: Reportage "Ces convois sont pris en otage par le Hamas" : à la frontière égyptienne, des militants israéliens tentent de bloquer l'aide humanitaire vers Gaza
C’est un terre-plein fait de blocs de béton et de triples couches de barbelés, dans un décor aride et poussiéreux à l’extrême sud de l’État hébreu. Une petite centaine de militants israéliens se trouvent sur place. Une énorme porte grillagée a été fermée quelques minutes auparavant, sous les applaudissements.
Depuis fin janvier, une poignée de ces militants israéliens s’indignent de l’entrée de l’aide humanitaire à Gaza. Tous sont persuadés qu’elle est détournée par le Hamas à 70%. Alors ils se donnent rendez-vous à Nitzana, à la frontière israélo-égyptienne, où sont inspectés les camions humanitaires par Israël avant d’entrer à Gaza. Leur seule présence ralentit l’inspection des poids lourds et freine ainsi l’arrivée de l’aide. Franceinfo s'est rendu sur place.
"On scanne les convois pour vérifier que rien ne rentre"
Rachel Touitou, 32 ans, une des organisatrices, s’empare d’un haut-parleur pour expliquer, en français, l’action du jour aux nouveaux venus. "Le camion arrive par le biais de ce portail-là de l'Égypte. Ils viennent ici alors on se tient ici. Donc là-bas, on scanne les convois humanitaires pour vérifier que rien ne rentre, que ce qui ne doit pas rentrer ne puisse pas entrer. C'est aussi pour ça qu'on est là aujourd'hui. Ces convois humanitaires sont pris en otage littéralement par le Hamas", affirme-t-elle.
L’UNRWA (l'agence de l'Onu pour les réfugiés palestiniens) a beau démentir et évoquer des procédures strictes dans l’acheminement de l’aide, ce détournement présupposé est le sentiment partagé et la motivation première de tous ces militants. Certains ont fait des heures de route pour venir à ce rassemblement aux airs de pique-nique géant, avec des drapeaux israéliens mais aussi des discours radicaux et décomplexés.
David Ickowicz, 39 ans, est venu de Beit Shemesh, près de Jérusalem. "On est en train de dire au Hamas : 'Tenez, voici du carburant, voici de la nourriture, voici de l’huile, faites ce que vous voulez et continuer vos crimes.' Mais tout serait terminé en quelques semaines s’il n’y avait plus de nourriture ni d’aide qui entraient à Gaza. La guerre serait terminée, dit-il en anglais. Ça dure depuis des mois parce que le monde persiste à dire : 'Envoyez de l’aide, envoyez de l’aide'."
"Les Américains n’ont pas fourni d’aide aux Nazis, ni à l’État islamique, ni aux Talibans"
Que pensent ces militants de la Cour internationale de justice (CIJ), la plus haute juridiction de l’ONU, qui a exigé à Israël un meilleur acheminement de l’aide humanitaire ? Pour Michael Raskas, un Américano-Israélien venu pour la huitième fois, ce n’est pas la question. "Les Américains n’ont pas fourni d’aide aux Nazis pendant la Seconde guerre mondiale, ni à l’État islamique, ni aux Talibans. Israël ne doit pas donner d’aide au Hamas, et c’est pour ça que nous sommes là : pour l’empêcher", cingle-t-il.
La famine des civils dans la bande de Gaza constituerait un crime de guerre, avait déjà indiqué à la fin du mois de décembre dernier l’ONG Human Rights Watch.
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