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Présidentielle : on vous résume notre analyse des 100 promesses phares d'Emmanuel Macron en 2017

La rédaction de franceinfo a étudié ce qu'étaient devenues 100 promesses formulées par Emmanuel Macron lors de sa campagne de 2017. Avant de vous y plonger, voici un résumé de ce bilan non exhaustif du quinquennat.

Article rédigé par Margaux Duguet
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9 min
Après un quinquennat, nous avons vérifié si Emmanuel Macron avait tenu ses promesses phares.  (JESSICA KOMGUEN / FRANCEINFO -  KAY NIETFELD / MAXPPP - BUNTOON RODSENG / EYEEM - PM IMAGES)

Alors qu'Emmanuel Macron a officialisé sa candidature à sa réélection, le 3 février, voici venue l'heure du bilan. Le président a-t-il honoré les engagements du candidat de 2017 ? La rédaction de franceinfo a sélectionné et analysé le devenir de 100 promesses, parmi les quelque 400 formulées dans son programme de l'époque.

>> On a vérifié les 100 promesses phares du programme d'Emmanuel Macron en 2017. Combien en a-t-il tenues ?

La vérification de la mise en œuvre de chacune de ces promesses permet de constater que 46 ont été tenues, 28 en partie tenues et 26 non tenues. Avant de vous plonger dans cet examen détaillé, voici les grands enseignements que l'on peut en tirer.

Economie : une feuille de route appliquée, malgré quelques écueils

Emmanuel Macron avait fait de la modernisation de l'économie l'un des axes majeurs de sa campagne de 2017. "Il est réputé plus compétent que ses adversaires sur le sujet, lui qui est ancien inspecteur des finances et ancien banquier", rappelle Bruno Cautrès, chercheur au CNRS et enseignant à Sciences Po.

Cinq ans plus tard, l'ancien locataire de Bercy est resté plutôt fidèle à ce qu'il avait promis. "Il y a énormément de promesses tenues en début de mandat, où il part sur des chapeaux roues, puis cela se corse à partir de l'été 2018 avec l'affaire Benalla, puis les 'gilets jaunes' et la pandémie où il répond aux crises et n'est plus dans l'initiative", poursuit Bruno Cautrès.

En début de mandat, Emmanuel Macron a, par exemple, fait baisser le taux d'impôt sur les sociétés à 25% comme il s'y était engagé. Le chef de l'Etat a également remplacé l'ISF, fin 2017, par l'IFI pour les foyers fiscaux dont le patrimoine immobilier net est supérieur à 1,3 million d'euros. L'ancien candidat s'était aussi engagé à ce que "tous les travailleurs" puissent avoir "le droit à l'assurance-chômage". Depuis novembre 2019, la loi permet aux actifs, privés de l'assurance-chômage, de bénéficier d'une allocation forfaitaire de 800 euros pendant six mois maximum en cas de redressement ou liquidation judiciaire.

Le candidat souhaitait aussi "augmenter les salaires nets par la suppression des cotisations salariales". Elles ont effectivement été effacées par la loi de financement de la Sécurité sociale de 2018. Avec la revalorisation de la prime d'activité, cette mesure a permis aux salariés de bénéficier d'un gain de pouvoir d'achat de 3,5% en moyenne sur le quinquennat, selon une étude de l'Institut des politiques publiques, de novembre 2021. Autre promesse phare : supprimer la taxe d'habitation pour 4 ménages sur 5 en 2020. Les lois de finances votées depuis 2017 ont bien acté sa disparition progressive.

Parfois, l'objectif annoncé est manqué de peu. L'actuel président voulait, par exemple, ramener le chômage à 7% et créer 1,3 million d'emplois. Le chômage a bien diminué pendant son quinquennat, mais au quatrième trimestre de 2021, il se stabilisait à 7,4%. Entre début 2017 et fin 2021, les créations nettes d'emplois salariés sont estimées à 1,14 million, en prenant en compte les derniers chiffres de l'Insee. Soit un peu moins que la promesse initiale.

Autre écueil du bilan économique : la promesse de supprimer 120 000 postes de fonctionnaires n'a pas été tenue. "Cela peut être un marqueur pour l'électorat de droite et Valérie Pécresse pourrait lui rappeler", note Bruno Cautrès. Enfin, l'instauration d'un régime universel de retraites, autre mesure phare du candidat Macron, n'a pas été à son terme, notamment à cause de la pandémie de Covid-19.

Société : un programme ambitieux presque respecté

Dans ce domaine, le chef de l'Etat a respecté ses engagements. "Il y a beaucoup de choses qui ont été faites mais cela n'a pas été très bien vendu à l'opinion publique", remarque Bruno Cautrès. Ses promesses en matière d'éducation ont ainsi été, en grande partie, réalisées. Sa mesure emblématique de diviser par deux les effectifs des classes de CP et CE1 dans les réseaux d'éducation prioritaire (REP) a été appliquée dès la rentrée 2017. La réforme du baccalauréat a aussi bien été instaurée à partir de la rentrée 2019.

L'ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux femmes célibataires et aux lesbiennes était aussi une proposition marquante. Elle a été définitivement actée lors de l'adoption du projet de loi bioéthique, le 29 juin 2021. Toutefois la promesse de reconnaître la filiation des enfants nés à l'étranger de GPA (gestation pour autrui) n'a été que partiellement tenue. Depuis le 3 août 2021, la transcription d'un acte d'état civil étranger pour les enfants nés de GPA à l'étranger est en réalité limitée au seul parent biologique.

En matière de santé, alors que la crise du Covid-19 frappe la France depuis plus de deux ans, le bilan est contrasté. La plupart des propositions de campagne ont souvent été tenues, mais pas toujours à la lettre. C'est le cas, par exemple, de la prise en charge à 100% des lunettes, prothèses auditives et dentaires, sans augmentation du prix des mutuelles. La réforme "100% santé" permet bien une prise en charge intégrale de certains dispositifs, mais le prix des mutuelles a grimpé de 3,4% en 2022 par rapport à 2021, selon la Mutualité française.

Emmanuel Macron promettait aussi d'augmenter le salaire des soignants et d'optimiser le financement des hôpitaux. Cela s'est traduit en juillet 2020 par le fameux Ségur de la santé et ses 33 propositions. Dix-huit mois après, plus de 1,5 million de soignants ont reçu une augmentation de salaire de 183 euros net par mois, selon le ministère. Mais sur le terrain, ces augmentations salariales sont jugées insuffisantes.

Sécurité et justice : des promesses rarement appliquées à la lettre

Le régalien "est moins le point fort" d'Emmanuel Macron et son bilan en la matière est assez maigre, selon Bruno Cautrès. Sa mesure phare – le recrutement de 10 000 policiers et gendarmes – est cependant tenue. Selon un rapport de la commission des finances du Sénat, 10 529 postes de policiers et gendarmes ont été créés entre 2017 et 2022.

Le candidat promettait aussi de "combattre l'idéologie jihadiste et ceux qui la promeuvent en France". A ce jour, 22 lieux de culte ont été fermés tandis que le CCIF et BarakaCity, deux associations "islamistes", selon le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, ont été dissoutes.

Emmanuel Macron avait aussi établi plusieurs propositions concernant l'islam en France. Comme promis, le gouvernement a bien "aidé les musulmans à restructurer l'islam de France", notamment à travers le Forum de l'islam de France (Forif). Deux autres promesses relatives à la formation des imams aux valeurs de la République et à la création de centres de déradicalisation fermés sont, quant à elles, en partie tenues.

Par ailleurs, le candidat avait promis de créer un service militaire obligatoire et universel d'un mois. Cinq ans plus tard, le compte n'y est pas. L'objectif du gouvernement s'est mué en généralisation du Service national universel (SNU) à l'ensemble d'une classe d'âge, soit 700 000 jeunes chaque année. Or en 2021, le SNU ne concernait que 15 000 jeunes. En 2022, le gouvernement mise sur 50 000 volontaires pour participer à des séjours de cohésion de deux semaines.

Autre promesse de 2017 évaporée : construire 15 000 places de prison supplémentaires sur cinq ans. Or, le programme immobilier pénitentiaire du gouvernement, publié en avril 2021, prévoit "la création nette de 15 000 places de prison supplémentaires sur une période de dix ans", et non cinq. Dans le détail, 7 000 places sont prévues d'ici à 2022 et 8 000 autres entre 2025 et 2027. Mais ces 7 000 premières places ne seront pas toutes prêtes d'ici à la fin du quinquennat.

Environnement : des propositions peu suivies d'effets

En 2017, l'écologie n'était pas l'axe essentiel du programme du candidat Macron. "Il croit dans l'action de l'Etat, un Etat productiviste. Sa matrice, c'est le progrès, la technique et l'industrie", rappelle Bruno Cautrès. Une fois à l'Elysée, le président avait pourtant promis de faire de l'écologie "le combat du siècle". Certains engagements ont bien été tenus : l'interdiction du gaz de schiste et des nouveaux permis d'exploration d'hydrocarbures, ainsi que l'imposition d'au moins 50% de produits bio, labels de qualité ou local, dans les cantines.

Le candidat assurait aussi qu'il fermerait toutes les centrales à charbon : trois sur quatre ont cessé leur activité et celle de Cordemais (Loire-Atlantique) tournera au moins jusqu'en 2024.

D'autres promesses ne sont tout simplement pas tenues, comme le doublement de la capacité des énergies éolienne et solaire. Selon les chiffres de Réseau de transport d'électricité (RTE), le retard semble trop important pour être comblé avant la fin du quinquennat. Même réserve sur la mise en place d'un calendrier prévoyant l'élimination progressive des pesticides. Le gouvernement a reculé sur l'interdiction du glyphosate et a réintroduit temporairement les néonicotinoïdes pour la filière de la betterave. Côté calendrier, les réductions de vente de pesticides prévues par le plan Ecophyto II+ ne sont pas tenues. "Avec Macron, on est dans l'écologie pragmatique des petits pas et non pas dans une écologie radicale des grands pas", résume le politologue Daniel Boy à franceinfo.

Institutions et vie politique : des réformes majeures qui n'ont pas vu le jour

Il avait fait de la rénovation de la vie politique l'un des marqueurs de sa campagne. Cinq ans plus tard, "c'est le néant", juge sévèrement Bruno Cautrès. "Finalement, ce qu'il vit comme sa plus grosse contribution à l'institutionnel, c'est sa propre élection. Avec lui, l'Assemblée nationale a rajeuni, est plus paritaire et un grand nombre de députés n'avait jamais été élu auparavant."

Au regard des propositions lancées, le bilan paraît maigre. Certes, la grande loi de moralisation de la vie publique a en partie été réalisée. Les activités de conseil des parlementaires sont désormais strictement encadrées, ils ne peuvent plus embaucher un membre de leur famille et le régime spécial de leurs retraites a disparu. D'autres promesses sont restées lettre morte, comme l'interdiction du cumul de plus de trois mandats identiques successifs. Ou la présentation, par le président de la République, de son bilan national et européen, une fois par an, devant le Congrès. Cela ne s'est produit qu'à deux reprises durant le mandat.

La suppression d'au moins un quart des départements et la réduction d'un tiers du nombre de parlementaires n'ont pas non plus vu le jour. Il faut enfin évoquer l'introduction d'une dose de proportionnelle aux élections législatives. La mesure n'a pas été inscrite officiellement dans le programme sur lequel franceinfo a fondé son analyse, mais elle a néanmoins été annoncée par le candidat Macron à travers plusieurs déclarations. L'engagement n'a pas été respecté.

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