Guerre en Ukraine : quelles sont les réactions des pays alliés de Moscou après l'offensive de l'armée russe ?
Face aux nombreux pays occidentaux qui s'allient pour sanctionner l'invasion de l'Ukraine, la Russie peut compter sur quelques Etats qui restent à ses côtés. Notamment son fidèle allié biélorusse.
Depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, jeudi 24 février, beaucoup de pays font bloc pour sanctionner la voie armée. Mais la Russie est-elle pour autant isolée ? Que pensent ses alliés historiques ou plus récents de ce conflit ?
Certains pays amis ont opté pour un soutien militaire, la plupart pour un soutien symbolique. D'autres bottent en touche, et ne réagissent pas ou peu depuis la reconnaissance de l'indépendance de régions séparatistes prorusses par Vladimir Poutine, lundi 21 février.
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Alors que la Biélorussie accueille des pourparlers entre Kiev et Moscou, ce lundi 28 février, franceinfo fait le point sur l'attitude à géométrie variable des alliés de la Russie.
La Biélorussie, un allié actif dans l'offensive
Avant même l'invasion de l'Ukraine lancée par Moscou, des milliers de militaires russes étaient déployés en Biélorussie depuis plusieurs semaines, officiellement pour des "exercices". Depuis jeudi, le pays sert de rampe de lancement à l'opération, notamment pour l'attaque de Kiev, la capitale ukrainienne.
Les sanctions qui ont été mises en œuvre contre la Russie ont débordé sur la Biélorussie. Justin Trudeau, Premier ministre canadien, a annoncé sur Twitter samedi que 57 Biélorusses seraient sanctionnés, en plus de "dizaines de sanctions déjà imposées au régime d'Alexandre Loukachenko".
Le président, qui dirige d'une main de fer la Biélorussie depuis près de trois décennies, s'est considérablement rapproché de Vladimir Poutine ces derniers mois. Ce dernier lui fournit un soutien, notamment financier, depuis un vaste mouvement de contestation qui a fait vaciller le pouvoir biélorusse en 2020, avant d'être réprimé.
Dimanche, le pouvoir a fait adopter par référendum des amendements à la Constitution permettant à Moscou de déployer des armes nucléaires en Biélorussie, qui était jusqu'à présent une "zone sans nucléaire". Mi-février, Alexandre Loukachenko avait déclaré que son pays était prêt à accueillir "non seulement des armes nucléaires, mais aussi des armes supernucléaires" en cas de "menace".
Ce 28 février, la Biélorussie s'est improvisée en médiatrice de ce conflit auquel elle est pourtant partie prenante. Des pourparlers directs ont débuté entre l'Ukraine et la Russie, sur le territoire biélorusse, non loin de la frontière avec l'Ukraine, sur la rivière Pripiat, près de la centrale nucléaire de Tchernobyl.
La Corée du Nord et la Syrie, des soutiens indéfectibles
Les Etats-Unis sont "la cause profonde" de cette crise, estimait le gouvernement nord-coréen vendredi, au lendemain de l'invasion de l'Ukraine. Washington a poursuivi une politique de "suprématie militaire au mépris de la demande légitime de la Russie pour sa sécurité", complète un message publié samedi sur le site du ministère des Affaires étrangères nord-coréen.
Cette déclaration, signée du nom d'un chercheur, peut être analysée comme une réaction officielle "discrète" de Pyongyang, selon Park Won-gon, professeur d'études nord-coréennes à l'université Ewha de Séoul (Corée du Sud), interrogé par l'AFP.
La Corée du Nord n'est soutenue que par quelques Etats, principalement la Chine et la Russie. Moscou s'est longtemps opposée à la pression internationale exercée sur Pyongyang à cause de ses programmes d'armement, et a même demandé un allègement des sanctions contre ce pays.
La Syrie, historiquement liée à l'Union soviétique jusqu'en 1991 puis à la Russie par des accords militaires, penche aussi nettement côté russe. Le président syrien, Bachar Al-Assad, a qualifié vendredi l'invasion de l'Ukraine de "correction de l'Histoire" dans une publication Facebook. Depuis 2015, la Russie, qui dispose de deux bases militaires en Syrie, intervient militairement en soutien de Bachar Al-Assad contre les rebelles et les jihadistes. Plus de 63 000 militaires russes ont combattu en Syrie.
Le Venezuela, l'allié sans faille en Amérique du Sud
"Le Venezuela est avec Poutine", a déclaré Nicolás Maduro mardi, avant l'invasion de l'Ukraine. Le pays a déjà soutenu la Russie, a rappelé le président. Son prédécesseur et mentor, Hugo Chavez (1999-2013), avait reconnu en 2008 l'indépendance de l'Ossétie du Sud lors du conflit avec la Géorgie.
Nicolas Maduro a lui-même bénéficié du soutien de la Russie, alors que sa réélection controversée en 2018 n'a pas été reconnue par une partie de la communauté internationale et notamment par les Etats-Unis, qui cherchent à l'évincer du pouvoir.
Le Venezuela est un "partenaire stratégique de la Russie". Avant le début de la guerre en Ukraine, le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov, n'avait ainsi pas écarté un déploiement militaire russe au Venezuela et à Cuba.
Cuba et l'Iran, des soutiens pour qui "la guerre n'est pas la solution"
Plusieurs pays amis de la Russie refusent de condamner ou de sanctionner l'attaque de l'Ukraine, mais appellent à l'arrêt des opérations militaires. L'Iran a ainsi estimé, jeudi, que "la guerre n'était pas une solution", tout en considérant l'expansion éventuelle de l'Otan comme une "menace grave".
C'est aussi le cas de Cuba, allié traditionnel de la Russie, qui a demandé une sortie du conflit "par des moyens pacifiques" tout en fustigeant la résolution présentée vendredi au Conseil de sécurité de l'ONU condamnant "l'agression" russe en Ukraine, contre laquelle Moscou a mis son veto. Juste avant le déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, Cuba avait déjà appelé les Etats-Unis et l'Otan à répondre aux "demandes fondées de garanties de sécurité" de la Russie, estimant que celle-ci avait le "droit de se défendre".
La Chine, l'amie discrète
La Chine est sur une ligne de crête diplomatique sur le dossier ukrainien. Plusieurs banques publiques chinoises limitent depuis l'invasion le financement d'achats de matières premières en Russie, rapportait l'agence Bloomberg samedi (article payant, en anglais). Les institutions financières chinoises prennent au sérieux le respect des sanctions, explique Ben Kostrzewa, consultant juridique à Hong Kong, à Bloomberg : "Ils ne veulent pas être eux-mêmes sanctionnés, ils ne peuvent pas perdre l'accès aux transactions en dollars américains."
Pourtant, la Chine et la Russie ont considérablement renforcé leurs liens depuis l'annexion en 2014 de la Crimée par Moscou et les sanctions occidentales qui avaient suivi. Début février, lors d'une visite à Pékin à l'occasion des Jeux olympiques, le président russe, Vladimir Poutine, a signé d'importants accords avec son homologue chinois, Xi Jinping. Les deux pays ont notamment renforcé leur coopération dans le secteur financier et l'approvisionnement en gaz. La Chine est un des principaux acheteurs de gaz et de pétrole russes.
"Jusqu'à maintenant, il y a des partenariats entre la Russie et la Chine, mais il n'y a absolument pas d'alliance militaire", souligne la chercheuse Anna Colin Lebedev, interrogée par Brut. "Donc à ce jour, il n'y a aucune raison que la Chine intervienne dans ce conflit armé qui est quand même très, très loin de ses frontières."
Les pays du Golfe, la prudence avant tout
Par le passé, les riches monarchies du Golfe, longtemps protégées par les Etats-Unis, n'auraient pas hésité à se ranger derrière les défenseurs de l'Ukraine. Mais aujourd'hui, le renforcement de leurs liens avec la Russie en matière d'énergie, de finance et de sécurité les pousse à trouver un nouvel équilibre. Les Emirats arabes unis se sont d'ailleurs abstenus lors du vote au Conseil de sécurité de l'ONU vendredi sur une résolution coécrite par les Etats-Unis demandant à Moscou de retirer ses troupes d'Ukraine. De leur côté, le Koweit et le Qatar sont restés très discrets, refusant de condamner l'attaque de l'armée russe. Quant à l'Arabie saoudite, elle a préféré ne pas s'exprimer officiellement.
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