Attentat près de la tour Eiffel : qui est Armand Rajabpour-Miyandoab, qui a revendiqué l'attaque et a été mis en examen ?
L'auteur de l'attaque au couteau près de la tour Eiffel, qui a fait un mort et deux blessés, samedi 2 décembre, est un jeune Français de 26 ans, dont les parents sont Iraniens. Armand Rajabpour-Miyandoab a été interpellé peu après les faits et entendu dans les locaux de la section antiterroriste de la brigade criminelle de Paris. Il a été mis en examen, mercredi 6 décembre, pour "assassinat en relation avec une entreprise terroriste en état de récidive légale", "tentative d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste en état de récidive légale" et "association de malfaiteurs terroriste en vue de la préparation d'un ou plusieurs crimes d'atteinte aux personnes en état de récidive légale".
Il a prêté allégeance à l'Etat islamique dans une vidéo de revendication, a annoncé dimanche soir le procureur antiterroriste, Jean-François Ricard. Déjà condamné pour des faits en lien avec le terrorisme commis en 2015-2016, il souffre de troubles psychiatriques. Voici ce que l'on sait de cet individu.
Condamné à cinq ans de prison pour un projet d'attaque à la Défense
L'assaillant avait déjà été interpellé en 2016 par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) pour un projet d'action violente dans le quartier d'affaires de La Défense (Hauts-de-Seine), près de Paris. En lien "avec des individus ancrés dans l'idéologie jhadiste", "il avait projeté" "au printemps 2016" "de rejoindre l'Etat islamique en zone irakosyrienne", a précisé le procureur antiterroriste lors d'une conférence de presse dimanche soir.
Selon les informations de France Inter, il avait été établi, à l'époque de sa condamnation, qu'Armand Rajabpour-Miyandoab échangeait sur les réseaux sociaux avec plusieurs islamistes radicaux. Parmi eux, un des membres du groupe islamiste Forsane Alizza, Maximilien Thibaut. Ce jihadiste, aujourd'hui décédé, était parti combattre dans les rangs du groupe Etat islamique avec son épouse, Mélina Boughedir, actuellement détenue en Irak où elle purge une peine de 20 ans de prison.
Il était également en contact avec Larossi Abballa, abattu après avoir tué un couple de policiers en 2016 à Magnanville, ainsi qu'avec Adel Kermiche, lui aussi abattu par les forces de l'ordre après un attentat dans une église de Saint-Etienne-du-Rouvray, en 2016. Pour autant, rien ne permet de décrire le suspect comme un proche de ces hommes.
Condamné à cinq ans d'emprisonnement, dont un avec sursis, Armand Rajabpour-Miyandoab était sorti le 25 mars 2020, après quatre ans de détention. Il faisait l'objet depuis d'un "suivi avec mise à l'épreuve", a indiqué le procureur antiterroriste.
En 2020, après l'assassinat de Samuel Paty, Armand Rajabpour-Miyandoab s'était présenté au commissariat, affirmant avoir échangé sur les réseaux sociaux avec le terroriste Abdoullakh Anzorov, a appris franceinfo d'une source proche du dossier. Un élément confirmé par Jean-François Ricard lors de sa conférence de presse. Placé en garde à vue pendant 48 heures, il avait été laissé libre sans poursuites. Mais le Parquet national antiterroriste (Pnat) "avait obtenu un renforcement de ses obligations".
Un traitement interrompu malgré des troubles psychiatriques
Depuis sa sortie de prison, Armand Rajabpour-Miyandoab était suivi par les services de renseignement sur ses activités en ligne, qui n'étaient pas inquiétantes ces derniers mois. En plus de son islamisme radical, il était connu pour ses troubles psychiatriques. Au vu de "l'évolution de ces troubles", "déjà relevés en détention", "le Pnat avait demandé une nouvelle expertise psychiatrique", a détaillé le procureur antiterroriste. Il avait alors été "soumis à une injonction de soins impliquant un suivi psychiatrique contrôlé par un médecin coordonnateur, effectif jusqu'en avril 2023", a poursuivi le magistrat, ajoutant qu'"à compter de cette date, il était suivi par la DGSI".
En garde à vue, selon une source policière, Armand Rajabpour-Miyandoab a affirmé ne plus prendre le traitement qui lui avait été prescrit. Les autorités savaient qu'il l'avait arrêté depuis mars 2022, en accord avec son médecin, a appris franceinfo de source proche de l'enquête. Fin octobre, sa mère "avait signalé son inquiétude" car "son fils se repliait sur lui-même", a fait savoir Jean-François Ricard, avant de relever qu'"aucun élément ne nécessitait de nouvelles poursuites pénales".
Selon Jean-Charles Brisard, président du Centre d'analyse du terrorisme, qui avait suivi son procès en 2018, le rapport de l'expert psychologue et celui de l'expert psychiatre "ne démontraient pas de troubles psychologiques ou psychiatriques. Ils notaient une naïveté de sa part, un caractère influençable".
"Une personne qui est radicalisée, avec des problèmes psychiatriques lourds, c'est un cocktail explosif très difficile à détecter et à arrêter pour les services de renseignement", a de son côté déploré dimanche sur franceinfo Matthieu Valet, porte-parole du Syndicat indépendant des commissaires de police (SICP). Il existe "des mesures" pour suivre ce genre de profils, mais "malheureusement, elles n'empêchent pas de passer à l'acte", explique-t-il.
Une vidéo de revendication dans laquelle il prête allégeance à l'Etat islamique
Armand Rajabpour-Miyandoab a publié sur son compte X (ex-Twitter), ouvert en octobre, une vidéo de revendication de son attaque, samedi soir, et l'a reconnu lors de sa garde à vue. Dans cette vidéo, il s'exprime "en langue arabe" et "prête allégeance à l'Etat islamique", apportant "son soutien aux jihadistes" en Afrique, en Irak, en Syrie, au Yemen ou encore au Pakistan, a précisé le procureur antiterroriste.
Il apparaît également dans une vidéo amateur montrant des policiers tenant en joue un homme, vêtu de noir et le visage en partie dissimulé, qui recule pour s'éloigner d'eux dans la rue, tout en brandissant un marteau dans leur direction. Selon le maire du 15e arrondissement, Philippe Goujon, interrogé par l'AFP, l'assaillant a affirmé aux policiers qu'il portait une ceinture d'explosifs, ce qui s'est révélé faux.
Après son arrestation, l'assaillant a déclaré aux policiers qu'il considérait la France comme "complice de ce que faisait Israël" à Gaza, a rapporté Gérald Darmanin lors d'un point-presse le soir de l'attaque. Des propos réitérés en garde à vue, où il a expliqué aux enquêteurs qu'il "ne pouvait plus supporter que les musulmans meurent, tant en Afghanistan qu'en Palestine, à cause de l'Occident", a appris France Télévisions de source policière.
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