Rétrogradation des Girondins de Bordeaux : de la Ligue 1 au National, chronique d'une descente aux enfers

Rétrogradés par la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) en National, les Girondins de Bordeaux luttent désormais pour leur survie, après avoir vécu une descente aux enfers depuis six ans.
Article rédigé par Anna Carreau
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6 min
Le président des Girondins de Bordeaux, Gérard Lopez, en conférence de presse le 7 juillet 2022 au centre d'entraînement du club. (THIBAUD MORITZ / AFP)

Chronique d'une dégringolade. Rétrogradés administrativement en National par la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) après avoir renoncé à faire appel de la première décision, mardi 23 juillet, les Girondins de Bordeaux craignent même une potentielle liquidation du club, si son propriétaire, Gérard Lopez, ne parvient pas à réunir les fonds suffisants pour se relancer au troisième échelon du foot français. Le club bordelais, qui a pourtant disputé 69 saisons au sein de l'élite tricolore, voit désormais son avenir s'écrire en pointillés.

27 juillet 2018 : les Girondins passent sous pavillon américain

Le point de départ de cette chute aux enfers se situe le 27 juillet 2018, lorsque M6, propriétaire du club depuis 1999, décide de se débarrasser des Girondins de Bordeaux en raison de résultats sportifs, et surtout économiques, en berne. Un fonds d'investissement américain, General American Capital Partners (GACP), épaulé par le puissant King Street, prend la tête du club, mais pour une courte période seulement, ne postulant que sur le seul intérêt financier.

Un an plus tard, les Girondins de Bordeaux terminent la saison 2018-19 avec deux changements d'entraîneur en cours d'exercice et une 14e place, plus mauvais classement depuis 2005. Les deux saisons suivantes, les Bordelais terminent 12es, malgré certains efforts financiers des propriétaires américains, qui recrutent Rémi Oudin, Laurent Koscielny, ou encore Mexer. Mais la crise du Covid-19 va définitivement enterrer les ambitions du fonds américain, qui, en plus d'entamer une politique d'austérité pour réduire le déficit, annonce le 22 avril 2021 qu'il "ne souhaite plus soutenir le club et financer ses besoins actuels et futurs". Les Girondins sont alors placés sous la protection du tribunal de commerce, avec un déficit avoisinant les 67 millions d’euros.

23 juillet 2021 : Gérard Lopez rachète le club in extremis

Cette décision entraîne une première rétrogradation administrative en Ligue 2 par la DNCG, dans l'attente de l'étude des six projets de reprise. Le club fait alors appel et obtient un délai supplémentaire pour permettre à Gérad Lopez, ancien dirigeant de Lille et de l'écurie de Formule 1 Lotus, de finaliser son rachat. Les Girondins de Bordeaux restent tout de même encadrés au niveau de la masse salariale et des transferts. L'entrepreneur hispano-luxembourgeois assure viser le haut de tableau, voire les places européennes, d'ici trois saisons, comme il l'annonçait à Sud Ouest.

21 mai 2022 : les Girondins sont relégués en Ligue 2

Le projet bordelais ne se passe pas vraiment comme prévu et la saison 2021-2022 s'avère même catastrophique. Les Girondins encaissent notamment 91 buts en 38 matchs, pire total d’un club de première division depuis 1978. Ils terminent logiquement 20es et derniers de Ligue 1 et sont relégués pour la première fois depuis 1991. Lors de cette saison cauchemar, le club aura même perdu sa série d'invincibilité longue de 44 ans contre l'Olympique de Marseille, à domicile, après une défaite sur le score de 0-1. 

14 juin 2022 : la DNCG envoie le club en National une première fois

Au-delà du classement sportif, la Direction nationale du contrôle de gestion du football français décide même de rétrograder administrativement les Girondins de Bordeaux en National, en raison d'une dette estimée à 52 millions d'euros. Malgré plusieurs manœuvres financières pour convaincre le gendarme financier du maintien en Ligue 2, l'instance maintient sa décision le 5 juillet suivant. 

A l'époque, le club passe déjà tout près d'une disparition, la situation financière trop critique pouvant mener vers une cessation de paiement dès juillet 2022. Sur le point de déposer le bilan, et donc de voir le club rétrogradé en National 3, Gérard Lopez fait appel auprès du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et obtient gain de cause, notamment après la vente du jeune attaquant Sékou Mara contre 13 millions d'euros à Southampton. La DNCG prononcera tout de même l'encadrement de la masse salariale et des indemnités de transfert, mettant en péril l'arrivée des neufs recrues annoncées par le président. 

2 juin 2023 : Bordeaux manque la montée en Ligue 1 après l'incident face à Rodez

En Ligue 2 avec une masse salariale passée de 30 millions à 11 millions d'euros en l'espace d'un été, les Girondins de Bordeaux réussissent à performer, malgré un contexte extrasportif très compliqué. En fin de saison, le club est même bien positionné pour retrouver l'élite avec un dernier match à jouer face à Rodez pour acter ou non sa montée. Mais un individu présent dans les tribunes du Matmut Atlantique ce soir du 2 juin 2023 s'en prend physiquement à Lucas Buades, attaquant du RAF qui venait d'ouvrir le score, entraînant l'arrêt définitif de la rencontre.

La commission de discipline de la Ligue professionnelle de football sanctionne les Bordelais de la perte par pénalité de la rencontre, mettant fin aux espoirs de retour en Ligue 1. Cette fois, le recours auprès du CNOSF ne change rien. Gérard Lopez est même contraint de renflouer lui-même les caisses du club, endetté à hauteur de 40 millions d'euros, afin d'assurer l'avenir du club en Ligue 2.

9 juillet 2024 : nouvelle rétrogradation financière et crainte d'une disparition

Un an plus tard, les Girondins de Bordeaux ont toujours un trou de 40 millions d'euros dans leurs comptes et font même pire niveau sportif, puisqu'ils terminent 13es de Ligue 2, à l'issue de la saison 2023-24, après avoir assuré leur maintien à deux journées de la fin de la saison. La DNCG statue de nouveau sur une relégation administrative en National, faute de garanties financières. Le club bordelais fait appel de cette décision, espérant gagner du temps pour finaliser son rachat par le groupe américain Fenway Sports Group. Le groupe propriétaire de Liverpool annonce finalement qu'il se retire des négociations le 16 juillet.

Gérard Lopez confie alors que les Girondins de Bordeaux sont dans "une situation critique" et évoque la possibilité d'une "liquidation" et donc d'une "disparition du club". Tout en assurant "tout faire pour l'éviter", même s'il ne souhaite pas réinvestir pour combler les 42 millions d'euros (hors transferts) manquants pour repartir en Ligue 2. Les autres scénarios sur la table vont d'un "partenaire de dernière minute" capable de mettre les moyens pour racheter le club à la rétrogradation sportive (pourquoi pas en National 2) pour repartir sur des bases plus saines.

23 juillet : Bordeaux renonce à son appel devant la DNCG et accepte la rétrogradation en National 1

Alors que le club devait voir son appel examiné par la DNCG mardi 23 juillet, il annonce dans un communiqué y avoir renoncé du fait de "l'absence d'éléments nouveaux". Les discussions, qui avaient repris avec Fenway Sports Group, ont de nouveau été stoppées la veille.

"En conséquence, le FC Girondins de Bordeaux accepte la sanction de rétrogradation administrative au sein du championnat de National 1 pour la saison 2024-2025 et sera à nouveau convoqué pour présenter son budget devant la DNCG", précise le communiqué du club.

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