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Pédocriminalité dans l'Eglise : les premières indemnisations de victimes interviendront "d'ici fin juin"

Marie Derain de Vaucresson, présidente de l'Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation, précise sur franceinfo que cette "réparation financière" s'élèvera jusqu'à 60 000 euros pour chaque personne abusée par un prêtre.

Article rédigé par franceinfo
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Marie Derain de Vaucresson, présidente de l'Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (Inirr), le 24 février 2022.  (ALAIN JOCARD / AFP)

Les victimes de pédocriminalité dans l'Eglise seront indemnisées à hauteur de 60 000 euros maximum, a appris franceinfo mercredi 1er juin, auprès de l'Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (Inirr) qui a fixé ce plafond. Sa présidente, Marie Derain de Vaucresson, a estimé que "les toutes premières déclarations", arrivées courant janvier, recevront "une réparation financière d'ici fin juin".

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Elle a par ailleurs rappelé la nécessité d'informer les victimes de l'existence de cette indemnité tout en considérant que la systématiser "n'a pas de sens". "La réparation financière ne permettra jamais une réparation intégrale, les autres démarches sont importantes, à commencer par la reconnaissance de ce qu'il s'est passé et du statut de victime", a-t-elle poursuivi.

Comment expliquer que 736 victimes se sont adressées à vous alors que la commission Sauvé a identifié 216 000 victimes d'abus sexuels au sein de l'Eglise catholique en France ?

Certainement qu'on n'a pas encore été identifié par l'ensemble des victimes. Les démarches de communication sont, pour cela, nécessaires. Ensuite, il y a peut-être une explication à trouver dans le fait que les personnes victimes, dans leurs démarches, se sont senties mal accompagnées pendant longtemps par l'Eglise et il y a encore peut-être quelque chose de l'ordre de la défiance avec des barrières que l'on doit réussir à faire tomber pour que ces personnes osent s'adresser à nous. Mais chacun a son chemin, sa temporalité, il faut le respecter. On peut les aider à avancer sur ce chemin par une réparation, quelle qu'en soit la nature, j'en suis convaincue.

La réparation ne pourra pas excéder 60 000 euros, faut-il la systématiser comme le demandent certaines associations ?

La systématicité de la réparation, ce n'est pas l'esprit de la justice réparative. La systématicité n'a pas de sens. C'est une manière d'engager l'Eglise du point de vue de sa responsabilité. Mais du point de vue des victimes, l'effet restera assez limité. Si la question est "est-ce qu'on se donne les moyens d'atteindre chaque personne et d'engager un chemin avec elle ?", on peut envisager de multiplier la manière de les rejoindre et s'appuyer sur les collectifs de victimes. On va le faire. Le 14 juin, on a une rencontre avec l'ensemble des collectifs de victimes repérées pour pouvoir expliciter la démarche et permettre aux personnes d'être suffisamment en confiance pour l'engager. Mais la réparation financière ne permettra jamais une réparation intégrale et elle ne sera jamais au niveau de ce qu'ont vécu les personnes, donc les autres démarches sont importantes, à commencer par la reconnaissance de ce qu'il s'est passé et du statut de victime.

Comment l'Eglise a-t-elle réagi ?

L'Eglise s'est engagée sur ce chemin en créant un fonds de dotation. Je n'ai observé aucune réserve sur notre démarche. C'est un axe important, c'est une vraie manière d'assumer la responsabilité et ce plafond de 60 000 euros est conséquent. Par ailleurs, l'évaluation des faits se base d'abord sur le récit de la personne victime et ensuite sur la confirmation de la vraisemblance de ces faits. On dit à la personne victime que l'on considère que ce qu'elle dit est exact et après on demande confirmation auprès des responsables ecclésiaux, du diocèse ou de l'enseignement catholique et, en réalité, les récits sont automatiquement confirmés, y compris dans ce qu'a fait ou n'a pas fait l'Eglise et en particulier ce qu'elle n'a pas fait jusqu'aux années 2000 et plus récemment.

Ce sera bien du cas par cas ?

C'est exactement du cas par cas. Le travail est engagé depuis janvier. Neuf référents de situation sont déjà en relation avec 123 personnes victimes. Ils les accompagnent dans cette démarche de compréhension de ce qu'il s'est passé, de la gravité de la situation. On essaie au maximum d'éviter de réactiver des psycho-traumatismes, on évite de leur faire répéter les choses. On s'appuie sur ce qui a pu être écrit par ces personnes à la Ciase, au diocèse, aux cellules d'écoute, pour ne pas les confronter à de nouvelles difficultés. On n'est pas encore allé au bout des premières démarches mais on imagine que ça nous prendra trois à six mois pour répondre aux personnes victimes. Les toutes premières déclarations qui sont arrivées courant janvier vont pouvoir recevoir une réparation financière d'ici fin juin. On est dans ce délais-là de 5/6 mois. On imagine que le rythme pourra s'accélérer quand les choses seront stabilisées.

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