Quatre choses à savoir sur l'affolement qu'ont connu les places boursières lundi

Les Bourses mondiales rebondissent mardi, après qu'un vent de panique a saisi les marchés financiers la veille pour des raisons multifactorielles.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Un trader à la Bourse de New York (Etats-Unis), le 5 août 2024. (MICHAEL M. SANTIAGO / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

Vent de panique sur les grandes places financières. Les Bourses mondiales ont fortement reculé lundi 5 août, parfois à des niveaux record, avant de retrouver une marche presque normale mardi. Inquiétudes autour de l'économie américaine, évolutions de la valeur du yen... Franceinfo tente de comprendre ce qui s'est joué ces dernières heures.

Un "lundi noir" pour plusieurs places boursières

La Bourse de Tokyo a enregistré sa pire chute en nombre de points de son histoire, véritable "lundi noir" pour le Japon. L'indice boursier principal, le Nikkei, a chuté de 12,4%, "sa pire journée en trente-sept ans", depuis le krach de 1987, d'après le décryptage du Financial Times. Les Bourses de Séoul et de Taïwan n'ont pas non plus été épargnées. Une situation qui s'est largement calmée dès mardi à Tokyo, avec un envol du Nikkei de 10,23%.

A Wall Street, principale place boursière mondiale, les indices avaient commencé à flancher dès vendredi, et la situation ne s'est pas arrangée dans les jours qui ont suivi. La Bourse de New York a conclu sur une chute brutale lundi : le Dow Jones, plus ancien indice mondial, a connu sa pire séance depuis 2022 et le Nasdaq, le deuxième plus important marché d'actions des Etats-Unis, a terminé au plus bas depuis mai. La société Nvidia, importante dans le domaine de l'intelligence artificielle générative, a aussi chuté de 6,36%. Des informations de presse avaient évoqué un éventuel retard de plusieurs mois de la sortie de ses puces de nouvelle génération.

L'indice VIX, surnommé "l'indice de la peur" puisqu'il mesure la volatilité du marché, a grimpé en séance lundi à son plus haut niveau depuis mars 2020 et le début de l'épidémie de Covid-19.

En Europe, au lendemain d'une clôture en nette baisse, les principales places boursières ont toutefois rebondi mardi. "Un retournement de tendance s'opère" sur les marchés financiers après un lundi anxiogène, confirment à l'AFP les analystes de la banque allemande Deutsche Bank.

Le taux de chômage américain et la "règle de Sahm" en cause

Le marché de l'emploi américain est au cœur de toutes les attentions. Aux Etats-Unis, le taux de chômage en juillet a augmenté plus que prévu à 4,3%, contre les 4,1% attendus, le plus haut taux de sans-emploi depuis octobre 2021. Les créations d'emplois américaines ont quant à elles ralenti à 114 000, contre 179 000 au mois de juin.

De quoi faire craindre une récession américaine via l'application de "la règle de Sahm", cet indicateur créé par Claudia Sahm, une ancienne économiste de la banque centrale américaine et de la Maison Blanche. Selon cette règle, l'économie américaine entre en récession lorsque la moyenne des trois derniers mois du taux de chômage est supérieure de plus de 0,5 point de pourcentage par rapport à son niveau le plus bas des douze derniers mois. Or, l'indicateur affichait 0,53 point de pourcentage en juillet.

Selon cette règle, les marchés chutent donc, en raison de la crainte d'une récession imminente outre-Atlantique, c'est-à-dire une période de recul temporaire de l'activité économique, selon la définition de l'Insee. Mais la "règle de Sahm" ne fait pas l'unanimité. Cet indicateur est "purement empirique", et n'a "pas de fondement théorique", tient à rappeler à l'AFP Florian Ielpo, responsable de la recherche macroéconomique au sein de la société de gestion d'actifs, Lombard Odier IM. D'autant plus qu'Austan Goolsbee, le président de la Réserve fédérale de Chicago, a expliqué au média américain CNBC lundi que les données sur l'emploi étaient certes "plus faibles qu'attendues", "mais ne ressemblent pas pour le moment à une récession".

L'ajustement des taux directeurs de la Réserve fédérale scruté de près

Les craintes d'une récession à venir aux Etats-Unis ont augmenté la pression sur la Réserve fédérale (Fed), la banque centrale américaine, pour qu'elle réduise davantage ses taux et plus tôt que prévu. La Fed avait porté ses taux à leur plus haut niveau depuis vingt ans, dans la fourchette de 5,25 à 5,50%, pour lutter contre l'inflation. Une décision maintenue mercredi 31 juillet. Le patron de l'institution, Jerome Powell, a également annoncé attendre septembre pour décider ou non d'une baisse de ces taux.

Cependant, cette déclaration est intervenue avant la publication des chiffres du chômage, qui ont changé la donne. Les craintes de récession ont donc conduit les investisseurs à s'attendre à trois baisses de taux consécutives de la part de la Fed d'ici à la fin de l'année, alors que les analystes n'en envisageaient qu'une, voire deux, jusqu'ici. Certains investisseurs tablent même sur une réduction des taux plus forte que prévu lors de la prochaine réunion mi-septembre.

 Des spéculations sur le yen

Le yen et ses fluctuations sont l'autre élément déclencheur de ce "lundi noir", selon les analystes. La pratique financière du "carry trade" sur la monnaie officielle du Japon porte son lot de responsabilité. Elle consiste à emprunter de l'argent dans la monnaie d'un pays dont la banque centrale pratique des taux faibles, pour ensuite l'investir dans une devise aux rendements plus élevés. Mais cette pratique a été mise à mal par la remontée subite des taux directeurs japonais, explique le journal La Tribune.

Et pour cause, la Banque du Japon (BoJ) a relevé de façon inattendue, mercredi 31 juillet, son taux directeur à 0,25%, un niveau plus vu depuis 2008. Une décision qui "a frappé le marché boursier japonais comme un coup de tonnerre", explique Dilin Wu, stratégiste chez l'entreprise Pepperstone : elle a provoqué un rebond du yen et une forte baisse de la Bourse de Tokyo dès le lendemain.  

La décision du milliardaire américain Warren Buffett, annoncée samedi, de céder la moitié de ses participations dans Apple, gonflant ainsi ses réserves d'argent liquide plutôt que d'actions, a également participé au désordre général, rendant nerveux le marché. Une liquidation d'un montant de 76 milliards de dollars (69,6 milliards d’euros), détaille Le Monde.

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