communistes Fabien Roussel, Emmanuel Macron a notamment esquissé, carte à l'appui, le scénario d'une avancée du front "vers Odessa ou vers Kiev", "ce qui pourrait engager une intervention" pour arrêter la Russie. "C'est vraiment un problème d'amateurisme à ce stade-là", a renchéri Marine Tondelier, la cheffe des Ecologistes.
Pour le président des Républicains Eric Ciotti, "on peut surtout se demander la pertinence des déclarations du président, qui n'ont pas contribué à faire avancer d'un iota les relations diplomatiques. (...) J'ai redit le soutien total des Républicains à l'Ukraine, à une aide financière et à des équipements militaires. Mais j'ai redit notre totale opposition à un engagement de troupes au sol. C'est une position inopportune, irresponsable", a-t-il taclé.
Les partis d'oppositions réfléchissent à leur vote
Si le parti LR a néanmoins ouvert la voie à un vote positif, et si les Ecologistes et le Parti socialiste hésitent, le reste de la gauche penche pour une opposition franche. Fabien Roussel et Manuel Bompard ont invoqué "la perspective de l'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne ou à l'Otan", qui figure dans le texte soumis au vote.
Il s'agit d'une "ligne rouge" aussi pour Jordan Bardella, qui laisse toutefois planer le suspense sur la décision du RN, favorable au "principe d'un accord bilatéral".
Une manière de remettre l'Ukraine au centre du jeu dans la campagne des européennes
Les propos d'Emmanuel Macron s'inscrivent dans une stratégie politique. L'exécutif compte faire de ce débat parlementaire un "moment de vérité" pour chaque formation car "il est essentiel que les Français puissent savoir qui défend qui", a ainsi expliqué le 28 février la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot.
Emmanuel Macron cherche ainsi à mettre l'Ukraine au centre de la campagne pour les élections européennes du 9 juin, alors que les sondages donnent Renaissance largement distancé par le Rassemblement national. Le but de la manœuvre : faire "sortir du bois le RN" et faire passer ceux qui s'opposeraient à un soutien franc à Kiev pour des pro-Moscou. Le 27 février, le Premier ministre Gabriel Attal avait donné le ton à l'Assemblée nationale en se demandant "si les troupes de Vladimir Poutine ne sont pas déjà dans notre pays", visant nommément Marine Le Pen.
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