En Suède, la crainte de l'extension du conflit ukrainien est de plus en plus palpable
La Russie est tout près de la Suède, autant dans les esprits qu'en termes géographiques. Au sein de la population, on sent désormais une réelle différence dans la manière d'appréhender le conflit en Ukraine, comparé à l'Europe de l'Ouest. L'île suédoise de Gotland n'est qu'à 300 kilomètres de l'enclave russe de Kaliningrad. Cette île est clairement devenue le "hot spot" de la Suède. De nouveaux soldats y affluent quasiment tous les jours.
Depuis l'annexion de la Crimée par la Russie en 2014, la Suède s'est largement remilitarisée. Le service militaire obligatoire, mais sélectif, a été réactivé dès 2017 et le budget consacré à la défense du pays a doublé, tout comme la taille des forces armées le sera d'ici 2030.
Une brochure adressée aux Suédois pour se préparer à une guerre
Le 18 novembre, les Suédois ont tous reçu une brochure de 32 pages leur expliquant quoi faire en cas de crise ou de guerre. Ils doivent notamment être capables de survivre en toute autonomie pendant une semaine chez eux. "Quand j'ai reçu la brochure, je me suis dit qu'il était vraiment temps de stocker le nécessaire", explique une femme. Beaucoup ont déjà fait le stock de conserves, de bidons d'eau, de sacs de couchage, de radios à piles, et même de masques et de combinaisons antiradiation. D'autres font le stock petit à petit. "La guerre est si proche de nous, on ne peut plus se dire que ça n'arrivera jamais ici", s'inquiète une autre femme.
Cela fait un peu survivaliste mais c'est fortement recommandé par le gouvernement. C'est un peu devenu la blague en Suède, si quelque chose arrête de fonctionner, on dit que ce sont les Russes qui attaquent. C'est dit avec humour mais cela prouve que cette menace est toujours présente dans un coin de la tête. Ce qui est sûr, c'est que cette petite brochure jaune, gentiment déposée dans la boîte aux lettres, rend la menace russe quasiment palpable.
L'entrée dans l'OTAN marque la fin de la neutralité suédoise
Le pays nordique a mis fin à deux siècles de non-alignement militaire après le déclenchement de la guerre en Ukraine en intégrant l'OTAN le 7 mars 2024. Jusque-là, le pays était tout aussi connu pour ses boulettes de viande que pour sa neutralité. Mais il devenait trop dangereux pour la petite Suède, comme beaucoup l'appellent ici, de se tenir seule et isolée en Europe. À partir du moment où le royaume a déposé sa candidature, les cyberattaques provenant de la Russie ont explosé.
C'est pour cette raison que les autorités insistent sur le terme de "guerre hybride" menée par Moscou. Des attaques menées sur tous les fronts, notamment celui de la mer Baltique où, il y a une semaine, des câbles de télécommunications ont été rompus entre la Suède et la Lituanie, et entre la Finlande et l'Allemagne. Sabotage russe ou pas ? On n'aura peut-être jamais la réponse comme cela a été le cas avec le Nord Stream.
Une menace russe qui n'est pas nouvelle
Au plus fort de la guerre froide, la Suède s'est dotée d'un certain nombre de bunkers. Aujourd'hui, on en compte 65 000, de quoi abriter sept millions de personnes sur les 10 millions d'habitants que compte le pays. D'ailleurs, le gouvernement a annoncé en début d'année qu'il allait consacrer 33 millions d'euros supplémentaires au renforcement de ses abris antiatomiques.
Puis, historiquement, des sous-marins soviétiques, puis russes, ont hanté les eaux suédoises, tout comme des avions violant l'espace aérien suédois. Il y a aussi cette histoire de béluga soupçonné d'être un animal espion russe. Il avait été repéré la première fois en Norvège avec, sur le dos, un mystérieux harnais équipé d'un support pour caméra où on pouvait lire l'inscription "Equipment St. Petersburg". On a jamais su si c'était vraiment un animal espion, en revanche, la Suède fait la chasse aux vrais espions très actifs sur son territoire.
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