Élections européennes : quel impact de la montée des droites radicales sur les grands dossiers du Parlement ?

Le séisme observé en France à l'issue des européennes ne se retrouve pas au niveau du Parlement européen où les conservateurs restent majoritaires. Les droites nationalistes et souverainistes font malgré tout une percée très importante : elles occupent plus du quart de l’Hémicycle et vont peser sur les décisions.
Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Les drapeaux des pays européens devant le Parlement de l'UE à Strasbourg. (SEBASTIEN BOZON / AFP)

Les formations de droite radicale et d'extrême droite ont progressé lors des élections européennes, dimanche 9 juin. Selon une projection publiée par le Parlement européen, dimanche soir, le groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE) recueillerait 72 sièges, tandis que la formation Identité et Démocratie (ID) s'adjugerait 58 sièges. Le parti d'extrême droite allemand Alternative für Deutschland (AfD) obtiendrait 16 sièges. Ses élus sont non-inscrits depuis leur exclusion du groupe Identité et démocratie. Avec ce centre de gravité qui se déplace très clairement à droite, le futur Parlement européen peut conduire au détricotage de textes phares ou à l'enlisement de certaines législations. 

Sur l'Ukraine, des divisions

Les eurodéputés n'ont pas de compétence sur la politique étrangère, ils ne peuvent pas influencer les débats sur l'envoi éventuel de troupes en Ukraine. En revanche, ils peuvent tenter de freiner les négociations d'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne. Sur ce sujet, le pouvoir des droites radicales dépendra beaucoup de leur capacité à coopérer, ce qu'elles ont eu beaucoup de mal à faire jusqu'ici. Elles ont notamment des divergences idéologiques profondes sur la Russie. Il y a un fossé entre le groupe "Identité et Démocratie", auquel appartient le Rassemblement national, globalement pro-russe, et le groupe des "Conservateurs et réformistes" (ECR) dominé par l'italienne Giorgia Meloni, qui, elle, reste dans les grandes lignes très critique de Vladimir Poutine et défend un rapprochement avec l’OTAN. 

Mais c'est un fait, Moscou trouvera davantage de soutien dans la nouvelle assemblée. En février 2024, les eurodéputés ont condamné dans une résolution "les efforts continus de la Russie pour saper la démocratie européenne" à travers les parlementaires recrutés comme "agents d’influence", les financements accordés à certains partis "pour en faire des relais de sa propagande". Ce genre de texte aura plus de mal à passer.

Un durcissement sur l'immigration

Le pacte sur la migration et l'asile adopté il y a moins d'un mois va faire l'objet de toutes les attaques, d'autant qu'il est déjà jugé trop laxiste par les conservateurs. Quinze pays veulent même aller plus loin, s'inspirer du Royaume-uni qui a passé un accord avec le Rwanda pour y envoyer les demandeurs d'asile.

Juste avant les élections européennes, le Rassemblement national a déposé un recours contre l'application de ce texte, notamment l'une de ses dispositions, qui prévoit qu'en cas de forte pression, la Commission peut demander aux États membres d'accueillir ou d'aider financièrement des demandeurs d'asile, pour mieux répartir la charge entre les États. Cette solidarité-là, l'extrême-droite n'en veut pas.

La transition écologique en difficulté

Les objectifs ambitieux du Pacte vert, qui cristallisent la colère du monde agricole, risquent d'autant plus d'être remis en cause qu'ils font déjà l'unanimité contre eux, aussi bien chez les conservateurs que les droites radicales. Un Parlement où l'extrême-droite pèse davantage, est susceptible d'enrayer les législations climatiques pour l'après-2030, voire de compliquer l'application des textes déjà votés.

Pour prendre un exemple parmi d'autres : les eurodéputés ont entériné la fin des ventes de voitures neuves à moteur thermique à l'échéance 2035. Les partis de droite réclament l'annulation de cette échéance. 

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