"Je me désolidarise, il faut que la vérité sorte !" : au procès des attentats de janvier 2015, les accusés entre provocation et prise de conscience
Au terme d'une semaine marquée par les témoignages des victimes, les accusés du procès des attentats de janvier 2015 ont salué vendredi le "courage" et la "dignité" des survivants de la tuerie, suscitant des réactions contrastées chez les parties civiles.
Toute la semaine, les survivants et les proches des victimes de Charlie Hebdo ont pris longuement la parole devant les juges, après les terribles images de la scène de crime projetées lundi, au procès des attentats de janvier 2015.
Vendredi 11 septembre, face au mouvement d'humeur du principal accusé, Ali Riza Polat, proche d'Amedy Coulibaly, le tueur de l'Hyper Cacher, le président de la cour a, dans un moment unique en cour d'assises spéciale, donné la parole aux accusés pour qu'ils livrent leur ressenti. Un à un, ils se lèvent dans le box, racontent les émotions qui les ont traversés. "Ça a été une semaine bouleversante, dit Nezar Mickaël Pastor Alwatik. C'était très fort, et surtout un choc. J'aimerais dire aux victimes qu'elles ont eu beaucoup de courage de venir témoigner, nous faire part de leur ressenti." "Je ne m'attendais pas à un procès comme ça, j'ai été très touché." Les uns et les autres se confient devant la cour, unanimes.
"Pas de pardon pour ces gens-là !"
"Après six ans, les familles souffrent toujours, s'énerve Metin Karasular, poursuivi pour trafic d'armes. Je connaissais Coulibaly, si j'avais su qu'il allait faire ça, je l'aurais dénoncé à la police. Je suis musulman, je ne comprends pas qu'on puisse tuer au nom de Dieu. Ça ne rentre pas dans ma tête. Il n'y a pas de pardon pour ces gens-là !"
Ali Riza Polat, seul des 11 accusés présents à l'audience à être poursuivi pour "complicité" de crimes terroristes, s'excuse même pour son comportement depuis le début du procès, après s'être plusieurs fois emporté pour clamer son innocence : "Je me désolidarise de ce qu'ils ont fait, les trois [Amedy Coulibaly, Saïd et Cherif Kouachi], il faut que la vérité sorte."
Moi je ne connaissais pas les dessinateurs de Charlie Hebdo, et notamment les dessins de Charb. Je les ai vus... Je ne pensais pas que j'allais rire pendant ce procès.
Nezar Mickaël Pastor Alwatik, accusé
Dans le box, ils sont nombreux à dire qu'ils ne connaissaient pas Charlie Hebdo : "Ça a parlé du Club Dorothée et je me souviens de quelqu'un qui dessinait, ça devait être Cabu", lance Amar Ramdani, lui aussi soupçonné de trafic d'arme. Dans les années 1980, Cabu faisait effectivement partie de l'équipe de cette émission pour les enfants sur Antenne 2, tout en dessinant, déjà, pour Charlie Hebdo. "Personne sur Terre ne peut être assassiné, encore moins pour des dessins", soupire Nezar Mickaël Pastor Alwatik, dont l'ADN a été retrouvé sur un gant saisi à l'Hyper Cacher.
Dans la salle, des avocats des parties civiles disent leur malaise, dénoncent l'indécence des accusés. "Dans un procès tout le monde a droit à la parole", réplique sèchement la défense.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.