Résultats des européennes 2024 : quels sont les grands enseignements du scrutin à l'échelle de l'UE ?
Pas de séisme en Europe. Le Parti Populaire européen (PPE, centre droit), principale force politique du Parlement européen, s'est une nouvelle fois imposé lors des élections qui se sont achevées, dimanche 9 juin. Sa coalition avec les sociaux-démocrates et les centristes libéraux de Renew Europe reste majoritaire. Et la présidente sortante de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, semble en route pour un nouveau mandat.
Mais ce scrutin fera tout de même évoluer le visage de l'hémicycle européen. Progression de l'extrême droite, à relativiser mais bien réelle, recul des écologistes et hausse de la mobilisation... Voici les principaux enseignements de ces élections.
L'extrême droite se renforce
En 2019, l'extrême droite européenne avait réalisé une percée historique, en envoyant une centaine d'eurodéputés à Bruxelles et Strasbourg. Cinq ans plus tard, les formations de droite radicale et d'extrême droite se renforcent. Leurs deux groupes compteront au total 131 élus, soit 13 de plus que dans le Parlement sortant.
S'ajoutent d'autres forces parmi les non-inscrits comme l'AfD, le parti d'extrême droite allemand. Arrivé à la deuxième place en Allemagne avec 15,9% des voix, devant le SPD du chancelier Olaf Scholz, il passe de 11 à 15 sièges. D'autres formations d'extrême droite sont même sorties victorieuses dans leur pays, dont le Rassemblement national en France (31,37%) ou, en Italie, le parti Fratelli d'Italia (28,77%) de la cheffe du gouvernement Giorgia Meloni, qui avait fait de cette élection un référendum sur sa personne.
"Il est vrai que l'extrême droite réalise de bons résultats, notamment en France et en Allemagne, mais c'est moins ce que prédisaient les sondages" au niveau européen, nuance Sophie Pornschlegel, directrice des études pour l'antenne bruxelloise de l'Institut Jacques-Delors. En Hongrie, le parti du Premier ministre nationaliste Viktor Orban a enregistré un revers relatif avec 44% des voix, son plus faible score depuis l'adhésion du pays à l'Union européenne en 2004. De plus, ces performances sont très variables. "Il est difficile d'analyser les élections européennes comme un phénomène unique parce qu'en réalité, il y a 27 scrutins directement influencés par des enjeux nationaux", explique Sophie Pornschlegel.
Au Parlement européen, les extrêmes droites restent par ailleurs divisées en deux groupes politiques : Identité et démocratie (ID) et Conservateurs et réformistes européens (CRE). Ce rapprochement reste très incertain. A trois semaines des élections, le Rassemblement national avait mis un terme à son alliance avec l'AfD, et le parti allemand avait été exclu par ID, après des propos polémiques de sa tête de liste au sujet du nazisme.
La droite reste la première force politique
Sans surprise, le Parti Populaire européen (PPE) conforte son assise à Strasbourg et Bruxelles. Première force politique au Parlement européen, le bloc centre-droit compte désormais 185 élus, soit cinq de plus que dans le précédent hémicycle (qui comptait 15 sièges de moins).
La formation a bénéficié de bons résultats en Allemagne (30%), en Espagne (34,18%) et en Pologne (37,06%). "Cette victoire de la droite accompagne la poussée de l'extrême droite : ces deux phénomènes électoraux se conjuguent, analyse Sophie Pornschlegel. En Allemagne et en Espagne, les conservateurs ont repris en partie les thèmes de campagne de l'extrême droite."
"Le PPE est le groupe politique le plus puissant. (...) Nous construirons un rempart contre les extrêmes de gauche et de droite, nous les arrêterons", a assuré dimanche la présidente sortante de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, issue du PPE et candidate à sa reconduction.
Les tractations et grandes manœuvres entre les nouveaux eurodéputés débutent lundi et dureront jusqu'à la première session du Parlement en juillet. Au cours de l'été, les gouvernements devront s'accorder sur un nom pour diriger la Commission européenne.
Les Verts en perte de vitesse
"C'est la grande déception de ce scrutin", analyse Sophie Pornschlegel. Quatrième force politique lors de la précédente mandature au Parlement européen avec 72 eurodéputés, le groupe des Verts et de l'Alliance libre européenne (ALE) perd 19 sièges et apparait comme l'un des grands perdants de ces élections.
Ce résultat s'explique par les mauvaises performances des écologistes de l'autre côté du Rhin. "Au total, l'Allemagne envoie 96 députés à Strasbourg et Bruxelles. En conséquence, un mauvais score des Verts a une influence directe sur la composition et l'influence de l'ALE", explique à franceinfo cette spécialiste des institutions européennes. La délégation allemande sera composée de 16 élus, soit neuf sièges de moins par rapport à 2019. En France, Les Ecologistes-EELV réalisent l'un de leurs pires scores depuis vingt ans, atteignant de justesse les 5% nécessaires pour avoir des députés.
"Les résultats en Allemagne et en France sont évidemment un coup dur, mais en même temps, dans de nombreux pays, les électeurs ont élu des députés européens issus de partis verts, a déclaré le vice-président des Verts européens, Bas Eickhout, dans un communiqué. Les écologistes enregistrent des victoires dans plusieurs pays d'Europe du Nord. "Nous sommes arrivés premiers au Danemark et aux Pays-Bas, et nous resterons une voix verte forte en Suède et en Finlande", assure Terry Reintke, cocandidate des Verts européens à la tête de la Commission, dans un communiqué.
Au Danemark, dans un paysage politique très morcelé, le parti populaire socialiste (composante locale de l'ALE) est arrivée en tête et en nette progression de 4,2 points par rapport à 2019. Les Verts enregistrent d'autres victoires, notamment en Suède où ils font une percée (13,8%), et aux Pays-Bas, où les écologistes, alliés aux sociaux-démocrates, sont arrivés en tête et décrochent quatre sièges.
Un taux de participation élevé
Appelés aux urnes entre jeudi et dimanche, selon les Etats membres, les électeurs européens ont déjoué les pronostics qui annonçaient un scrutin marqué par l'abstention. Le taux de participation a enregistré une très légère progression par rapport à 2019, pour s'établir à 50,8% des quelque 360 millions d'électeurs appelés aux urnes, selon les estimations du Parlement européen lundi à la mi-journée.
La hausse de la participation s'observe notamment en France. Elle atteint 51,49% selon le ministère de l'Intérieur, soit 1,4 point supplémentaire par rapport à 2019, où la tendance était déjà à la hausse. En France comme à l'échelle européenne, la participation est la plus haute depuis les élections de 1994 (52,71% en France et 56,67% en moyenne dans l'UE).
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