AVANT/APRES. Inondations meurtrières en Espagne : dans la région de Valence, l'urbanisation galopante a aggravé les dégâts
Moins de champs et plus de béton. Au fil des décennies, la région de Valence, en Espagne, a changé de visage. Cette artificialisation galopante a eu de lourdes conséquences dans la nuit du mardi 29 au mercredi 30 octobre, alors que des pluies torrentielles se sont abattues sur l'est du pays. "L'urbanisation a clairement créé un toboggan géant entre la ville de Valence et son amont, là où l'orage a stationné", explique l'agroclimatologue Serge Zaka, sur X. Le bilan est catastrophique : plus de 150 morts et des dégâts considérables.
Sur ces images, on peut comparer l'évolution urbaine de différentes communes particulièrement touchées par ces inondations. Les premières photos, à gauche, ont été prises entre mars 1956 et septembre 1957 par des avions de l'armée américaine. Les secondes, à droite, sont des images satellite datant de 2021. Toutes sont diffusées par l'Instituto geográfico nacional (IGN) espagnol.
"On a bétonné tous azimuts"
L'observation de ces images permet de constater la diminution massive des surfaces naturelles, agricoles ou forestières au profit d'importantes constructions, en l'espace de 65 ans. "Depuis les années 1950 et 1960, nous avons ainsi construit dans des zones inondables, très près des rivières, on a bétonné tous azimuts", explique, au quotidien Le Monde, Antonio Aretxabala, docteur en géologie à l’université de Saragosse et expert en catastrophes naturelles.
En 2014, le géographe Víctor Soriano avait calculé que la région métropolitaine de Valence avait perdu les deux tiers de ses vergers en une cinquantaine d'années, rapporte le site Horta Noticias. Dans le même temps, la population de la ville, elle, est passée de 500 000 à près de 790 000 habitants, selon l'Institut national de statistiques.
Cette bétonnisation effrénée a une conséquence directe pour la métropole : l'imperméabilisation des sols, qui empêche l'eau de s'infiltrer. De quoi rendre cette zone plus vulnérable aux phénomènes météorologiques extrêmes, eux-mêmes intensifiés par le réchauffement climatique.
L'urbanisation vue du ciel
L'épicentre des inondations se trouve dans la ville de Paiporta, dans la banlieue sud de Valence. Selon les autorités, une quarantaine de personnes ont trouvé la mort dans cette commune de 27 000 habitants, dont une mère et son bébé de trois mois emportés par le courant. En quelques décennies, la petite bourgade perdue au milieu des champs est devenue une ville importante, encerclée de hangars logistiques.
Toujours dans la banlieue de Valence, les images de voitures empilées dans les rues de Sedavi ont fait le tour du monde. "Je n'aurais jamais pensé vivre ça", a confié à l'AFP Eliu Sanchez, habitant de la commune de 10 000 habitants qui a été dévastée par des torrents d'eau et de boue. Là aussi, une urbanisation galopante a changé le visage de la ville.
A Chiva, un petit village dans l'arrière-pays de Valence, il est tombé 491 litres d'eau par mètre carré en seulement huit heures, soit l'équivalent d'une année de précipitations, selon l'agence météorologique espagnole, qui parle d'"accumulations extraordinaires". De quoi causer d'importants dégâts dans cette commune, qui a connu une large expansion ces dernières décennies, avec notamment la création d'une gigantesque zone industrielle.
Une bétonnisation généralisée que l'on peut constater également à Picanya, dont la population a plus que doublé en 60 ans. Des carcasses de voitures jonchent désormais ses rues, après le passage dévastateur des inondations. "Face à la nouvelle donne climatique, la question de la vulnérabilité de nos villes se pose clairement", alerte Serge Zaka.
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