Rapport Sauvé : un appel aux dons pour indemniser les victimes est exclu pour l'archevêque de Strasbourg car "ce serait très mal pris"
Les évêques français vont réfléchir, à partir de mardi, aux suites du rapport de la Commission Sauvé sur les violences sexuelles dans l'Eglise et notamment sur la question de l'indemnisation des victimes.
Faire un appel aux dons pour indemniser les victimes de viols ou d'agressions sexuelles de la part de prêtres est exclu pour l'archevêque de Strasbourg. "Ce serait très mal pris, ça n'aurait pas de sens", a affirmé monseigneur Luc Ravel, mardi 2 novembre sur franceinfo. Le rapport de la Commission Sauvé sur les violences sexuelles dans l'Église a été publié le 5 octobre dernier. Les suites de ce rapport doivent être discutées cette semaine à Lourdes, lors de l'assemblée plénière de la Conférence des évêques de France.
franceinfo : S'agit-il de reconnaître la responsabilité de l'Eglise dans les faits de viols et d'agressions sexuelles, lors de l'assemblée plénière de la Conférence des évêques de France ?
Luc Ravel : Je crois qu'on nous invite, on nous presse - aussi bien les victimes que la Commission - de reconnaître notre responsabilité avec évidemment toutes les conséquences qui vont avec parce que le rapport de la Commission Sauvé parle d'une responsabilité civile qui engage des indemnisations, une responsabilité sociale qui engage aussi un accompagnement. Il y a des personnes en grande difficulté et puis une responsabilité systémique de l'Église.
Ce mot est peut-être un peu lourd, il signifie que ce n'était pas systématique mais que nous avions mis en place dans l'Église un système en particulier pour verrouiller la parole. Il nous est demandé aujourd'hui de reconnaître cette responsabilité. Personnellement je souhaite qu'on y aille sans recul, sans bémol.
Les évêques sont-ils partagés à ce sujet ?
Si je m'en tiens à la discussion du mois de mars de cette année, avant le rapport de la Commission Sauvé, il est sûr que nous étions coupés en deux. Il y avait deux positions. Une qui disait que oui, bien sûr, il y avait une responsabilité des auteurs, que personne ne le niait, et qu'on allait faire en sorte que cela ne se reproduise plus. Et puis l'autre position qui disait qu'il fallait aller jusqu'au bout de cette reconnaissance parce que c'est l'esprit sain qui appelle aujourd'hui à prendre en charge totalement les victimes à travers la reconnaissance de ces responsabilités civile, sociale et systémique.
Un calendrier d'indemnisation des victimes va-t-il être défini pendant cette assemblée ?
Les victimes demandent des choses concrètes. J'en ai entendu une centaine. Leur premier mouvement est d'abord d'être reconnues réellement comme des victimes de l'Église. Parfois, les faits sont très anciens donc elles peinent à se souvenir précisément de ce qui leur est arrivé. Mais il faut leur dire qu'elles sont réellement des victimes, que ça produit en elle des chocs qui les détruit pendant 50 à 60 ans.
D'abord, elles attendent de l'écoute et éventuellement, mais pas toutes, un accompagnement dans le temps. Vraiment, il y aura aussi je pense des discussions qui vont avec la question de la responsabilité, ce sont les deux faces d'une même pièce : si je reconnais que je suis responsable, je dois aussi m'engager sur un chemin d'indemnisation.
Ecartez-vous l'hypothèse de faire un appel aux dons pour financer l'indemnisation des victimes ?
Oui complètement. Ce n'est pas à moi de prendre la décision, nous ne sommes encore qu'au début donc les décisions seront prises dans les prochains jours, mais il me semble que ce serait très mal pris, très mal vécu, ça n'aurait pas de sens. Du reste, les laïcs eux-mêmes, le peuple de Dieu, étaient extraordinairement réticents à cet appel. Je crois que tous les feux sont rouges pour aller dans ce sens donc il faut trouver de l'argent autrement.
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