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"Gâchis", "hypocrisie", "le début de la cicatrisation"... Les réactions après la mort de Vincent Lambert

Vincent Lambert est mort, jeudi, neuf jours après l'arrêt des traitements. 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
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Le CHU de Reims (Marne), en juillet 2019. (REMI WAFFLART / MAXPPP)

Vincent Lambert est mort jeudi 11 juillet, neuf jours après l'arrêt de ses traitements, au CHU de Reims. Devenu symbole du débat sur la fin de vie, régie par la loi Leonetti-Claeys en France, ce patient tétraplégique âgé de 42 ans se trouvait dans un état végétatif depuis onze ans après un accident de la route. Depuis l'annonce de son décès, les réactions de proches et de spécialistes de la santé se succèdent sur franceinfo. 

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Eric Kariger : "Vincent Lambert a été entendu"

Vincent Lambert "a été entendu dans sa singularité", estime le docteur Eric Kariger, son ancien médecin. "Vivre, pour M. Vincent Lambert, ce n'était pas avoir un cœur qui bat ou une respiration spontanée, c'était être en relation, marcher dans la forêt, voir la mer, sentir le vent, être libre." Eric Kariger, qui s'est occupé de Vincent Lambert jusqu'en 2014 et avait déjà décidé d'interrompre les soins en 2013, "salue toutes celles et ceux qui ont su le respecter en s'appuyant sur les valeurs humanistes, déontologiques et juridiques de notre pays". Le médecin adresse "ses sincères condoléances" à la famille de Vincent Lambert.

Me Gérard Chemla : "On arrive au bout d'une douloureuse époque"

Gérard Chemla, l'avocat du neveu de Vincent Lambert, François, estime qu'on "arrive au bout d'une douloureuse époque". Vincent Lambert était au cœur d'un conflit familial entre ses parents, opposés à un arrêt des soins, et son épouse, Rachel, favorable à cet arrêt. Les parents du patient s'étaient résignés, lundi 8 juillet, en déclarant ne plus entamer aucun recours judiciaire. "On a malheureusement très vite oublié la personne pour se retrouver en face d'un clivage entre ceux qui voulaient le maintien du fonctionnement du corps à tout prix et ceux qui considéraient qu'il fallait savoir laisser partir quelqu'un qui était arrivé au bout de ce que la science pouvait faire pour lui, dans un état de conscience disparu."

Israël Nisand : "On est dans l'hypocrisie la plus totale"

Le professeur Israël Nisand, président du Forum européen de la bioéthique, dénonce "l'hypocrisie la plus totale" induite par la loi Clayes-Leonetti, qui interdit l'euthanasie mais prévoit une "sédation profonde et continue jusqu'au décès". Israël Nisand ne "voit pas l'avantage moral qu'il y a à mourir lentement plutôt que vite". "Faire mourir d’insuffisance rénale au lieu de faire mourir d’une anesthésie générale, franchement, où est la différence ? Où est la valeur morale de faire mourir lentement quelqu’un au lieu de mettre au service de cette personne les moyens habituels dont on dispose pour que la mort soit rapide ?", s'interroge Israël Nisand. 

Alain Claeys : "Le débat sur la loi viendra après"

Alain Claeys, ancien député PS, est le co-auteur d'une loi sur la fin de vie avec Jean Leonetti en 2016. "Le débat sur la loi viendra après", défend-il. "Une loi ne règle pas tous les sujets. Chaque fin de vie est unique, spécifique. Le législateur ne peut pas se mettre à la place de la communauté médicale, du patient, de la famille. Il offre un cadre juridique pour que l'autonomie de la personne s'exprime au mieux, et puisse dire : voilà ce que je souhaite. C'est tout ça, mais ça n'est que ça." Alain Claeys rappelle la nécessité de définir des directives anticipées auprès de son médecin traitant, pour "éviter que la famille ne se retrouve dans une situation extrêmement difficile". L'absence de ces directives ont, selon lui, "constitué toute l'histoire tragique de Vincent Lambert". "Une loi, c'est un cadre législatif. Pour que cette loi vive, il faut que nos concitoyens s'en saisissent, se l'approprient."

Jean-Luc Romero : "On ne peut pas laisser les gens agoniser à petit feu"

"On ne peut penser qu'à Vincent Lambert parce qu'il n'a souhaité être le symbole de rien du tout. Il a vécu indirectement une affaire terrible", estime Jean-Luc Romero, conseiller régional d’Île-de-France et président de l'Association pour le droit à mourir dans la dignité. "Onze ans c'est un gâchis, une situation comme celle-là n'aurait jamais dû arriver. Il faut d’urgence que le législateur change [la loi Claeys-Leonetti] pour dire qui décide. Si on avait dit clairement dans la loi : c’est l’épouse, le mari, le conjoint qui décide, il n’y aurait pas d’affaire Vincent Lambert parce que les parents n’auraient pas pu s’opposer à la décision de l’épouse." 

"On ne peut pas laisser les gens agoniser à petit feu, dénonce Jean-Luc Romero. En quoi ce serait plus scandaleux de permettre à la personne de partir en quelques minutes, entourée des siens, plutôt que l’obliger à agoniser pendant des semaines ?" Il pointe "une vraie hypocrisie d’endormir des gens qui ne vont jamais se réveiller, et puis d'arrêter de les alimenter et de les hydrater pour attendre que ça se passe mal au niveau des reins..."

Olivier Véran : "L'histoire de Vincent Lambert laissera des traces"

Olivier Véran, député LREM de l'Isère et médecin hospitalier, retient "l'histoire d'un homme" qui a une particularité : les questions autour de sa fin de vie ont été posées "à découvert". "Un grand débat public a traversé la société pendant des années sur ce qu'est la fin de vie." Il estime que cette histoire "laissera des traces, c'est une histoire qui a beaucoup parlé aux Français, aux familles, qui a occasionné des débats, des échanges".  Il espère que la mort de Vincent Lambert est "le début de la cicatrisation et de la réconciliation pour une famille qui s’est déchirée pendant des années".

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