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Budget 2024 : entre économies et hausses d'impôts, ce que prépare le gouvernement pour réduire les dépenses publiques

Article rédigé par Mathilde Goupil
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, et le ministre délégué chargé des Comptes publics, Thomas Cazenave, à l'Elysée à Paris, le 21 juillet 2023. (BERTRAND GUAY / AFP)
Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, rappelle volontiers que la France fera des économies l'an prochain. Pour y parvenir, l'exécutif prépare des coupes dans la politique de l'emploi et de santé ainsi qu'un verdissement de la fiscalité.

Après des semaines de réflexion, de ballons d'essai lancés dans la presse et de réunions avec les parlementaires de l'opposition, le projet de budget de l'Etat et de la Sécurité sociale pour 2024 sera connu le 27 septembre. Cet été, Gabriel Attal, alors ministre délégué chargé des Comptes publics, le résumait en deux mots aux Echos : "désendettement vert". En clair, l'idée est de dépenser moins, pour réduire le déficit et la dette record, contraires aux engagements européens de la France. Mais aussi réinvestir une partie de ces économies, notamment dans la transition écologique.

Pour atteindre ces objectifs, le budget 2024 comportera environ 16 milliards d'euros d'économies, a ainsi promis le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire. Celles-ci concerneront en priorité les dépenses de santé, la politique de l'emploi et le verdissement de la fiscalité, a-t-il prévenu lors des Assises des finances publiques, en juin. Mais, au regard de la hausse d'autres dépenses (transition écologique, éducation nationale, défense, etc.), la baisse des dépenses publiques devrait plutôt se situer autour de quatre milliards d'euros, à en croire un document transmis au Parlement mi-juillet.

En somme, un budget "loin d'un choc d'austérité" et qui relève davantage de "l'exercice d'équilibriste" entre "réduire un peu le déficit" et "soutenir le pouvoir d'achat et l'activité", analyse Sylvain Bersinger, chef économiste du cabinet Asterès. Franceinfo dresse la liste des mesures confirmées, ou fortement envisagées, pour boucler les comptes de 2024.

Des dépenses freinées par la fin des mesures d'aide exceptionnelles

Pour avoir de l'argent, une solution est d'abord... de ne pas en dépenser. La fin progressive du bouclier tarifaire sur les prix du gaz et de l'électricité et l'absence de ristournes sur les prix des carburants devraient permettre à l'Etat d'économiser environ 10 milliards d'euros en 2024 par rapport à 2023, prédit Bercy. La fin des aides exceptionnelles aux entreprises en raison de l'inflation (près de 25 milliards d'euros dépensés entre 2022 et 2023, selon la Cour des comptes) et la sortie progressive du plan de relance (100 milliards d'euros sur trois ans) allègeront aussi la colonne des dépenses.

Toutes ces économies "mécaniques", liées au reflux des crises sanitaire et énergétique, viennent s'ajouter à la baisse des dépenses de dix milliards d'euros promises par Bruno Le Maire, a appris franceinfo auprès de Bercy. Mais elles ne sont pas pérennes. "Avec l'atténuation du choc énergétique, ce sont des économies un peu toutes trouvées pour le gouvernement. Mais l'an prochain, il faudra trouver d'autres leviers", relève Sylvain Bersinger.

Des économies en matière de santé

Pour répondre aux objectifs de baisse des dépenses fixés par Bruno Le Maire, le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, a annoncé sur LCI vouloir renforcer les "contrôles" des arrêts-maladies. Il s'est en revanche dit peu favorable à l'allongement du délai de carence.

Le budget de la Sécurité sociale devrait aussi comporter un doublement de la franchise médicale sur les boîtes de médicaments et les consultations paramédicales (kiné, soins infirmiers...), qui passerait de 50 centimes à un euro. La Première ministre, qui a confirmé fin août sur France Bleu que la piste était à "l'étude", a assuré que le gouvernement tiendrait compte "des personnes très modestes", mais aussi "des patients qui auraient des affections de longue durée ou des affections chroniques". Elle a par ailleurs a promis que les taxes sur l'alcool ne seraient pas augmentées l'an prochain – une hypothèse qui avait vivement inquiété les viticulteurs.

Des économies sur la politique de l'emploi

Si l'apprentissage a permis de réduire le taux de chômage des jeunes, son coût exorbitant pourrait être revu à la baisse. L'aide de 6 000 euros que les entreprises touchent en embauchant un jeune fait l'objet d'une réflexion, a confirmé au Figaro le député macroniste Marc Ferracci, proche d'Emmanuel Macron.

Par ailleurs, quelque 15 000 emplois aidés devraient disparaître, a annoncé le ministre du Travail, Olivier Dussopt, en marge de l'université d'été du Medef à Paris, fin août. Enfin, le ministère planche sur l'introduction d'un "ticket modérateur" sur le compte personnel de formation, a assuré Bruno Le Maire. Jusqu'à 30% de la formation suivie pourraient rester à la charge de l'utilisateur. Une mesure qui reste "à l'étude", mais qui n'est pas si "urgente", a néanmoins nuancé Olivier Dussopt, mi-septembre dans L'Opinion. Au total, le gouvernement espère économiser un milliard d'euros sur la politique de l'emploi. Il compte par ailleurs sur les premiers bénéfices de sa réforme de l'assurance-chômage, qui devrait permettre d'économiser 700 millions d'euros l'an prochain.

Des baisses d'impôts reportées pour les ménages et les entreprises

Fidèle à la ligne tracée par Emmanuel Macron, Elisabeth Borne a également assuré qu'il n'était "pas question" que l'Etat augmente les impôts des ménages en 2024. Ces derniers verront par ailleurs le barème d'imposition sur le revenu rehaussé de 4,8%, afin d'éviter que les salariés augmentés en 2023 soient finalement perdants au moment de payer leurs impôts. Un effort qui coûtera 6 milliards d'euros à l'Etat.

Mais les baisses promises, elles, devront attendre la suite du quinquennat. Alors que le président avait évoqué au printemps une baisse d'impôts pour les ménages de deux milliards d'euros, Bruno Le Maire a assuré au Figaro que la promesse serait tenue "au plus vite" d'ici 2027... mais pas avant 2025 au minimum.

Par ailleurs, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), un impôt de production qui devait disparaître totalement l'an prochain, sera amenée à s'éteindre progressivement jusqu'en 2027, a aussi confirmé le ministre de l'Economie. Il ne semble en revanche plus question pour 2024 de supprimer les allègements de charges consentis aux entreprises sur les salaires compris entre 2,5 et 3,5 fois le smic, une piste un temps évoquée.

Des économies et des hausses d'impôts pour financer la transition écologique

Outre le report de certaines baisses d'impôts, l'exécutif compte maximiser ses recettes fiscales, afin de financer la transition écologique. Il va notamment augmenter la taxe dite "de solidarité" s'appliquant à tous les billets d'avion au départ de France afin de financer les investissements dans le ferroviaire. Des taxes supplémentaires sur les sociétés d'autoroutes et les billets d'avion figureront dans le budget 2024, a confirmé le ministre délégué chargé des Transports, Clément Beaune, à l'université d'été du Medef.

Le gouvernement veut aussi supprimer certaines niches fiscales dites "brunes" car elles encouragent l'utilisation d'énergies fossiles. C'est le cas de l'avantage sur l'utilisation de gazole non routier (GNR) dont bénéficient les secteurs du bâtiment et de l'agriculture, a confirmé Bruno Le Maire sur franceinfo. En revanche, les transporteurs, conserveront cette niche fiscale.

Du côté du logement, la niche Pinel, destinée aux particuliers investissant dans un logement neuf pour le louer, sera abandonnée, tandis que le prêt à taux zéro sera "recentré sur les opérations les plus respectueuses de l'environnement", a annoncé Bruno Le Maire. Le tout devrait rapporter "2,3 milliards à partir de 2025", précise Bercy aux Echos.

La taxe qui touche sous forme de malus les voitures thermiques neuves pesant plus de 1,8 tonne va "sans doute" être étendue, via l'abaissement de ce poids, a aussi indiqué Clément Beaune, sur RTL-Le Figaro-LCI.

Enfin, Elisabeth Borne a demandé au printemps à chaque ministère de se serrer la ceinture en identifiant 5% d'économies possibles, hors salaires. Ces sept milliards d'euros iront en partie vers le financement de la transition écologique, a annoncé Bruno Le Maire.

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