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Accusations de viols contre Damien Abad : comment les affaires impliquant des ministres ont-elles été traitées pendant le premier quinquennat Macron ?

Parmi les principales affaires impliquant des ministres sous le premier quinquennat d'Emmanuel Macron, sept se sont soldĂ©es par des dĂ©parts. 

Article rédigé par franceinfo
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Le président de la République, Emmanuel Macron, à l'Elysée, le 13 mai 2022.
 (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS / AFP)

DĂ©missionner ou rester Ă  son poste ? Damien Abad, tout juste nommĂ© ministre des SolidaritĂ©s, de l'Autonomie et des Personnes handicapĂ©es, est accusĂ© de viol par deux femmes. Alors que le parquet de Paris a fait savoir Ă  franceinfo ne pas ouvrir d'enquĂȘte prĂ©liminaire "en l'Ă©tat", aprĂšs le signalement de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique, la question du maintien, ou non, de l'ancien Ă©lu LR au gouvernement agite l'exĂ©cutif.

"Je peux vous assurer que, s'il y a de nouveaux éléments, si la justice est à nouveau saisie, on [en] tirera toutes les conséquences", a réagi la PremiÚre ministre, Elisabeth Borne, dimanche 22 mai. Pour comprendre la position adoptée par l'exécutif, franceinfo revient sur la gestion des affaires impliquant des ministres durant le premier mandat d'Emmanuel Macron.

Juin 2017 : embarrassé par l'affaire des Mutuelles de Bretagne, Richard Ferrand rejoint l'Assemblée nationale

Alors ministre de la CohĂ©sion des territoires, Richard Ferrand quitte le gouvernement au soir du 19 juin 2017. Selon les proches du ministre, sondĂ©s par franceinfo, "le prĂ©sident [de la RĂ©publique] a demandĂ© Ă  son homme de confiance" de rejoindre les bancs du Palais Bourbon, oĂč il brigue la prĂ©sidence du groupe LREM.

Quelques semaines plus tĂŽt, Le Canard enchaĂźné a rĂ©vĂ©lĂ© qu'en 2011, les Mutuelles de Bretagne, dirigĂ©es Ă  l'Ă©poque par Richard Ferrand, ont choisi de louer des locaux proposĂ©s par une sociĂ©tĂ© civile immobiliĂšre dĂ©tenue Ă  99% par sa compagne, Sandrine Doucen. Le parquet de Brest ouvre une enquĂȘte prĂ©liminaire en juin, classĂ©e sans suite, notamment pour prescription.

L'enquĂȘte rebondit en novembre 2017 avec la plainte pour "prise illĂ©gale d'intĂ©rĂȘts", "recel" et "complicitĂ©" de ce dĂ©lit dĂ©posĂ©e par l'association Anticor. Plainte qui n'empĂȘche pas Richard Ferrand de devenir le quatriĂšme homme de l'Etat en Ă©tant nommĂ© prĂ©sident de l'AssemblĂ©e Ă  l'automne 2018. Mis en examen en 2019, il conserve cette fonction. En mars 2021, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai retient la prescription en faveur de Richard Ferrand. Anticor se pourvoit en cassation.

Juin 2017 : François Bayrou dĂ©missionne aprĂšs l'ouverture d'une enquĂȘte sur les assistants parlementaires du MoDem

AprĂšs 34 jours passĂ©s en tant que garde des Sceaux, François Bayrou dĂ©missionne le 21 juin 2017. Deux autres ministres MoDem, Sylvie Goulard, ministre des ArmĂ©es, et Marielle de Sarnez, ministre chargĂ©e des Affaires europĂ©ennes, dĂ©missionnent Ă©galement Ă  quelques jours d'intervalle. Une enquĂȘte prĂ©liminaire a Ă©tĂ© ouverte le 9 juin sur des soupçons d'emplois fictifs concernant des assistants de dĂ©putĂ©s europĂ©ens du MoDem, parti dont François Bayrou est le prĂ©sident.

En dĂ©cembre 2019, François Bayrou est finalement mis en examen (pour "complicitĂ© de dĂ©tournement de fonds publics"), comme une dizaine de membres ou anciens membres du MoDem. AprĂšs avoir Ă©tĂ© un temps en retrait de la vie politique, il est nommĂ© en septembre 2020 Ă  la tĂȘte d'un haut-commissariat au Plan par Emmanuel Macron. L'enquĂȘte est toujours en cours.

Février 2018 : Nicolas Hulot est soutenu aprÚs la révélation d'une plainte pour viol

En février 2018, le magazine Ebdo dévoile la plainte pour viol déposée en 2008, mais classée sans suite pour prescription, contre le ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot. Emmanuel Macron et tout son gouvernement font bloc derriÚre lui.

MarlÚne Schiappa, alors secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, reproche, dans une tribune publiée dans Le Journal du dimanche, aux "accusateurs de Nicolas Hulot" de "bafouer la parole des femmes". Ce dernier annonce finalement sa démission du gouvernement le 28 août 2018 pour une autre raison, invoquant des décisions prises contraires à ses convictions écologistes.

Depuis, Nicolas Hulot a Ă©tĂ© visĂ© par de nouvelles accusations. Le 26 novembre 2021, le parquet de Paris a ouvert une enquĂȘte prĂ©liminaire contre l'ex-animateur de tĂ©lĂ©vision pour "viol" et "agressions sexuelles", aprĂšs la diffusion sur France 2 d'un reportage d'"EnvoyĂ© spĂ©cial". Dans ce document, six femmes accusaient Nicolas Hulot de violences sexuelles qui auraient eu lieu entre 1989 et 2001. Entendu par les enquĂȘteurs le 24 mai dernier, il est ressorti des locaux de la police sans qu'aucune charge ne soit retenue contre lui Ă  ce stade, a appris franceinfo de source judiciaire.

Mai 2018 : entendue dans l'affaire Business France, Muriel Pénicaud reste en place

Le dossier est embarrassant pour l'ElysĂ©e. Muriel PĂ©nicaud, la ministre du Travail, apparaĂźt dans une affaire remontant Ă  la prĂ©sidence de François Hollande. Deux mois avant sa nomination au gouvernement, le parquet de Paris a ouvert, en mars 2017, une enquĂȘte à propos de l'organisation d'un dĂ©placement d'Emmanuel Macron, alors ministre de l'Economie, en janvier 2016, Ă  Las Vegas (Etats-Unis).

L'organisation en avait été confiée sans appel d'offres à la société Havas par Business France, entité dépendant de Bercy et dirigée à l'époque par Muriel Pénicaud. Auditionnée en mai 2018 dans le cadre de l'information judiciaire ouverte pour "favoritisme" et "recel de favoritisme", la ministre n'est pas mise en examen et reste sous le statut de témoin assisté. Elle est maintenue à son poste jusqu'au remaniement de juillet 2020.

Septembre 2018 : craignant des révélations sur sa situation fiscale, Laura Flessel quitte son poste 

Le 4 septembre 2018, Laura Flessel, la ministre des Sports, quitte le gouvernement, avançant "des raisons personnelles". Pourtant, selon Le Canard enchaßné et Mediapart (article réservé aux abonnés), la démission de l'ancienne championne d'escrime résulte d'une omission dans sa déclaration à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) de ses revenus issus d'une société exploitant son droit à l'image.

Selon Mediapart, le fisc avait informé la Commission des infractions fiscales de Bercy, en vue d'une possible plainte pénale pour fraude, quelque temps avant sa démission.

Octobre 2018 : Françoise Nyssen, visĂ©e par une enquĂȘte prĂ©liminaire, cĂšde sa place

La ministre de la Culture est remplacĂ©e par Franck Riester lors d'un remaniement, alors qu'elle est visĂ©e, depuis aoĂ»t 2018, par une enquĂȘte prĂ©liminaire du parquet de Paris. Celle-ci fait suite aux rĂ©vĂ©lations du Canard enchaĂźné concernant des travaux illĂ©gaux rĂ©alisĂ©s en 1997 au sein des locaux parisiens d'Actes Sud, la maison d'Ă©dition que Françoise Nyssen dirigeait avec son Ă©poux. L'enquĂȘte a Ă©tĂ© classĂ©e sans suite en dĂ©cembre 2020.

Juillet 2019 : François de Rugy démissionne, malgré l'absence de poursuites judiciaires

Pas d'enquĂȘte ouverte, mais une affaire qui tombe mal, en plein mouvement des "gilets jaunes". Le 16 juillet 2019, François de Rugy, ministre de la Transition écologique, dĂ©missionne aprĂšs la parution d'un article de Mediapart (article rĂ©servĂ© aux abonnĂ©s) qui raconte la "vie de chĂąteau" menĂ©e lorsqu'il prĂ©sidait l'AssemblĂ©e nationale. En plus des repas aux homards, François de Rugy est accusĂ© d'avoir rĂ©alisĂ© des "travaux de confort" avec des fonds publics dans son logement de fonction. 

Il quitte son ministÚre à la veille d'une nouvelle révélation : il est épinglé pour avoir utilisé son indemnité représentative de frais de mandat (IRFM) pour payer une partie de ses cotisations à Europe Ecologie-Les Verts. Une somme ensuite déduite de son impÎt sur le revenu. Pourtant, 24 heures avant sa démission, Emmanuel Macron lui avait renouvelé sa confiance. "Je ne prends pas de décisions sur la base de révélations, mais de faits", avait-il martelé.

Novembre 2019 : éclaboussé par l'affaire Avenir lycéen, Jean-Michel Blanquer reste inébranlable 

Le ministre de l'Education nationale est soupçonnĂ© par LibĂ©ration et Mediapart (articles rĂ©servĂ©s aux abonnĂ©s) d'avoir tĂ©lĂ©guidĂ© la crĂ©ation du petit syndicat Avenir lycĂ©en, Ă  la ligne pro-gouvernementale. ProblĂšme, ce mĂȘme syndicat a reçu de gĂ©nĂ©reuses subventions publiques de 65 000 euros en 2019, utilisĂ©es en frais de bouche et hĂŽtels de luxe. Le ministĂšre diligente une enquĂȘte administrative sur les subventions accordĂ©es Ă  cette association. Le 1er dĂ©cembre 2020, le parquet de Paris ouvre une enquĂȘte pour "dĂ©tournement de fonds publics" à l'encontre du syndicat. L'enquĂȘte est toujours en cours.

DĂ©cembre 2019 : Jean-Paul Delevoye se retire avant l'ouverture d'une enquĂȘte 

Le haut commissaire aux Retraites quitte ses fonctions le 16 dĂ©cembre 2019 aprĂšs que plusieurs journaux, dont Le Parisien, ont pointé treize "omissions" de mandats dans sa dĂ©claration Ă  la HATVP. Il accepte "la dure loi de la responsabilitĂ©, de l'exemplaritĂ© et de la transparence" lors de sa dĂ©mission. Deux jours aprĂšs son retrait, la HATVP saisit la justice. Le parquet de Paris ouvre une enquĂȘte prĂ©liminaire le 19 dĂ©cembre pour "abus de biens sociaux", "abus de confiance" et "recel". Il a Ă©tĂ© condamnĂ© en dĂ©cembre 2021 Ă  quatre mois de prison avec sursis et 15 000 euros d'amende.

Depuis juin 2020 : Olivier Dussopt, visĂ© par une enquĂȘte du Parquet national financier, est maintenu

Mediapart (article rĂ©servĂ© aux abonnĂ©s) rĂ©vĂšle en juin 2020 qu'Olivier Dussopt, ministre de l'Action et des Comptes publics, est visĂ© par une enquĂȘte prĂ©liminaire du Parquet national financier pour "prise illĂ©gale d'intĂ©rĂȘts" et "corruption". Une affaire qui n'a pas freinĂ© l'ascension de celui qui vient d'ĂȘtre nommĂ© ministre du Travail dans le gouvernement d'Elisabeth Borne. 

Alors qu'il Ă©tait dĂ©putĂ©-maire d'Annonay (ArdĂšche) en janvier 2017, il avait acceptĂ© deux lithographies en cadeau par la sociĂ©tĂ© de traitement de l'eau Saur. Olivier Dussopt avait signĂ© un contrat entre l'entreprise et sa commune, six mois aprĂšs la rĂ©ception des Ɠuvres. "J'ai restituĂ© (...) les lithographies", s'est dĂ©fendu l'intĂ©ressĂ© aprĂšs une perquisition de son domicile par l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financiĂšres et fiscales en aoĂ»t 2020.

Depuis juillet 2020 : Gérald Darmanin reste en place malgré les accusations de violences sexuelles

C'est "une relation de confiance d'homme Ă  homme" entre un prĂ©sident et son ministre qui permet Ă  GĂ©rald Darmanin de rester en fonction. Alors qu'en juillet 2020, sa nomination à l'IntĂ©rieur provoque la colĂšre de nombreuses associations fĂ©ministes, Emmanuel Macron martĂšle ne pas vouloir que la France devienne une "dĂ©mocratie d'opinion". "A partir du moment oĂč il est accusĂ©, mais pas jugĂ©, il devient en quelque sorte la victime d'un jugement de rue ou de rĂ©seaux sociaux", commente alors le prĂ©sident.

En juin 2017, une premiĂšre femme dĂ©pose plainte pour "viol" contre le ministre de l'IntĂ©rieur pour des faits remontant Ă  2009. Selon la plaignante, celui qui est alors chargĂ© de mission au service juridique de l'UMP la reçoit pour tenter de faire rĂ©viser une condamnation de 2004 pour chantage et appels malveillants Ă  l'Ă©gard d'un ex-compagnon. AprĂšs avoir classĂ© la plainte sans suite en 2017 puis en 2018, la justice relance une enquĂȘte en 2020. Le ministre de l'IntĂ©rieur est placĂ© sous le statut de tĂ©moin assistĂ©. En janvier dernier, le parquet de Paris requiert finalement un non-lieu. 

En fĂ©vrier 2018, une seconde femme l'accuse d'"abus de faiblesse" pour l'avoir contrainte Ă  des rapports sexuels en Ă©change de l'obtention d'un logement social et d'un emploi Ă  Tourcoing (Nord), ville dont il a Ă©tĂ© maire de 2014 Ă  2017. La justice a classĂ© cette enquĂȘte sans suite en mai 2018.

Depuis janvier 2021 : visĂ© par une enquĂȘte, SĂ©bastien Lecornu est promu dans le gouvernement Borne

Autre ministre Ă  avoir Ă©tĂ© maintenu malgré une enquĂȘte pour "prise illĂ©gale d'intĂ©rĂȘts" et "omission de dĂ©claration Ă  la HATVP" : SĂ©bastien Lecornu, ex-ministre des Outre-Mer. Il a rĂ©cemment pris la suite de Florence Parly au ministĂšre des ArmĂ©es, dans le gouvernement Borne.

L'enquĂȘte, lancĂ©e en janvier 2021, vise ses activitĂ©s passĂ©es Ă  la tĂȘte du dĂ©partement de l'Eure. Dans sa dĂ©claration Ă  la HATVP, le ministre mentionne avoir touchĂ© 7 874 euros brut de "jetons de prĂ©sence" en tant qu'administrateur de la SociĂ©tĂ© des autoroutes Paris Normandie (SAPN) entre 2016 et 2017. Or, celui qui Ă©tait alors prĂ©sident du conseil dĂ©partemental de l'Eure aurait approuvĂ© plusieurs dĂ©libĂ©rations de la collectivitĂ© ayant trait Ă  la SAPN. Il a Ă©tĂ© entendu en avril par la police anticorruption lors d'une audition libre. L'enquĂȘte suit son cours.

Juillet 2021 : Eric Dupond-Moretti, mis en examen, ne démissionne pas

En janvier 2021, une enquĂȘte pour "prise illĂ©gale d'intĂ©rĂȘts" est ouverte Ă  l'encontre du garde des Sceaux, par la Cour de justice de la RĂ©publique (CJR). Mis en examen le 16 juillet 2021, Eric Dupond-Moretti s'est toujours refusĂ© Ă  dĂ©missionner : "Rien n'entamera ma dĂ©termination, je suis extrĂȘmement serein. Ma lĂ©gitimitĂ©, je la tiens du prĂ©sident de la RĂ©publique et du Premier ministre", dĂ©clarait-il l'Ă©tĂ© dernier lors d'un dĂ©placement. Au cƓur du dossier, les plaintes de trois syndicats de magistrats et de l'association Anticor. Ils lui reprochent d'avoir utilisĂ© son rĂŽle de ministre de la Justice pour rĂ©gler ses comptes contre des magistrats avec qui il avait eu maille Ă  partir lorsqu'il Ă©tait avocat, notamment dans l'affaire dite "des fadettes". 

Le 15 avril dernier, les magistrats instructeurs de la CJR ont clos leurs investigations. Mardi 10 mai, le ministĂšre public a requis un procĂšs contre le garde des Sceaux, estimant qu'il "existe des charges suffisantes contre ce dernier d’avoir commis ces faits". Il revient maintenant aux magistrats de la commission d'instruction de la Cour de justice de la RĂ©publique de dĂ©cider s'ils renvoient l'ancien avocat devant cette Cour ou s'ils prononcent un non-lieu.

Décembre 2021 : Alain Griset démissionne une fois condamné

Le 8 dĂ©cembre 2021, le ministre dĂ©lĂ©gué aux PME est condamnĂ© à six mois de prison avec sursis et Ă  une peine d'inĂ©ligibilitĂ© de trois ans avec sursis. En cause, une "dĂ©claration incomplĂšte ou mensongĂšre de sa situation patrimoniale" et "de ses intĂ©rĂȘts". Il dĂ©missionne du gouvernement et annonce faire appel de la condamnation.

Dans cette affaire, Alain Griset est soupçonné par la HATVP d'avoir sciemment omis de déclarer "des participations financiÚres détenues dans un plan d'épargne en actions, ainsi que le compte espÚces associé, pour un montant total de 171 000 euros", ainsi que des "participations directes" dans plusieurs sociétés telles que la Française des Jeux ou Natixis. Quelques semaines avant le procÚs, le ministre affirmait avoir "la confiance renouvelée du président de la République et du Premier ministre".

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