Hollande a-t-il réussi ses trois premiers mois de présidence ?
Relativement populaire dans l'opinion, le chef de l'Etat pourrait perdre des plumes dans un contexte économique très dégradé.
Cette fois, la politique part en vacances pour de bon. François Hollande s'offre des congés à partir de jeudi 2 août au Fort de Brégançon (Var). Mardi, le gouvernement aura affronté sa dernière séance de questions orales à l'Assemblée nationale. L'occasion, avant la rentrée politique fin août, de dresser un bilan des trois premiers mois de François Hollande à l'Elysée. Un président qui reste plutôt populaire dans l'opinion, mais qui ne bénéficie d'aucun état de grâce.
Du retard dans le calendrier des promesses
"Je ne promettrai rien que je ne sois capable de tenir", répétait souvent François Hollande lorsqu'il n'était encore que candidat à la présidentielle. Il s'était alors engagé sur un calendrier précis des mesures à prendre durant les premières semaines et la première année de pouvoir. Pour l'instant, le gouvernement Ayrault est plus ou moins dans les clous. Sur les 22 mesures qui devaient être décidées entre le 6 mai et la fin juillet, 15 d'entre elles l'ont effectivement été. Symboliques (baisse de 30% de la rémunération du chef de l'Etat et des ministres) ou plus concrètes (retraite à 60 ans pour certains salariés, hausses d'impôts sur les ménages aisés...).
Sept autres mesures ont été jugées trop compliquées à mettre en œuvre dans ce délai et sont donc reportées à la rentrée. Parmi elles figurent des promesses de campagne importantes comme la réforme bancaire, qui doit séparer les activités de dépôt et les activités spéculatives, ou encore le doublement du plafond d'épargne sur le Livret A.
Au sein même de la majorité socialiste, certains s'impatientent et commencent à s'inquiéter d'un certain attentisme de la part du gouvernement, comme le raconte Le Monde. La session extraordinaire du Parlement qui s'est tenue en juillet n'aura vu passer que deux textes majeurs : le budget rectificatif et la loi sur le harcèlement sexuel. La rentrée des parlementaires, initialement prévue début septembre, pourrait même prendre un peu de retard, faute de texte prêt à adopter, a révélé Mediapart (article payant) il y a quelques jours.
Des débuts honorables sur la scène internationale
Ses premières semaines de mandat auront été accaparées par l'agenda international. A peine investi, François Hollande devait enchaîner deux rendez-vous cruciaux aux Etats-Unis : un sommet du G8 suivi d'un sommet de l'Otan. De l'avis des observateurs, le président français a plutôt réussi son entrée en matière internationale. Au G8, à Camp David, il a réussi à mettre la "croissance" – son leïtmotiv de campagne – au centre des discussions, isolant l'intransigeante chancelière allemande Angela Merkel. Au sommet de l'Otan, à Chicago, Hollande a dû faire avaler aux Américains la pilule d'un retrait anticipé d'Afghanistan dès la fin 2012.
Le président français peut se targuer d'avoir convaincu ses partenaires européens, fin juin, d'adopter un "pacte de croissance" venant compléter le "pacte budgétaire". Lequel, signé en son temps par Nicolas Sarkozy, n'a pas été formellement "renégocié", contrairement à ce qu'avait promis François Hollande durant la campagne présidentielle. Reste désormais à faire adopter ce traité par le Parlement, une épreuve qui aura valeur de test pour la cohésion de la majorité, comme l'explique L'Express.
Le style Hollande : normal, enfin presque
Apparaître comme l'anti-Sarkozy, être un président "normal". François Hollande avait construit une bonne partie de sa stratégie sur cet argument de campagne. Depuis son élection, il continue à donner des gages de "normalité" : relative discrétion dans les médias, rôle réaffirmé du Premier ministre et du gouvernement, multiplication des commissions de concertation...
Hollande aurait pu tout avoir d'un président normal si n'avait pas éclaté en pleine campagne des législatives le psychodrame Trierweiler-Royal. L'affaire du tweet de la Première dame, qui a apporté son soutien au concurrent de l'ex-compagne du président dans sa circonscription de La Rochelle, a subitement rompu la discrétion que François Hollande entretenait alors sur sa vie privée. "Ce que je reproche au tweet, c'est d'avoir fait basculer la vie privée dans la vie publique. (...) Ça a détruit l'image normale qu'il avait construite", a dit son fils Thomas quelques semaines plus tard, avant que le président ne mette les points sur les i lors de son interview du 14-Juillet. "Les affaires privées se règlent en privé."
Face à la crise, la France dans le brouillard
Comme prévu, le nouveau gouvernement s'est lancé dès le mois de juillet dans une opération "rétablissement des comptes publics" en gelant des dépenses, et surtout en augmentant toute une série d'impôts sur les ménages aisés et les entreprises. Sur le papier, ces mesures doivent permettre de réduire le déficit public à 4,5% fin 2012. Un nouveau train de mesures, encore plus sévères, devrait être annoncé à l'automne en prévision du budget 2013, qui doit ramener le déficit à 3%.
Mais le gouvernement va rapidement se trouver face à un dilemme. Car cette politique de rigueur, qui vise d'abord à rassurer les marchés et éviter un emballement de la crise européenne, pourrait avoir des effets contreproductifs pour l'économie française. Selon l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la recherche de l'équilibre budgétaire à l'horizon 2017 "amputerait l'activité de 1%" et "coûterait plus de 160 000 emplois en cinq ans".
De fait, les mauvaises nouvelles s'accumulent sur le front de l'emploi. En témoigne le plan social monstre présenté par le constructeur automobile PSA. Pour l'instant, le gouvernement tente de colmater les brèches, avec plus ou moins de succès, mais ne semble pas avoir trouvé le remède miracle pour relancer l'activité, promise à rester molle pour de longs mois.
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