Budget de la Sécurité sociale : pourquoi le gouvernement Barnier est menacé d'une motion de censure dès lundi
L'heure de vérité pour Michel Barnier et son gouvernement. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) revient à l'Assemblée nationale, lundi 2 décembre. Le texte soumis aux députés est issu d'une commission mixte paritaire (CMP), au cours de laquelle sept députés et sept sénateurs se sont mis d'accord. Or, il contient encore des mesures qui irritent les oppositions, comme l'allègement de cotisations patronales ou le déremboursement de médicaments, ce qui compromet son adoption.
Le locataire de Matignon et Marine Le Pen discutaient encore d'éventuels ajustements dimanche, a confirmé le porte-parole des députés RN, Thomas Ménagé, sur France 3. Mais après avoir déclaré à La Tribune Dimanche que la censure n'était "pas inéluctable" si Michel Barnier acceptait "de négocier", et de faire de nouvelles concessions, Marine Le Pen a estimé en fin de journée que le gouvernement avait "mis fin à la discussion". "C'est extrêmement clair et nous avons pris acte de cela", a encore asséné la députée RN, ouvrant la voie à une censure.
Car si le texte peut être modifié jusqu'au dernier moment, le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, a appelé à respecter la dernière version issue de la CMP. "Revenir dessus serait s'asseoir sur le Parlement, la démocratie et la délibération dont nous respectons le compromis", a-t-il affirmé au Parisien. De quoi faire bondir le RN. "Par entêtement et sectarisme, la minorité gouvernementale met donc fin au cycle des négociations, au risque de provoquer sa censure", a réagi sur X le président du RN, Jordan Bardella. "Le gouvernement reste ouvert au dialogue, comme il l'est depuis le début", a répondu l'entourage du Premier ministre dimanche soir.
Les sénateurs de gauche ont claqué la porte
Les relations sont tout aussi cripsées entre Michel Barnier et l'opposition de gauche au Parlement. Preuve en est : les sénateurs socialistes, écologistes et communistes ont quitté l'hémicycle dimanche durant les débats sur le budget 2025. Ils ont fustigé un "coup de force" du gouvernement et de la droite sénatoriale, qui ont demandé, à la dernière minute, un nouvel examen de plusieurs dizaines de mesures déjà votées.
Le groupe PS du Sénat quitte la séance pour dénoncer une série de secondes délibérations demandées par le gouvernement et le rapporteur sur le #PLF2025. « Vous faites passer en force le budget au Sénat » dénonce @Th_Cozic, qui accuse le gouvernement d'être « mauvais perdant ». pic.twitter.com/9JzVSCcAGJ
— Public Sénat (@publicsenat) December 1, 2024
"Le gouvernement se laisse dicter ses positions par le RN", avait dénoncé plus tôt dimanche sur LCI la patronne des Ecologistes, Marine Tondelier, alors que l'exécutif a fait plusieurs gestes pour satisfaire le RN. Car Michel Barnier joue aussi son poste sur le budget. Faute de majorité à l'Assemblée, le Premier ministre avait prévenu mi-novembre qu'il engagerait "probablement" la responsabilité de son gouvernement sur le budget en utilisant l'article 49.3 de la Constitution, qui permet une adoption du texte sans vote. "Quand je vois ce qu'il s'est passé à l'Assemblée, il me semble difficile de faire autrement au bout de la discussion. Mais vous observerez que nous avons fait le choix de laisser le débat s'y dérouler", expliquait-il.
"Pas d'autres choix" que de voter la censure
L'utilisation d'un premier 49.3 par Michel Barnier, lundi, précipitera immanquablement le dépôt d'une motion de censure de la gauche ou de l'extrême droite. Les oppositions se disent prêtes à la voter dès mercredi (48 heures au plus tôt après le dépôt). "Nous attendons de voir le projet de budget de la Sécurité sociale lundi pour en tirer les conséquences. Si le texte n'a pas évolué et que le gouvernement décide d'un 49.3, nous voterons la censure", avait lancé le député RN Jean-Philippe Tanguy dans Les Echos samedi.
De leur côté, dans une lettre à Michel Barnier, le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure, et les chefs des groupes parlementaires socialistes, Boris Vallaud et Patrick Kanner, ont écrit : "Vous ne nous laissez pas d'autres choix en engageant le 49.3 que de voter, en responsabilité, la censure de votre gouvernement".
Si la motion de censure était votée par une majorité de députés (au moins de 289), ce serait la première chute d'un gouvernement depuis 1962, à l'époque où George Pompidou était Premier ministre. Le ministre de l'Economie, Antoine Armand, a toutefois mis en garde contre les conséquences d'un nouveau séisme politique, notamment une hausse des taux d'intérêt de la dette. "L'absence de budget, l'instabilité politique entraînerait une augmentation soudaine et substantielle des coûts de financement de la dette française", a-t-il déclaré samedi lors d'un point-presse. Le ministre a appelé "chacun à ses responsabilités" pour éviter que la crise politique ne se double d'une crise financière.
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.