: Reportage Guerre entre Israël et le Hamas : à l'exposition de l'Institut du monde arabe sur la Palestine, des visiteurs en quête de "recul" et de "connaissances"
Pour prendre de la hauteur sur la guerre entre Israël et le Hamas, pourquoi ne pas se rendre à l'Institut du monde arabe (IMA) ? En sortant du célèbre bâtiment qui surplombe la Seine, face à l'île Saint-Louis, à Paris, Sarah et Sofiane, 21 ans, semblent convaincus, mercredi 15 novembre, par l'exposition "Ce que la Palestine apporte au monde", qui résonne avec l'actualité.
"C'est important de mettre en avant la culture artistique et intellectuelle de la Palestine. En dehors du musée, son peuple est aujourd'hui diabolisé", déplore le jeune homme. L'un comme l'autre regrettent que le conflit soit aujourd'hui réduit aux cinq dernières semaines, qui ont suivi les attaques meurtrières du Hamas en Israël, le 7 octobre. "Il faut voir ce conflit dans une temporalité plus large. Cela fait des années qu'il y a un blocus" dans la bande de Gaza, rappelle Sofiane, qui ne justifie pas pour autant la prise d'otages et les massacres du mouvement islamiste.
Bien qu'elle n'intègre pas les éléments les plus récents de l'actualité, puisque ouverte au public depuis le 31 mai, cette exposition permet, selon Sarah, "d'avoir du recul et les connaissances" nécessaires sur la Palestine. "En venant ici, c'est aussi un moyen de soutenir la cause. L'exposition reste politique, et je trouve ça bien", ajoute l'étudiante.
"Une autre image" de la Palestine
Depuis son inauguration, l'exposition de l'IMA remporte "un succès populaire", au point que le président de l'institut, Jack Lang, a annoncé lundi la prolonger jusqu'au 31 décembre. Selon le musée, la fréquentation a augmenté ces dernières semaines, avec "une affluence encore plus importante" qu'à son lancement, "déjà très dynamique", en mai. Alors qu'elle était trois fois moins fréquentée que l'autre exposition de l'IMA, "Parfums d'Orient", "Ce que la Palestine apporte au monde" est désormais au même niveau depuis un mois. Le succès s'observe particulièrement chez les jeunes, puisque 50% du public a moins de 26 ans.
"Nos visiteurs ont un désir de comprendre ce qu'est la Palestine, et ce désir s'est encore plus aiguisé dernièrement", observe Jack Lang, qui a pour habitude de se "balader pour interroger les gens qui sont là". Mais "cette exposition n'a pas vocation à être politique. Il est clair qu'elle n'est pas antipalestinienne, mais elle n'est pas, non plus, anti-israélienne", assure l'ancien ministre socialiste de la Culture.
"L'exposition est là pour montrer que le peuple palestinien, au-delà de la guerre, est inventif et créatif."
Jack Lang, président de l'IMAà franceinfo
Les mains derrière le dos et une casquette gavroche sur la tête, Christian arpente les salles du musée en quête "d'une autre image" de la bande de Gaza et de la Cisjordanie. "On sait que ce peuple souffre depuis 1948. Ici, je découvre l'œuvre d'artistes palestiniens dont je ne connaissais même pas l'existence", chuchote le sexagénaire. Il a été touché par les photomontages de l'artiste Mohamed Abusal, qui donnent à voir Gaza équipée de lignes (fictives) de métro et de RER. "C'est selon moi un appel à garder l'espoir" de la paix, estime Christian.
Ce dernier déplore les "débats stériles" sur le conflit qui tournent en boucle dans les médias et qui, selon lui, "sont là pour faire de l'audimat". Il dénonce aussi les demandes de cessez-le-feu "bien trop timides" de la classe politique. "Personne n'ose aller contre Nétanyahou", le Premier ministre israélien, juge Christian. "On s'est révoltés de l'attaque du Hamas, à juste titre, et on doit continuer à le faire. Mais on doit aussi se révolter de la réponse d'Israël", plaide-t-il.
"Chercher le calme pour s'informer"
A l'intérieur du musée, le silence tranche avec les polémiques bruyantes des dernières semaines, de la position de La France insoumise à celle de Karim Benzema sur le conflit, en passant par la présence du Rassemblement national à la marche contre l'antisémitisme. "C'est reposant de venir ici. On vient un peu chercher le calme pour s'informer", confie Rose, 18 ans. Dans la salle qui présente le projet Sahab ("nuage" en arabe), musée virtuel de Gaza à l'initiative d'un collectif d'artistes gazaouis, Christiane se dit "submergée par l'émotion".
"On se demande où ils sont, est-ce qu'ils sont encore vivants ?"
Christiane, 73 ansà franceinfo
Au moins "l'un d'eux a été tué par une bombe", rappelle avec émotion Jack Lang, qui lui a récemment rendu hommage sur X. Dehors, Sabine attend une amie pour commencer la visite. "C'est le moment d'y aller, de se reconnecter aux Territoires palestiniens", estime la quadragénaire. Alors que les hôpitaux de la bande de Gaza, dont celui d'Al-Chifa, sont ciblés par l'armée israélienne, Sabine pleure les victimes. "Etant infirmière, j'ai une grosse pensée pour mes collègues sur place."
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