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Vendre des parts d'entreprises publiques, la fausse bonne idée du gouvernement

Le Premier ministre veut consacrer les sommes récoltées à d'autres investissements, comme le numérique ou l'emploi. Mais ce n'est pas forcément un bon calcul.

Article rédigé par Simon Gourmellet
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
L'Etat vendre une partie de ses parts d'Areva et EDF. (JEAN-PIERRE CLATOT / AFP)

Vendre pour investir, oui, mais pas n'importe comment. Jean-Marc Ayrault a affirmé dimanche 5 mai que le gouvernement prévoyait de réduire la participation de l'Etat dans le capital "d'un certain nombre d'entreprises publiques". Le Premier ministre veut consacrer les sommes ainsi obtenues à d'autres investissements stratégiques, comme le numérique ou la bataille pour l'emploi.

Lundi matin, le ministre de l'Economie a pris le relais. Refusant de dévoiler le nom des sociétés qui pourraient être concernées, Pierre Moscovici a affirmé que l’idée générale était "de jouer ici ou là. Cela peut être réduire les taux de participation, cela peut être vendre des participations non-stratégiques".

Arnaud Montebourg avait déjà lancé l'idée en avril, dans un entretien accordé au Wall Street Journal (en anglais). Le ministre du Redressement productif avait alors évoqué la possibilité de céder des parts de GDF-Suez, dans lequel l'Etat détient plus de 36% du capital, ou encore d'EDF (84%). Une annonce qui intervenait au lendemain de la vente par l'Etat de 3,12% du capital de Safran. L'opération lui avait alors rapporté 448,5 millions d'euros. Une bonne méthode pour trouver des fonds en période de rigueur ? Pas forcément. Francetv info vous dit pourquoi.

Parce que ce n'est pas le bon moment pour vendre

L'ensemble du capital que possède l'Etat est estimé à environ 60 milliards d'euros. Une source de fonds non négligeable en ces temps de disette budgétaire. Mais si on remonte quelques années en arrière, ce même capital était estimé à 70 milliards en 2011, et même 177 milliards en 2007, notait à l'époque L'Express. Avec la crise, la valorisation en Bourse de ces entreprises a fondu. 

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Ainsi, fin novembre, l'action EDF a atteint un plus bas historique, à seulement 14 euros, contre plus de 80 euros en 2007. Début mars, le titre GDF Suez ne valait, pour sa part, que 14 euros, contre 16,5 euros lundi 6 mai. "Clairement, il vaudrait mieux que l'Etat attende pour céder les titres EDF ou GDF Suez. Mais c'est tout le problème lorsque l'on vend des bijoux de famille : on doit le faire et ce n'est jamais au bon moment", relève Christian Jimenez, président de la société de gestion Diamant Bleu Gestion.

Parce qu'il est plus intéressant d'emprunter

On le sait, la France est endettée. Mais cela ne veut pas dire que l'Etat ne doit plus emprunter. Au contraire : en ce moment, sur les marchés, le taux d'emprunt à 10 ans de la France évolue à son plus bas historique, 1,716% le 5 avril. Contacté par francetv info, Mathieu Plane, de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) est donc sceptique quant au plan du gouvernement. "Plutôt que de vendre alors que les cours sont au plus bas, l'Etat devrait privilégier l'emprunt, qui n'a jamais été aussi intéressant pour la France que maintenant. Je ne suis pas certain que ce soit la meilleure stratégie.

Parce que ces parts rapportent de l'argent

En dehors de leur simple valeur, ces placements rapportent, et plutôt bien. Ainsi, en 2011, même si les performances boursières des entreprises françaises ont été médiocres, plombées par des bénéfices en baisse, comme le détaillait le rapport sur l'Etat actionnaire, les dividendes sont quant à eux restés stables. Ainsi, en 2011, au titre des résultats 2010, l'Etat a gagné 4,4 milliards d'euros. Soit 100 millions de plus qu'en 2010. Reste à savoir quels seront les résultats pour les exercices suivants et si la vente des parts, que compte réaliser le gouvernement, compensera la perte de dividendes engendrée.

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