Guerre Israël-Hamas : comment fonctionnera le port temporaire de l'armée américaine au large de Gaza pour acheminer de l'aide humanitaire ?
L'armée américaine va construire un "port temporaire sur la côte de Gaza" afin d'acheminer davantage d'aide humanitaire dans l'enclave, a ordonné le président Joe Biden lors de son discours au Congrès sur l'état de l'Union, jeudi 7 mars. La construction de ce port prendra plusieurs semaines. C'est un changement de stratégie des États-Unis et un décision forte, Gaza étant sous blocus maritime depuis presque vingt ans. Si l’initiative voit le jour, ce sera la première fois que des bateaux pénètrent dans les eaux territoriales de l’enclave depuis l’arrivée au pouvoir du Hamas.
La situation est extrêmement critique dans l'enclave, bombardée par l'armée israélienne depuis les massacres du 7 octobre et où l'aide humanitaire n'arrive qu'au compte-gouttes. La famine menace les Gazaouis, particulièrement dans le nord de l'enclave, où 300 000 personnes sont restées. Il y a une semaine, plus de 100 Palestiniens sont morts dans une bousculade et sous les balles de soldats israéliens lors d’une distribution alimentaire. Dans le même temps, les pourparlers pour un cessez-le-feu ont peu de chance d’aboutir avant le ramadan, qui commence d'ici le 11 mars.
Une jetée flottante
Actuellement, l'aide humanitaire parvient dans la bande de Gaza par la terre, via des convois, mais ils ne sont pas assez nombreux et certains sont attaqués ou détournés. L'aide est aussi acheminée par les airs, avec des parachutages de nourriture mais là aussi en trop faible quantité. Les yeux se tournent donc désormais vers la mer, avec l'annonce de cette mission d’urgence américaine, en coordination avec Israël. L'idée est de construire un port artificiel transportable dans les eaux territoriales de Gaza. La structure devra pouvoir "accueillir de grands navires transportant de la nourriture, de l'eau des médicaments et des abris provisoires", a précisé Joe Biden.
Concrètement, l’aide humanitaire partira en bateau de Larnaca, à Chypre et sera déchargée 390 kilomètres plus au sud, sur les quais de cette structure. Il s'agira d'une construction en kit, assemblée en mer puis déplacée au plus près de Gaza. Une fois opérationnelle, elle permettra à des centaines de camions chaque jour de ravitailler l’enclave en passant par une jetée flottante. La construction sera conduite en partenariat avec des "alliés" au sol, ainsi qu'avec l'ONU et des organisations humanitaires, ont indiqué de hauts responsables américains.
Acheminer davantage d'aide sans intervenir au sol
Cette solution technique présente deux avantages : donner la possibilité à des bateaux de débarquer de grandes quantités de marchandises en eaux profondes, ce qui est aujourd'hui impossible à Gaza, et permettre aux Américains d’acheminer de l’aide sans pour autant obliger leur armée à intervenir au sol. La construction du port ne nécessitera "aucun déploiement au sol de troupes américaines", a ainsi assuré Joe Biden.
Se pose en revanche la question de l’efficacité d’une telle décision car le problème aujourd’hui à Gaza n’est pas le manque d’aide humanitaire, puisque l’aéroport d’Al-Arich en Égypte est bien approvisionné, mais c’est son acheminement. Les contrôles israéliens ralentissent le rythme des livraisons et des convois sont pillés par une population dans le besoin, prête à tout pour manger, alors qu’il n’y a plus d’autorité sur place. Sur ce point-là, Joe Biden ne propose aucune solution.
L'autre limite de l’initiative est le temps. Il faudra au minimum un mois pour mettre en place ce port temporaire. Or, la population du nord de Gaza meurt de faim et ne peut pas attendre plusieurs semaines pour être nourrie. La priorité à très court terme reste la livraison d’aide humanitaire par la route. Joe Biden maintient la pression sur les Israéliens, qui pourraient ouvrir dans les prochains jours un nouveau point de passage, au nord de Gaza. Lors de son discours jeudi, le président américain a appelé le gouvernement israélien à "laisser entrer davantage d'aide humanitaire à Gaza", soulignant qu'elle "ne peut être une considération secondaire ni une monnaie d'échange". Il a par ailleurs réitéré son appel à "un cessez-le-feu immédiat d'au moins six semaines".
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