Mexique : Claudia Sheinbaum, première femme présidente de ce pays qui compte l'un des taux de féminicides les plus importants au monde
"Je ne vous décevrai pas" ont été les premiers mots de Claudia Sheinbaum, grande vainqueure lundi 3 juin avec près de 58% des voix. C'est presque trente points d'avance sur sa rivale de centre droit, Xochitl Galvez, soit bien plus que ce que prédisaient les sondages. Les Mexicaines - et même les Mexicains - tirent d'ailleurs une certaine fierté de cette campagne 100% féminine, qui contraste avec le duel d'octogénaires de leur voisin américain.
Port de tête de danseuse, queue-de-cheval impeccable et sourire implacable, Claudia Sheinbaum est une pionnière : elle a été la première femme de son pays à devenir docteure en ingénierie électrique, avant d'aller poursuivre ses études à Berkeley, en Californie. Avant de se lancer en politique elle a d'ailleurs travaillé 20 ans comme physicienne sur l’énergie et le changement climatique - elle a notamment fait partie du GIEC, le Groupe intergouvernemental d'experts sur le climat.
Dix femmes assassinées chaque jour
Son élection est un symbole très fort dans une société où les femmes sont particulièrement victimes de violences : dix femmes sont assassinées chaque jour au Mexique selon l'ONU. C'est l'un des taux les plus élevés du monde. Mais Claudia Sheinbaum, qui s'est révélée féministe sur le tard, veut mettre en œuvre au niveau national ce qu'elle a réussi à l'échelle de la capitale. Créer un parquet spécialisé dans les féminicides, dont une grande partie sont encore classés comme suicides par des enquêteurs mal formés. Il s'agit d'améliorer leur traitement judiciaire, quand neuf fois sur dix, les poursuites débouchent sur une relaxe. Imposer l'éloignement du conjoint violent, ou monter tout un réseau d'avocates spécialisées, font partie des mesures.
Tout cela, l'actuel président, Andres Manuel Lopez Obrador, ne l'a pas fait. Entre 2018 et 2020, au début de son mandat, les Mexicaines sont même massivement descendues dans les rues pour dénoncer le machisme de la société et l'inaction du chef de l'État. Ce qui ne l'empêche pas de quitter le pouvoir aujourd'hui avec 60% d'opinions favorables.
Lutter contre les cartels de la drogue et l'insécurité
Claudia Sheinbaum, qui lui doit toute sa carrière, incarne une gauche plus moderne et progressiste, mais elle s'est engagée à poursuivre sa politique sociale dans un pays où près de 47 millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Petite-fille de juifs européens installés au Mexique dans les années 1940 pour fuir la barbarie nazie, elle sera aussi jugée sur sa capacité à lutter contre les cartels de la drogue et l'insécurité. Pendant la campagne, une trentaine de candidats au Congrès et aux élections municipales ont été assassinés. Tout est dans son slogan : "C'est le temps des femmes et de la transformation" du pays.
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