Nomination de Michel Barnier : quels sont les chantiers qui attendent le nouveau Premier ministre dans les semaines à venir ?

Tout juste arrivé à Matignon, le chef du gouvernement doit choisir son équipe ministérielle et se saisir de chantiers mis en suspens depuis la dissolution, comme la présentation du budget.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le Premier ministre nouvellement nommé, Michel Barnier, à l'hôtel de Matignon, à Paris, le 5 septembre 2024. (MOHAMMED BADRA / MAXPPP)

Le temps presse. C'est ce que le nouveau Premier ministre, Michel Barnier, a suggéré, jeudi 5 septembre, lors de la passation de pouvoir avec son prédécesseur Gabriel Attal, quelques heures après sa nomination à Matignon par Emmanuel Macron.

"Au travail", a-t-il déclaré à la fin de son discours. Composition du gouvernement, dossiers urgents, censure à éviter... Franceinfo vous explique ce qui attend Michel Barnier dans les semaines à venir.

Composer un gouvernement

Tout juste nommé à Matignon, où il a promis "des changements et des ruptures", le nouveau Premier ministre doit d'abord s'atteler à la formation d'une équipe gouvernementale. Une réflexion qui peut prendre plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Le prédécesseur de Michel Barnier, Gabriel Attal, avait par exemple annoncé les noms des ministres de son gouvernement deux jours après sa nomination au poste de Premier ministre, en janvier. La composition complète du gouvernement – ministres délégués et secrétaires d'Etat compris – avait été actée un mois plus tard.

Alors que l'Assemblée nationale est morcelée avec trois grandes forces en présence, Michel Barnier, chargé par Emmanuel Macron de "constituer un gouvernement de rassemblement au service du pays" selon un communiqué de l'Elysée, va devoir trouver les bons équilibres. Dans le cas contraire, il encourt le risque de se faire censurer par les députés. 

Dès vendredi, le Savoyard recevait à 9 heures Gabriel Attal, désormais président du groupe Ensemble pour la République à l'Assemblée nationale. A 10h15, il devait s'entretenir avec les dirigeants de son propre parti, Les Républicains, pour examiner les conditions d'une participation à sa future équipe.

En attendant la composition du nouveau gouvernement, les ministres démissionnaires restent en poste pour gérer les affaires courantes. Des ministres qui peuvent d'ailleurs être rappelés par Michel Barnier. D'autant que certains, comme Gérald Darmanin et Rachida Dati, viennent, comme lui, de la droite. 

Préparer un éventuel discours de politique générale

Traditionnellement, même si la Constitution ne l'y oblige pas, le nouveau locataire de Matignon prononce une déclaration de politique générale au Palais-Bourbon lors de l'entrée en fonction d'un nouveau gouvernement. Ce discours permet au Premier ministre de dévoiler les grandes orientations de son programme, les principales réformes et mesures qu'il veut mettre en place.

A cette occasion, Michel Barnier peut décider d'engager la responsabilité de son gouvernement sur sa déclaration de politique générale. Cette possibilité est prévue par l'article 49 de la Constitution. En clair, si une majorité de députés votaient contre, il devrait alors présenter la démission de son gouvernement. Ce scénario semble impossible, puisque le nouveau Premier ministre ne dispose que d'une majorité relative. Sous Emmanuel Macron, seuls les chefs de gouvernement disposant d'une majorité absolue (Edouard Philippe et Jean Castex) se sont risqués à l'exercice.

Traiter les chantiers économiques prioritaires 

Sur le bureau de Michel Barnier, les dossiers urgents sont de nature économique. Le nouveau chef du gouvernement dispose de moins d'un mois pour présenter en Conseil des ministres le budget 2025 qui sera ensuite transmis à l'Assemblée nationale le 1er octobre.

Mais ce délai pourrait exceptionnellement être rallongé de quelques jours, au vu du retard pris cet été et de la situation financière de la France. Le pays est en effet dans le rouge, avec un déficit public de 5,5% du PIB en 2023, et est visé par une procédure de la Commission européenne dite de "déficit public excessif". Le nouveau locataire de Matignon doit aussi se prononcer sur le sort de la réforme des retraites et de l'assurance-chômage.

Les syndicats de la communauté éducative attendent par ailleurs de Michel Barnier et du futur ministre de l'Education nationale qu'ils tranchent rapidement sur les réformes en suspens depuis la dissolution. La rentrée scolaire s'est en effet déroulée dans l'incertitude, notamment sur la formule du brevet à présenter aux élèves de troisième. Le chef du gouvernement est également attendu au tournant sur l'environnement, .

Gérer la menace d'une censure par les députés 

Michel Barnier devra tout faire pour éviter les motions de censure au Parlement. Pour qu'une telle motion soit adoptée, le texte doit être signé par un dixième des députés avant d'être présenté à l'Assemblée. Il doit ensuite être approuvé par la majorité absolue des députés qui composent l'Assemblée nationale. Cette arme prévue par la Constitution n'a atteint sa cible qu'une seule fois sous la Ve République, en 1962. Le gouvernement de Georges Pompidou avait alors été contraint de démissionner.

En additionnant toutes les formations du bloc central, les députés LR et le petit groupe hétéroclite Liot, Michel Barnier pourrait théoriquement s'appuyer sur 235 parlementaires. Il lui manquera donc au moins 54 députés pour disposer d'une majorité absolue (289 députés). Dans ce contexte, un tir groupé du Rassemblement national et du Nouveau Front populaire pourrait théoriquement faire tomber son gouvernement.

Le groupe de Jordan Bardella refuse pour l'heure de se prononcer sur un tel vote et attend la déclaration de politique générale du nouveau locataire de Matignon. Quant à la coalition des gauches, elle a d'ores et déjà annoncé demander la censure du gouvernement de Michel Barnier. Mais elle devra attendre le retour officiel des députés sur les bancs du Palais-Bourbon pour effectuer cette manœuvre.

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