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Procès Bonnemaison : a-t-il eu l'intention de donner la mort?

Ce vendredi, c'est l'heure du réquisitoire et des plaidoiries des parties civiles et de la défense au procès en appel de Nicolas Bonnemaison aux assises d'Angers. Le verdict est attendu samedi dans la journée. Mais une question reste au coeur des débats: Nicolas Bonnemaison a-t-il voulu soulager ses patients ou a-t-il eu l'intention de donner la mort ?
Article rédigé par Delphine Gotchaux
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (Nicolas Bonnemaison, aux tribunal d'Angers, jeudi 22 octobre © MaxPPP)

La question de l’intention homicide, l’intention de tuer, c’est le nœud de ce dossier, rejugé par les assises du Maine-et-Loir ces deux dernières semaines. En d’autre terme, jusqu’où faut-il aller pour soulager ? Un nœud qui n’a cessé au fil de l’audience de se serrer ou de se défaire, selon les témoins entendus à la barre. 

Nicolas Bonnemaison dit avoir "voulu soulager"

L’urgentiste n’a cessé de le marteler tout au long des débats : "Je n’ai jamais, jamais eu l’intention de mettre fin aux jours de mes patients, j’ai toujours voulu soulager leurs souffrances" . Les médecins de renom qui sont venus témoigner ont été quasiment tous dans le même sens. Ils ont dit leur désarroi face à la fin de vie, l’impossibilité de s’habituer au dernier souffle, à l’ultime agonie.

 "L’idée de soulager la douleur prime sur tout en fin de vie, quitte à abréger la vie " a par exemple rappelé Jean-Claude Ameisen, le président du comité consultatif national d’éthique. "J’ai franchi moi aussi la ligne jaune" , a revendiqué jeudi Frédéric Chaussoy, c’est le médecin qui a aidé à mourir Vincent Humbert en 2003, ce jeune tétraplégique. "Ce n’était pas pour tuer mon patient, explique le docteur Chaussoy mais pour le soulager, l’apaiser, comme moi, le docteur Bonnemaison n’est pas un assassin". Mis en examen pour empoisonnement avec préméditation, il a finalement bénéficié d’un non-lieu. Et il ne comprend pas que son confrère soit aujourd’hui dans le box des accusés.

"Il y a, je crois, injustice. Moi je ne suis pas allé aux assises" Frédéric Chaussoy

Des médecins et soignants plus critiques

Ils ont été plusieurs à prendre leur distance avec les actes du l'ex-urgentiste de Bayonne. D'abord la semaine dernière Régis Aubry, spécialiste des soins palliatifs :"Toute fin de vie doit faire l’objet d’une discussion. On ne peut pas décider seul, explique t-il, ça serait arbitraire. C’est peut-être nous que nous essayons de sédater ou notre propre angoisse."

 Mercredi Jean Leonetti, qui a donné son nom à la loi de 2005 sur la fin de vie, n’a pas dit autre chose en évoquant la "compassion fusionnelle " de Nicolas Bonnemaison. Une "décision collégiale protège tout le monde, a rappelé le député-maire d'Antibes, le médecin, l’équipe, la famille, le patient".

Car ce qui a été aussi beaucoup débattu pendant ces 15 jours, c’est l’absence de dialogue du docteur Bonnemaison avec les familles et avec le personnel soignant. Pour Nathalie, l’une des infirmières de Bayonne qui a alerté la direction sur le comportement de l’urgentiste, il n’a pas voulu soulager les patients, bien au contraire. 

"Je maintiens [...] que pour moi, l'intention de donner la mort est claire" Nathalie, infirmière de Bayonne

Le vent souffle dans le sens du docteur Bonnemaison

La majorité des familles le soutient, comme de nombreux collègues. Nicolas Bonnemaison a même reçu vendredi un soutien inattendu, celui du psychiatre réputé Roland Coutanceau, qui l’a expertisé. Selon lui, Nicolas Bonnemaison a agi comme un médecin qui voulait abréger des souffrances, sans intention de tuer. A Pau l’année dernière, la justice avait estimé qu’il n’avait pas eu l’intention de tuer et l’avait acquitté. Les réquisitions sont en tout cas attendues ce vendredi et le verdict samedi dans la journée.

Mais la sanction sociale, Nicolas Bonnemaison l’a déjà : il a été radié par le conseil de l’ordre qui estime qu’il a commis une faute déontologique.

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