Macron et la communication : le retour de "Jupiter" ?
Les débuts de son second quinquennat marquent un retour de la communication rare, directe et une mise à distance des journalistes. Dans cette période de flottement, consécutive au résultat des élections législatives, le président opte pour une raréfaction de la parole et un retour à la posture de "Jupiter".
C'est le retour de "Jupiter". Depuis sa réélection, Emmanuel Macron prend de la distance, au propre comme au figuré. Il a choisi d'incarner la fonction présidentielle sur le terrain international, dans une posture très gaullienne. Et ses quelques rares prises de parole pour s'adresser aux Français n'ont pas toujours été lisibles, comme par exemple le 22 juin lors de son allocution télévisée. C'était la première fois qu'il s'exprimait depuis les élections législatives et il s'est servi de cette communication pour... interpeller les oppositions.
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franceinfo : comment interpréter cette allocution où Emmanuel Macron ne dit presque rien et ne fait aucune annonce ?
Gaspard Gantzer : C’est l’allocution d’un président de la République qui se retrouve face à une situation qu’il n’avait pas prévue. Il tente donc de redevenir le "maître des horloges", le maître du temps, celui qui décide du tempo médiatique. Tel le joueur de tennis, il renvoie une longue balle en fond de court, pour laisser les oppositions, les différents groupes politiques de l’Assemblée nationale, réagir à son allocution en cherchant avant tout à gagner du temps. C’est une communication marathonienne pour gagner du temps.
Dans la foulée de cette allocution, le chef de l’Etat est parti dans une tournée européenne mais il a ponctué ses déplacements avec des communications ciblées sur le national. Pourquoi Emmanuel Macron a-t-il continué de parler aux Français depuis l’étranger ?
Il y a un adage qui a été mis en place par Jacques Chirac quand il était président de la République, qui était que lorsqu’il était à l’étranger où en Europe, on ne commentait pas la politique nationale. Mais là, Emmanuel Macron n’a pas le choix puisque les questions des journalistes qui sont autour de lui lors de ses déplacements internationaux portent justement sur les questions nationales et donc il est un peu obligé d’improviser des réponses assez techniques, pas forcément très claires qui ne viennent pas remplacer des allocutions ou des interviews qu’il donnerait à la presse en France.
Nous sommes dans un moment de flou car nous attendons la nomination du gouvernement "Borne 2". On remarque que le chef de l’Etat n’a encore accordé aucune interview, à part à TF1 en Ukraine et une caméra en immersion pour France 2 à l’occasion d’un sujet sur la guerre. Comment peut-on qualifier son rapport aux journalistes ?
On a longtemps dit qu’Emmanuel Macron n’aimait pas les journalistes. Mais ça n’a pas toujours été vrai. Avant de devenir président de la République et même avant de devenir ministre de l’Économie, il a entretenu des réseaux journalistiques qui ont favorisé son ascension. Mais devenu ministre de l’Économie et surtout président, il les a mis à distance. À la fois parce qu’il n’a pas forcément confiance dans leur jugement et dans leurs capacités de décryptage, à tort, mais d’autre part parce que c’est aussi une posture pour se mettre au-dessus de la mêlée, au-dessus du monde politique mais aussi médiatique.
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