Covid-19 : des hôpitaux à l'école, les absences pour maladie mettent à mal le fonctionnement de nombreux secteurs
La France enregistre plus de 150 000 cas de Covid-19 par jour, notamment en raison de la propagation rapide du variant Omicron. Cette flambée risque d'entraîner une vague d'arrêts maladie déstabilisante.
Le variant Omicron met de nombreux secteurs à l'épreuve, en raison des absences qu'il engendre, entre cas positifs et cas contacts. Son extrême contagiosité pourrait même entraîner une "désorganisation" du pays, prévenait le Conseil scientifique, le 23 décembre dernier. Depuis, le gouvernement a assoupli les règles d'isolement et tente de rassurer. "Il n'y a pas de risque de paralysie pour les entreprises. Nous avons pris toutes les mesures pour que la désorganisation soit la plus limitée possible", a assuré sur RTL Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, mardi 4 janvier.
La question reste suivie de près, alors que le pic épidémique n'est toujours pas atteint. La veille, lors d'une réunion interministérielle, Jean Castex a rappelé "l'importance d'assurer la continuité des services publics", selon les informations de franceinfo. Tour d'horizon des difficultés rencontrées dans les services publics et dans les entreprises.
Dans les transports
L'épidémie de Covid-19 perturbe le trafic de trains dans plusieurs régions de France. Environ 93% du trafic TER a été assuré lundi, a appris franceinfo auprès de la SNCF, mais 10% des trains ont été supprimés dans les Hauts-de-France. La circulation des TGV devrait être normale toute cette semaine, sans adaptation ni réduction de l'offre pour cause de conducteurs ou contrôleurs qui seraient positifs au Covid-19 ou cas contact. Des équipes de réserve sont par ailleurs mobilisables, en cas de besoin, pour les TGV.
Les transports publics sont également touchés plus localement. Dans l'agglomération de Strasbourg, la compagnie CTS a dû adapter son plan de transports, selon France Bleu Alsace. Le nombre de cas de Covid-19 et de cas contact chez les chauffeurs a explosé : 160 chauffeurs étaient absents lundi, obligeant la compagnie à prévoir une offre réduite de 10% par rapport à la normale.
L'épidémie perturbe aussi les transports scolaires. Selon le président de la Région Grand Est, Jean Rottner, lundi, il manquait ainsi 177 chauffeurs de bus en Moselle. Certaines lignes scolaires doivent être modifiées.
Dans l'Education nationale
Le 23 décembre, le Conseil scientifique a estimé qu'un tiers des enseignants "au moins" pourraient être touchés par le Covid-19 d'ici à la fin janvier, de manière "directe" en étant cas positif, ou "indirecte" en étant cas contact. Comment faire fonctionner l'école si un tiers des 866 000 enseignants venaient à manquer ? Désormais, les enseignants pourront toujours assurer leurs cours s'ils sont cas contact, à condition d'être vaccinés. Mais cela pourrait être insuffisant.
Certains rectorats font déjà appel à des enseignants retraités depuis plusieurs semaines et le mouvement devrait s'accélérer. Le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, dit observer "avec plaisir" cet engagement, dans un entretien au Parisien. A titre d'exemple, Hélène Insel, rectrice de l'académie de Grenoble (Isère), explique dans Le Dauphiné Libéré avoir identifié des candidats potentiels. "Nous allons les contacter pour savoir s'ils acceptent d'être volontaires", précise-t-elle, et ils "seront rémunérés, évidemment". Dans toute la France, des formations continues seront également décalées, afin de ménager les effectifs, et des contractuels et vacataires seront recrutés.
Mais Rodrigo Arenas, coprésident de la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE), pense qu'il y aura immanquablement des trous dans le calendrier. "Le manque de personnel éducatif pourrait conduire des élèves à rester chez eux pendant deux semaines", déclare-t-il au Figaro.
Dans les hôpitaux
Des inquiétudes, là encore. "Ça va tanguer" en janvier, a averti Martin Hirsch, directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), dans un récent entretien aux Echos. "Le taux d'absentéisme augmente fortement, avec des arrêts maladie qui se multiplient et aucune équipe complète", expliquait-il, ajoutant qu'au Royaume-Uni, où la vague Omicron a débuté plus tôt, 25% de soignants avaient été arrêtés, contre 11% lors de la première vague de Covid-19. Pour ne rien arranger, les établissements parisiens débutent l'année "avec plus de postes vacants". Selon Martin Hirsch, c'est "un peu comme si Omicron menaçait de retirer 1 000 à 1 500 infirmiers de nos établissements – sachant qu'il en manque déjà autant".
La situation est difficile sur tout le territoire. "Pour l'instant, on gère en rappelant ceux qui sont en repos ou en congé mais à terme on risque de fermer des lits", déplore Christophe Bouriat, directeur de l'hôpital de Tarbes et Lourdes (Hautes-Pyrénées), interrogé par France Bleu Béarn Bigorre. Et le taux d'absence atteint déjà 10% du personnel à l'hôpital de Perpignan (Pyrénées-Orientales), rapporte L'Indépendant, soit 300 arrêts sur 3 000 agents. "Nous tournons grâce à la mobilisation des agents en heures supplémentaires et au renfort de ressources humaines de toute la région mis en place par l'Agence régionale de santé", explique au quotidien la DRH, Audrey Paniego.
Les conséquences sont donc bien réelles dans les services, déjà confrontés à des difficultés de personnel. Pour tenter de maintenir à flot l'hôpital, une nouvelle règle nationale prévoit que les soignants atteints du Covid-19 puissent continuer à travailler, à condition d'être peu ou pas symptomatiques. Celle-ci est appliquée en priorité dans les services Covid-19, auprès de patients déjà contaminés.
Dans l'énergie, l'eau et la gestion des déchets
EDF assure qu'"à l'heure actuelle, les activités industrielles et de service public se poursuivent sur tous les sites de production". Le producteur d'électricité se dit par ailleurs préparé à renforcer son plan de continuité d'activité (PCA) si nécessaire. "Ce dispositif renforcé prévoit une continuité d'activité pendant 12 semaines avec un effectif réduit, tout en assurant l'approvisionnement et la sûreté", a souligné un porte-parole.
Les entreprises de gestion de l'eau et des déchets se disent également armées face au défi du nouveau variant. "Nous sommes en mesure de poursuivre l'ensemble de nos activités sans difficultés majeures et assurer la santé et la sécurité de nos salariés grâce à un plan de continuité d'activité adapté depuis le début de la crise sanitaire", explique-t-on ainsi chez Veolia. Le groupe a notamment adapté le travail dans la collecte des déchets pour minimiser les contacts, tandis que des tâches non urgentes ont été reportées dans le domaine de l'eau.
Chez Suez, on ne note pas d'explosion des arrêts pour maladie et les plans de continuité d'activité n'ont pas été activés. "Dans les activités opérationnelles comme la collecte, le recours à l'intérim et le redéploiement de personnel, comme déjà fait en 2020, permet de maintenir les services".
Dans les entreprises
La situation est encore difficile à évaluer. "En discutant avec des collègues DRH, personne ne constate d'effet majeur sur l'absentéisme et personne ne m'a parlé d'une entreprise contrainte de baisser sa production", explique Benoît Serre, vice-président de l'Association nationale des directeurs de ressources humaines (ANDRH) et DRH de L'Oréal. Mais la situation reste sous surveillance, notamment dans les sociétés de taille plus modeste. "Les cas contact et les cas positifs font que l'on perd de la main-d'œuvre", soulignait à la veille de Noël Jean-Christophe Repon, président de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb). "Le réservoir est maigre" pour compenser ces absences. "L'artisanat utilise peu l'intérim, on est plutôt sur des emplois de longue durée et sur l'apprentissage."
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.