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"Il faudrait changer le mot 'Kif' en 'Tuche'": Isabelle Nanty dans le film "Les Tuche 4" nous offre simplement du bonheur

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, la comédienne et réalisatrice, Isabelle Nanty. Elle est à l’affiche du film "Les Tuche 4" d’Olivier Baroux qui sort aujourd’hui au cinéma.

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Isabelle Nanty, le 18 mai 2017, à la Comédie française, à Paris. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

Isabelle Nanty est actrice, réalisatrice, metteuse en scène et fut pendant un temps, professeure d'art dramatique. Quand on évoque son nom, on pense aux films : Les visiteurs, Tatie Danielle, Le fabuleux destin d'Amélie Poulain, Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre, Les Tuche, mais aussi aux séries comme Fais pas ci, fais pas ça ou encore Munch. Aujourd'hui, sort le quatrième volet des "Tuche" d'Olivier Baroux avec Jean-Paul Rouve, Michel Blanc, Claire Nadeau.

franceinfo : Dans Les Tuche 4, on est loin des 100 millions d'euros qui ont été remportés par Jeff Tuche il y a dix ans.

Isabelle Nanty : J'en profiterai pour dire que je trouve que la Française des Jeux ne devrait pas donner 134 millions d'euros à une personne. Cela serait tellement bien qu'il y ait 134 personnes qui ait un million d'euros déjà ! Je trouve ça dingue de gagner une telle somme. Ça ne sert à rien. Des 100 millions d'euros des Tuche, je crois qu'ils en ont croqué un peu, en ont donné beaucoup et ça n’a rien changé en fait. Ils restent les mêmes. Ils vieillissent comme nous qui les jouons. C'est vraiment un bonheur de se retrouver. Les Tuche, c'est le kif en fait, il faudrait changer le mot 'Kif' en 'Tuche'.

Les Tuche se sont des petits enfants. Ils en ont la candeur, l'enthousiasme, l'avidité de dire leur amour et de le transmettre. Ils n'ont pas bougé. Ce sont les mêmes.

Isabelle Nanty

à franceinfo

Ce qui est fou, ce sont ces valeurs familiales. On les voit dans vos regards, que soit le vôtre ou celui de Jeff Tuche, on a le sentiment que vous êtes devenu des adultes, mais que vous avez gardé vos yeux d'enfant.

C'est la clé. Ce qui nous aide aussi beaucoup, c'est qu'on joue avec nos accents d'origine, l'accent de notre jeunesse et que ça nous remet immédiatement dans cet état de candeur, de non jugement. On était sans filtre, on était libres et ça fait du bien aux adultes qu'on est devenu de replonger dans cette enfance-là.

Il y a aussi toutes vos valeurs familiales dans Les Tuche. Papa, bûcheron, maman au foyer. Que vous ont transmis vos parents ?

Le respect, je crois. Ma mère était protestante, donc une espèce de sens de l'authenticité, de ne pas faire 'genre'. Et puis franchement dans la vie, atteindre une cohérence, ce n'est pas facile. Je pense qu'on met peut-être toute une vie à être totalement cohérent.

C'est compliqué d'être actrice, de faire un métier où on invente quelque chose quand même, en étant authentique, de faire le plus vrai possible.

Isabelle Nanty

à franceinfo

On sent d'ailleurs que vous avez vécu des moments un peu difficiles.

Ça m'est arrivé, ça ne m'a pas abîmé. Les coups m'ont rendu plus tendre, je crois, comme la viande ! La viande qu'on attendrie à coup de coups. Je suis toujours surprise quand les personnes s'endurcissent d'autant plus quand la chance finit par leur sourire. C'est bizarre.

Ce qui est étonnant, c'est que ce métier, cette carrière sont de vraies victoires sur la vie. Quand vous étiez petite, vous étiez touchée par la dyslexie et à cette époque, on ne la traitait pas réellement, c'était devenu un peu une honte.

Et en plus, j'étais dyscalculie, c'est-à-dire que quand vous me parlez de chiffres, je vais paniquer. C'est pour ça que souvent, je donnais des rendez-vous le 10 à 10 heures, le 11 à 11 heures, le 12 à 12 heures. On ne nous expliquait pas ce que c'était. Je suis allée chez une orthophoniste. Moi, je rêvais d'être actrice, je rêvais d'exprimer, de transformer mes douleurs, mais en fait, quand on est dyslexique et actrice, c'est pas si simple de prendre un accessoire, de marcher en même temps et de dire son texte et de penser à toutes les indications qui nous ont été dites.

Qu'est-ce qui fait alors que vous réussissez ?

J'ai des petites astuces. Je me suis fait des stratégies, comme on dit, mais je suis toujours dans la sensation de ne pas y arriver. En fait, c'est la décontraction et le non contrôle, enfin l'oubli qui fait qu'on y arrive. Et quand le metteur en scène me dit : "Ça c'est bon, je l'ai", je ne me souviens absolument pas de ce que j'ai fait. Donc, je suis toujours insatisfaite.

J'ai l'impression que grâce la troupe La Foliole qui jouait La cantatrice chauve d'Eugène Ionesco, vous êtes sortie de l'abstrait, que vous êtes rentrée dans le concret de votre vie, de ce que vous souhaitiez vraiment faire.

C'est justement la sensation d'être vivant. Jean-François Schaaff, le directeur de la troupe, est le premier à avoir posé un regard sur moi, comme l'ont fait plus tard Francis Huster, Jacques Weber, Alain Resnais, Étienne Chatiliez, Alain Chabat, Jean-Pierre Jeunet, Pierre-François Martin-Laval, Edouard Baer, qui ont été des gens qui m'ont juste regardée, qui m'ont laissée être portée par leurs regards.

C'est magique un regard, ça donne une force. Ça vous révèle et c'est ça qui est beau dans notre métier.

Isabelle Nanty

à franceinfo

J'ai un peu fait ce qu'on me disait parce que je suis polie, mais grâce à ma politesse, peut-être à ce que m'a inculqué mes parents, je ne suis pas passée à côté de choses. Gad Elmaleh, c'est lui qui est venu me demander de le mettre en scène, Julie Ferrier aussi. Ce sont eux qui m'ont sauvée. C'est eux qui ont fait ma vie. C'est tous les gens que j'ai rencontrés qui m'ont fait ma vie.

Je me demandais ce que vous avait apporté ce métier d'actrice...

Je ne fais pas tellement de différence entre ma manière de vivre et la manière dont je vis le métier. Ce que j'aime, c'est la vie et les gens, et je suis très heureuse.

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